Qualité des sols dans les documents d'urbanisme : retour sur le webinaire consacré aux apports du projet MUSE pour les collectivités

566 Dernière modification le 29/07/2021 - 10:05
Qualité des sols dans les documents d'urbanisme : retour sur le webinaire consacré aux apports du projet MUSE pour les collectivités

Les partenaires du projet de recherche MUSE qui avait pour objectif d'intégrer les fonctions des sols dans les documents d'urbanisme, ont organisé le 2 juillet 2021 un webinaire qui a permis d'échanger sur les apports méthodologiques du projet dans la pratique.

Le 2 juillet 2021 a eu lieu le dernier atelier organisé par les partenaires du projet MUSE proposant une approche pour intégrer la multifonctionnalité des sols dans les documents d’urbanisme. Jusqu’à 65 personnes ont participé à l’atelier qui a réuni des représentants de collectivités et d’autres acteurs concernés par l’élaboration des PLU(i) et de SCoT. Des représentants des 3 métropoles partenaires du projet étaient également présents pour partager leur avis sur l’utilisation des cartes d’indicateurs de multifonctionnalité des sols, et plus largement sur l’approche adoptée dans le projet MUSE. Chaque participant a pu exprimer ses intérêts et points de vigilance par rapport à la méthode proposée. 

Dessin: MUSE une brique pour le ZAN

Crédit : Flore Vigneron 

En amont du webinaire, les participants ont été sondés sur leurs attentes vis-à-vis de l’atelier: Un besoin important de méthodologie pour mieux prendre en compte les fonctions des sols dans l’aménagement du territoire est identifié. Le lien entre l’approche développée dans le projet MUSE et la mise en œuvre de l’objectif Zéro Artificialisation Nette (ZAN) apparaît clairement. 

L’intérêt des participants pour comprendre quelle est la réplicabilité de la méthode à différentes échelles ainsi que son applicabilité à d’autres territoires ressort également.

Les participants étaient désireux de découvrir le retour d’expérience des 3 collectivités partenaires ayant pris connaissance des cartes issues de l’application de la méthode sur leur territoire. Enfin, des attentes ressortent sur les échéances de mise à disposition de la méthodologie. On perçoit ainsi un intérêt certain pour l’opérationnalité de la méthode proposée et ses perspectives d’applications concrètes sur le terrain. 

 

1ER TEMPS: RÉSULTATS DU QUESTIONNAIRE DE PRÉPARATION DU WEBINAIRE

réponses questionnaire utilisation MUSEUn questionnaire a été transmis en amont du webinaire. Parmi les 19 participants qui ont répondu, une majorité travaille au sein de collectivités. Ont notamment répondu 10 personnes travaillant dans un EPCI, la plupart au service de l’urbanisme. Le questionnaire met en évidence que même si beaucoup de collectivités commandent des données sur les "sols", peu s’en servent comme un véritable outil d’aide à la décision.

Or, l’approche MUSE a notamment pour objet d’aider les collectivités à la conscientisation des enjeux liés au sol. Elle propose des outils cartographiques facilement appropriables et modulables en fonction des enjeux du territoire. Il ressort ainsi un intérêt du projet MUSE pour mieux utiliser ou compléter les données sur les sols, dans le cadre de l’élaboration d’un PLU(i).

S’agissant de l’approche cartographiques proposée, la majorité des personnes interrogées comprennent l’intérêt d’utiliser des cartes caractérisant la multifonctionnalité des sols dans les documents de planification. Cependant, afin de se les approprier plus facilement, elles auraient besoin que ces cartes soient déclinées sous la forme de cartes d’enjeux.

Concernant les ressources à mobiliser pour prendre en compte la qualité des sols dans les documents d’urbanisme, la majorité des répondants considère que leur collectivité manque de temps et de moyens humains pour appliquer une approche telle que celle proposée dans le projet MUSE.

Seules 16% des collectivités disposeraient des moyens nécessaires pour traiter la question des sols au moment du démarrage du PLUi. Aucune ne disposerait des moyens suffisants pour traiter cette question en amont de son élaboration. Face à cette difficulté, l’intérêt de disposer des cartes issues de l’approche MUSE au début de la démarche d’élaboration du PLUi a été souligné. Pour de nombreuses collectivités, il serait crucial de mettre à disposition de telles cartes relatives aux sols sur une plateforme ouverte, afin de permettre leur prise en compte et de rendre beaucoup plus accessible les informations sur les sols utiles à l’élaboration des PLUi.

