Ville, bâtiment, biodiversité : comment habiter la nature ?
Premier facteur de pression sur la biodiversité, le changement d’usage des sols est largement induit par le développement des villes, au côté des activités agricoles. Le développement urbain est en outre impliqué dans les grandes autres pressions sur la biodiversité : prélèvement des ressources, changement climatique, pollutions, espèces invasives, etc.
Au-delà de son impact sur la biodiversité pour elle-même, la ville entretient des rapports multiples et complexes avec le vivant.
Lieu de vie de près de 8 citoyens sur 10, la ville est une interface privilégiée de connexion avec le vivant, alors que l’extinction de l’expérience de nature et ses conséquences, notamment notre apathie environnementale, ont été documentés depuis les années 1970. Les co-bénéfices du contact avec le vivant en milieu urbain sur la santé mentale et physique sont l’objet de recherches croisées entre sciences du vivant, psychologie et médecine.
La nécessaire accélération de l’adaptation au réchauffement climatique et aux dérèglements qu’il engendre (notamment sur le cycle de l’eau, avec sécheresses et épisodes pluvieux violents, mais aussi canicules, met en lumière l’importance des services écosystémiques et des « solutions fondées sur la nature ».
Pour limiter l’atteinte aux écosystèmes urbains, retrouver un contact sensible avec le vivant et réussir le défi de l’adaptation, plusieurs approches doivent être conjuguées.
Il convient à la fois de définir les règles d’un urbanisme bio-climatique et de planifier une vision d’ensemble, mais aussi de mobiliser tous les points « d’acupuncture », notamment les espaces proches du bâti, parcellaire privé qui représente entre 50 et 80 % des villes et métropoles (70 % des espaces verts de la métropole de Lyon sont ainsi du domaine privé).
Au-delà d’une conception et d’une transformation adaptée (débitumation, renaturation), la gestion, autrement dit l’entretien et l’animation de ces espaces sont une clé du développement de ce potentiel écologique, de services et d’usages.
Plus loin, il s’agit de mieux définir notre rapport au vivant, de dépasser l’opposition nature-culture, considérant la ville comme un véritable écosystème où peuvent naitre de nouveaux équilibres entre les humains et les vivants non humains, pour définir collectivement pour chaque site les partis pris les plus adaptés : comment habiter la nature ?
Avec ce dossier, l’objectif est de faire un état des lieux de l’ensemble des enjeux liés à la réintégration de la Nature en ville, ses avantages mais aussi ses limites.
Dossier soutenu par
Rédaction en chef :
Lois Moulas
Directeur général à l'Observatoire de l'immobilier durable
Delphine Mourot
Responsable de programme - Biodiversité & Biodiversity Impulsion Group à l'OID
Pierre darmet
Directeur marketing et développement commercial chez les Jardins de Gally - Vice-président de l'association CIBI
I. Biodiversité urbaine : de quoi parle-t-on ?
Bâtiment et biodiversité, comment habiter la nature ?
La biodiversité subit une crise sans précédent, accentuée dans les villes où vit la majorité de la population. L'aménagement urbain a un rôle crucial dans la préservation de la biodiversité en adaptant les villes au changement climatique et en répondant aux désirs des citadins d'une meilleure connexion avec la nature.
Pierre Darmet (Les Jardins de Gally)
Préserver la biodiversité, une science vertueuse
La ville apparait à première vue comme un environnement hostile aux espèces végétales et animales. Les espaces urbains cachent en réalité une diversité d’espèces faisant fi de la fragmentation des espaces, parfois aussi grâce à l’aide de communautés engagées.
Marion Liermann, Cécile Le Berre (Ekkoïa)
Biodiversité et cadre bâti, vers de nouvelles synergies
La prise en compte des interactions entre biodiversité et cadre bâti est essentielle pour l’aide à la décision lors des opérations d’aménagement urbain. Les interactions positives et négatives sur le site du projet et au-delà doivent être considérées. Pour se faire, quels sont les méthodes et outils les plus fructueux ?
Nicoleta Schiopu, Aline Brachet (CSTB)
Monitoring de la biodiversité : mesurer notre impact, sauver nos espèces
Pour ralentir le déclin de la biodiversité, il est primordial de comprendre, et donc de mesurer, l'impact de chacune des actions humaines sur la biodiversité. L'Internet des objets apparait alors comme un allié incontournable.
Manon Jeanty (Birdz)
Indice de connectivité écologique, le potentiel d'interactions à la loupe
Développer des connectivités écologiques fonctionnelles exige des outils pertinents. C'est Pourquoi ARP Astrance, avec l'aide d'Ubiquiste, a développé un indicateur de connectivité écologique dédié aux milieux urbains.
