Bâtiment démontable : l’avenir pour réduire l’empreinte carbone de certains équipements ?

Rédigé par

Jean Voisin

3421 Dernière modification le 09/10/2019 - 10:16
Bâtiment démontable : l’avenir pour réduire l’empreinte carbone de certains équipements ?

Alors que l’empreinte carbone fait l’actualité avec l’arrivée prochaine de la RE2020 et les premiers retours autour de E+C-, une méthode simple de limiter l’énergie grise d’un bâtiment existe depuis longtemps en agriculture ou dans l’industrie : le bâtiment démontable. Par ailleurs, des projets ambitieux ont déjà été conçus pour le résidentiel (pop-up dorms, voir l’étude de cas) ou l’artistique (Opéra Confluence d’Avignon). Est-ce à dire qu’ils devraient être généralisés ? Analyse.

Le premier argument en faveur : l’industrialisation du bâtiment

 

Qui dit démontable, dit, dans la très grande majorité des cas, des bâtiments produits en série et préassemblés en usine. A l’heure où les prix du foncier s’envolent, l’industrialisation du bâti devient un argument de poids pour réduire les coûts de construction. Le bâtiment démontable offre donc une logique économique intéressante. Il permet aussi de réduire le temps de construction et d’éviter certains aménagements routiers nécessaires à l’arrivée régulières de poids-lourds sur le chantier. Cela est appréciable en site occupé ou pour des chantiers se déroulant dans des zones urbaines densément peuplées.

Deuxième argument : la faible empreinte carbone

 

Difficile aujourd’hui de dire combien de bâtiments démontables le sont réellement avant la fin de leur durée de vie pour être remontés ailleurs. Reste que la possibilité de déplacer un équipement, mais aussi d’étudier en amont son recyclage ou le réemploi de sa structure est la meilleure façon de réduire son énergie grise. Faire appel à une structure préfabriquée est aussi synonyme de volume de déchet réduit sur site et d’apports réduits (ou optimisés sur un site unique) de matériaux de construction.

Troisième argument : RT2012 et bientôt RE2020 c’est possible

 

Si l’aspect extérieur des bâtiments démontables industriels renvoie à ce que l’on appel plus communément des hangars, il est tout à fait possible d’obtenir des performances énergétiques de premier plan. Au-delà, rien n’empêche de réduire encore l’empreinte carbone en faisant appel à des murs ou de l’isolation en matériaux biosourcés.

Pourquoi les domaines agricoles et industriels sont-ils en avance sur le résidentiel ?

 

Pour différentes raisons :

  • La nécessité de répondre à des contraintes de coût fortes
  • Le besoin de se plier à des besoins immédiats
  • Une diversité d’usage et l’obligation d’être polyvalent pour un changement ultérieur d’usage
  • Pour l’agriculture faiblement intensive : l’héritage d’une construction frugale dictée par de nouveaux besoins lors des débuts de la mécanisation dans des zones peu riches (nécessité nouvelle d’abriter des équipements)

Par ailleurs si, aujourd’hui, les bâtiments démontables peuvent être performants énergétiquement, cela n’a pas été nécessaire durant longtemps, ce qui a favorisé une innovation constante dans les méthodes de construction.

Enfin, les « hangars » sont des bâtiments « d’ingénieur » hérités de la révolution industriel. La recherche de l’efficacité de moyens a donc toujours primé dans leur conception et leur exploitation.

Quels sont les matériaux utilisés dans un bâtiment démontable ?

 

Le bois et le fer sont les matériaux historiques de ce type de bâtiments. Le fer si l’on se réfère à l’histoire récente. Le bois l’est si l’on s’intéresse à une plus large période durant laquelle les bâtiments représentaient des gisements de matériaux une fois partiellement détruits. Aujourd’hui, ces deux matériaux restent majoritaires dans l’industrie, le bois brut ayant néanmoins cédé sa place à des procédés plus modernes comme le lamellé-collé. La mode des préfabriqués des années 70 a également montré qu’il était possible de généraliser l’usage du béton, avec les problèmes de démontage et d’empreinte carbone que cela implique. Certaines pistes poursuivies par des démonstrateurs pour réduire l’énergie grise sont les bétons recyclés ou à base de chanvre notamment.

Existe-t-il des bâtiments résidentiels ou de loisirs démontables ?

 

Oui, comme nos deux exemples du début le démontre. Et encore oui si l’on parcourt les études de cas de Construction21. Ainsi le projet allemand NewtonProjekt haus 1, allie l’aspect démontable en fin de vie, à des appartements facilement transformables et une production photovoltaïque en façade. Un exemple qui réunit à peu près tout ce que le bon sens dicte aujourd’hui pour créer des bâtiments à faible empreinte carbone et impact sur l’environnement et l’aménagement (produire de l’électricité pour un bâtiment implique nécessairement de l’étalement urbain).

Il existe aussi des bâtiments bien plus ancien, tel que la maison Eiffel de Iquitos dans l’Amazonie péruvienne. Celle-ci, exposée en 1889 à l’exposition universelle de Paris a été achetée par un riche investisseur du caoutchouc et emmenée par bateau jusqu’à cette ville. Plus de 100 ans après, elle résiste encore au climat tropical de la région.

 

Pourquoi n’en existe-t-il pas plus de bâtiments démontables en résidentiel ?

Difficile à dire. Cependant, le secteur du bâtiment, qui opère sa mue depuis trop peu d’année, est aujourd’hui en mesure de faire converser des spécialistes de différents domaines pour concevoir de meilleures rénovations et constructions neuves. Il lui reste néanmoins à s’ouvrir sur ce qui se fait ailleurs. Un exemple parmi d’autre : les immeubles de grande hauteur en bois sont aujourd’hui une innovation en France. Ils font pourtant partie du paysage en Europe et en Amérique du Nord.

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