 

2 E TEMPS : APPORTS DE LA MÉTHODE MUSE POUR L'ÉLABORATION DES PLUI

Tableau des différents apports de la méthode

Philippe Branchu et Fabienne Marseille, co-pilotes du projet MUSE ont explicité la manière dont la caractérisation de la multifonctionnalité des sols pouvait être intégrée dans la démarche d’élaboration des PLU(i) ; ceci à toutes les étapes de l’élaboration du PLUi. Sont ainsi concernés le diagnostic territorial, les choix effectués dans le Projet d'aménagement et de développement durable (PADD) et le règlement, les Orientations d'Aménagement Prioritaire (AOP) ainsi que la séquence Eviter, Réduire, Compenser.

En permettant de caractériser les fonctions des sols dans l’état initial de l’environnement, la méthodologie MUSE permet d’alimenter le diagnostic territorial.

Les 4 fonctions des sols considérées sont les suivantes :

  • la régulation du cycle de l’eau,
  • la production de biomasse,
  • le réservoir de carbone
  • le réservoir de biodiversité.

Carte de la multifonctionnalité des sols à Nantes

Ces fonctions sont spatialisées grâce au calcul des 4 indicateurs correspondants : infiltrabilité, aptitude agronomique, stock de carbone organique, abondance et diversité lombriciennes. D’autres indicateurs sont également proposés pour répondre à des enjeux particuliers tels que la réserve utile ou le pouvoir épurateur des sols.

Les fonctions sont ensuite agrégées en une carte de multifonctionnalité des sols. Cette carte de multifonctionnalité ainsi que les 4 cartes de fonctions des sols sont directement intégrables au diagnostic territorial.

Ces éléments peuvent également être utilisés pour construire le projet de territoire. De manière globale, ils peuvent aider à :

  • identifier les zones de sols les plus multifonctionnels importantes à préserver,
  • localiser les zones où les sols présentent les fonctions les plus à même de répondre à un enjeu spécifique, tel l’infiltration de l’eau, par exemple.

Dessin expliquant le concept de pleine terre : images satellite pour mesurer l'imperméabilité et le % arboré

Crédit : Flore Vigneron

La méthode se base sur des données disponibles à l’échelle nationale pour le milieu rural et périurbain : les Référentiels Régionaux Pédologiques (1/250 000ème, certaines données plus fines étant disponibles localement). En raison de l’absence de données dans l’enveloppe urbaine, une approche spécifique à ce milieu est développée à partir de la capacité d’un sol à exercer tout ou partie des fonctions associées à un sol naturel. La capacité optimale peut être identifiée comme "Pleine Terre". Cette approche nécessite de définir précisément la notion de "Pleine Terre", déjà utilisée sous diverses formes dans les documents d’urbanisme.

Selon la définition apportée par le projet MUSE, la "Pleine Terre" est un sol urbain en capacité d’exercer tout ou partie des fonctions d’un sol naturel. L’hypothèse est faite que la profondeur du sol est généralement reliée à sa couverture (degré d’imperméabilisation et pourcentage de couvert arboré). Ces 2 paramètres sont des données satellitaires accessibles dans toute l’Europe.

La méthode MUSE fournit également des indicateurs de contexte tels que la pression démographique, la pression foncière, le vieillissement de la population…

 

Carte des typologies de territoires

 

L’approche MUSE offre enfin des éléments de cahier des charges pour acquérir des données complémentaires sur les sols afin d’obtenir une caractérisation plus fine en particulier dans les zones à enjeux nécessitant une meilleure résolution notamment dans les OAP.

Parmi les apports indirects du projet MUSE, il est remarqué que la méthode proposée apporte des connaissances sur la qualité des sols intégrant des indicateurs peu usuels (tel la biomasse du sol), qui devraient faciliter la sensibilisation des élus sur les enjeux liés à la "ressource sol". En cela, cette approche fournit les bases d’un véritable accompagnement des collectivités pour répondre à l’enjeu de la préservation des sols.

 

Le projet MUSE s’est construit dans un contexte particulier, celui de l’élaboration de l’objectif de Zéro Artificialisation Nette (ZAN) porté par le projet de loi "Climat et Résilience".  Le lien entre la méthode MUSE et l’objectif ZAN a fait l’objet d’un précédent séminaire : "L’objectif ZAN, un levier pour l’intégration de la qualité des sols dans les documents d’urbanisme : retour sur le webinaire du 29 janvier"

L’objectif ZAN, un levier pour l’intégration de la qualité des sols dans les documents d’urbanisme : retour sur le webinaire du 29 janvier

LE 12 FÉVRIER 2021

3E TEMPS: RETOURS D'EXPÉRIENCE DE 3 COLLECTIVITÉS PARTENAIRES 

La méthode MUSE s’est construite en intégrant les échanges avec 3 collectivités partenaires aux territoires et aux enjeux très contrastés. Des représentants de Nantes Métropole, Châteauroux Métropole et de la Métropole Aix-Marseille-Provence ont été invités à faire part de leur retour d’expérience concernant la façon dont ils se sont appropriés la méthode et les cartes élaborées sur leur territoire. 