Hervé Moal (LOMA Management), Victor Lavisse (Gondwana), Matias Meyrueis (ARP Astrance), Simon Tarabon (Ubiquiste)
II. Le vivant : des solutions pour répondre aux défis environnementaux
Un bâti végétalisé pour accueillir la biodiversité
Frédéric Madre, Sophiet Rousset-Rouvière (Adivet)
Solutions Fondées sur la Nature : mieux gérer l'eau en ville
Clément Daignan, Maxime Fouillet (OIEau)
Renaturation urbaine : des concepts aux services écosystémiques établis
Michel Le Borgne (Verdir)
Végétaliser un toit, oui, mais pas sans entretien !
Amandine Martinet (Construction21)
III. Garantir un accès universel et équitable à la nature : un enjeu de société
La double peine de l'écologue
La loi actuelle ne donne pas aux écologues les armes nécessaires pour protéger la biodiversité. Si les études sont obligatoires pour évaluer les impacts des projets immobiliers, elles sont généralement insuffisamment proportionnées aux enjeux.
Agathe Maussion (Diagobat)
Les gardiens d'immeubles, des ambassadeurs de la gestion écologique
L’association Noé et le Groupe 3F, bailleur social français, ont œuvré au déploiement d’une gestion plus écologique des espaces verts des résidences 3F.
Manon Dehalle (Jardins de Noé), Madeleine Hervé (3F)
Îlot Fertile, l'éclosion d'une nouvelle durabilité urbaine
Comment le réaménagement d’une friche urbaine a-t-il permis de prolonger une zone de nature tout en créant de nouvelles fonctionnalités au sein du quartier ? Avec quelle attention portée au bien-être des usagers et, sur le long terme, au renouveau de la ville ?
Priscilla Brouillet, Léa Sapin (ELAN), Céline Badet (Linkcity)
Villages : retisser la trame du vivant
L’attention actuelle portée à l’intégration de la biodiversité se concentre sur les métropoles. L’effort mérite aussi d’être porté sur les agglomérations en milieu rural, souvent entourées par des monocultures qui laissent peu de place à la diversité du vivant.
Viviana Comito (ENSA)
Vers un urbanisme inspiré par la vie, pour la vie
L'approche One Health reconnaît l'interconnexion entre la santé des personnes, des animaux, des plantes et de leur environnement commun. Elle trouve une résonance particulière dans la conception de la ville biomimétique, où l'harmonie entre ces éléments est cruciale.
Clémence Béchu (Béchu & Associés)
IV. Passer à l’action : des concepts aux applications concrètes
Systématiser la donnée biodiversité dans l'immobilier
Pour opérer un changement de paradigme vers des modèles économiques respectueux du vivant, il est aujourd’hui indispensable de développer des outils opérationnels et accessibles pour les entreprises.
Delphine Mourot (OID, BIG)
Depuis 2021, La Poste Immobilier développe une démarche exigeante d’amélioration de la biodiversité sur son parc immobilier et ses espaces verts. Pour y parvenir, elle a défini des objectifs chiffrés de surfaces sur lesquelles aménager des espaces favorables à la biodiversité.
Célia Darrisse, Glenn Le Colleter (La Poste Immobillier)
Ancien atelier automobile devenu immeuble de bureaux de BNP Paribas Real Estate, METAL 57 est un exemple de reconstruction de la ville sur la ville et de reconversion d’actif immobilier. Implanté sur un ancien site industriel, l’immeuble a fait l’objet d’un travail poussé afin de se muer en relai du vivant
Vincent Voute (BNP Paribas Real Estate)
La prise en compte de la biodiversité progresse dans les nouveaux projets de construction ; mais qu’en est-il des milliers de bâtiments déjà construits ? Le label BiodiverCity® Life innove en permettant d'encourager la mise en place de mesures visant à intégrer la biodiversité et la biophilie dans la gestion d'un actif immobilier.
Victor Lavisse (ARP Astrance)
Avec l'empreinte croissante de l'humanité sur la planète, chaque décision de conception, chaque matériau utilisé, chaque espace vert incorporé devient un acte militant en faveur de tous les écosystèmes. Comment alors repenser l'architecture ?
Françoise Raynaud (Loci Anima)
Les actions en faveur de la biodiversité ne doivent plus être à la marge du projet immobilier, ni intervenir trop tard. De la conception à sa livraison et au-delà, doivent être appliqués différents leviers d’intégration du vivant et de bien-être occupants.
Olivia Conil Lacoste, Maud Robertson, Caroline Wehbe (Bouygues Immobilier)
"Nous visons les 300 hectares végétalisés à Paris d'ici 2040"
Interview réalisée par Anne-Sophie Tardy, Responsable éditorial de Construction21
Lois Moulas
Delphine Mourot