 

Nantes Métropole :  MUSE, une vision intégrée des sols utiles à la mise en œuvre du ZAN et pour appuyer des opérations de désimperméabilisation

Plusieurs éléments ont été mis en avant :

  • Le PLUm (Plan Local d‘Urbanisme métropolitain) de Nantes Métropole est opposable depuis avril 2019 et comporte une OAP "Trame Verte et Bleue et paysage" qui témoigne de la préoccupation de la métropole pour son patrimoine naturel et du caractère structurant de ces trames, sur le territoire (cf. Projet Etoile verte),
  • Pour la collectivité, l’approche multicritères de MUSE permet une meilleure connaissance des sols du territoire sur les espaces agricoles et sur les espaces urbanisés. La méthode met en perspective la séquence Eviter-Réduire-Compenser de la démarche de planification du territoire.
  • La vision macroscopique des données sur les sols, offerte par l’approche MUSE, permet selon Nantes métropole d’identifier facilement des secteurs de sols à fort / faible potentiel, ce qui devrait ensuite faciliter la mise en œuvre de l’objectif ZAN.
  • D’après les premiers calculs, la carte de multifonctionnalité conforte ce qui est actuellement prescrit dans le PLUm dans les grandes masses. La métropole souligne le fait que le travail devra désormais porter sur une pondération des indicateurs en fonction des enjeux. Par exemple, les zones humides, dont le rôle est déterminant au sein de la métropole, sont bien repérables, mais parfois pas assez représentés. Un questionnement est émis concernant la pertinence de l’échelle de 1/250 000ème qui n’est pas appropriée pour travailler précisément à l’échelle de quartiers.
  • La métropole se propose de répliquer la méthode de cartographie de la qualité des sols en interne pour évaluer sa facilité de mise en œuvre. Ceci lui permettra de réaliser des cartes d’enjeux et d’utiliser la donnée pour prouver qu’un sol est potentiellement de qualité dans un projet d’aménagement. Cela permettra également de prioriser les opérations de désimperméabilisation/ renaturation.
  • Une intégration des résultats de MUSE est prévue en amont sur la construction du diagnostic territorial et du PADD lors d’une prochaine révision du PLUm.

Au-delà du retour effectué en direct par la collectivité lors du webinaire, un atelier plus approfondi a été mené le 9 juin 2021, qui a conduit à l’illustration suivante réalisée par Flore Vigneron, facilitatrice graphique:

Dessin avec les témoignages sur les apports du projet MUSE

 

Châteauroux métropole : l’approche MUSE comme élément pédagogique pour préserver les sols agricoles et balayer quelques idées reçues

Le retour d'expérience de Châteauroux Métropole, dont le PLUi est opposable depuis 2020, comprenait plusieurs points :

  • L’approche MUSE permet d’avoir une meilleure connaissance du territoire en balayant des idées reçues telles que le manque de biodiversité des zones de grandes cultures ou au contraire l’importante biomasse des sols forestiers. Le projet apporte aussi une dimension qualitative alors que jusqu’à présent la collectivité abordait la question des sols de manière quantitative, au travers de la consommation d’espace.
  • MUSE permet également de décloisonner les thématiques, notamment au travers de la carte de multifonctionnalité.
  • La métropole souligne un point de vigilance : la carte de multifonctionnalité seule risque d’être utilisée par les élus sans établir de liens entre les fonctions des sols et les enjeux spécifiques du territoire. Cela pourrait conduire à condamner certains sols dont les fonctions répondent bien à ces enjeux mais qui n’obtiennent pas un indice de multifonctionnalité élevé.
  • Il serait intéressant, du point de vue de la collectivité d’intégrer de telles cartes de multifonctionnalité dans le diagnostic du Schéma de Cohérence territoriale, soit à une échelle plus large et à un niveau encore plus stratégique que celui du PLUi ; Au-delà, ces cartes trouveraient leur place dans les porter-à-connaissance des services de l’État (...) Lire la suite

 

Actualité publiée sur Cerema actualité, Consulter la source

Partager :