Ensemble, défendons le service public de la rénovation énergétique !

Rédigé par

CLER La rédaction

Rédaction

631 Dernière modification le 12/09/2022 - 10:03
Ensemble, défendons le service public de la rénovation énergétique !

Demain débutent les rencontres nationales France Renov’, organisées par l’Anah et l’ADEME à Angers, qui réunissent chaque année l’ensemble des services locaux de conseil en rénovation énergétique de l’habitat. L’occasion de faire le point sur les difficultés de mise en œuvre de ce service public avec les acteurs concernés.

La parole à : Pierre Le Rouzic, coordinateur Pôle conseil particulier SPPEH chez ALOEN – Agence Locale de l’Energie et du Climat de Bretagne Sud

Il est urgent de remettre en cause le fonctionnement du paiement à l’acte. Ce fonctionnement a totalement transformé notre métier de conseiller rénovation énergétique. On nous demande de devenir de simples téléopérateurs – financés selon le nombre d’actes à réaliser. La qualité, pourtant indispensable dans le domaine de la rénovation énergétique, est sacrifiée. De fait, la démotivation gagne, avec un risque de démissions massives des conseillers rénovation énergétique.

Autre difficulté : l’absence de stabilité du système d’aides proposé aux ménages. Lors de la mise en place des dispositifs Ma Prime Rénov’ et le forfait de rénovation globale financé par les certificats d’économie d’énergie (CEE),  nous avons orienté de nombreux ménages vers la réalisation d’audits énergétiques. Or, depuis, les critères d’éligibilité aux CEE ne cessent de changer et la grande majorité des dossiers sont rejetés ! Une situation qui cristallise l’incompréhension et le mécontentement des ménages qui finissent par abandonner leur projet.

D’autres se découragent face à la complexité des dossiers à remplir. Pour bénéficier d’une assistance numérique, nous les dirigeons vers les maisons France Services, mais elles aussi se trouvent submergées. Les enjeux climatiques et de sobriété énergétique sont tels aujourd’hui, qu’il n’est plus possible de faire perdurer ce système.

Adeline Gimenez, coordinatrice de l’activité conseil auprès des particuliers au sein de l’Ageden

J’ai la chance de porter deux casquettes : celle de conseillère depuis plus de 10 ans, et de coordinatrice d’une équipe d’environ 20 conseillers. Au fil des ans, j’ai constaté une forte évolution du métier. L’activité est en constante augmentation avec beaucoup de mouvements de personnel. De fait, nous sommes perpétuellement en période de recrutement. Récemment, nous avons eu des départs liés à un ras-le-bol du métier. C’est une situation nouvelle à l’Ageden, car malgré les évolutions liées au SARE (service d’accompagnement pour la rénovation énergétique), nous veillons au maximum à diversifier les activités de conseiller rénovation énergétique. En cause : un salaire peu attractif, des déplacements très nombreux, mais surtout la lassitude liée au temps passé à la saisie informatiques des données et  la perte de sens du métier.

Le dispositif des aides financières est tellement complexe, que le temps est davantage consacré à l’explication et au décryptage de ces aides, et  moins à la dispense de conseils techniques, qui est pourtant la raison d’être des espaces conseils. Surtout, ces aides sont parfois en conflit avec nos préconisations techniques. Dans la plupart des cas, les particuliers peuvent obtenir des aides plus importantes pour changer leur système de chauffage que pour faire réaliser une isolation par l’extérieur.

Le système n’est pas fait pour encourager des rénovations globales et performantes – ce qui est antinomique avec notre fonction !  Beaucoup de conseillers se découragent. Personnellement, je suis inquiète car la rénovation énergétique ne va pas dans le bon sens, alors que les enjeux climatiques et énergétiques sont bien réels.

Pour y remédier, il faudrait mettre fin au paiement à l’acte, adopter une politique nationale pour éviter les démarchages des particuliers pour des travaux inefficaces, et enfin modifier en profondeur le système des aides – avec un système pérenne, plus simple, plus lisible et qui encourage réellement les rénovations performantes.

Agnès Langevine, vice-présidente Climat, Pacte vert et Habitat durable de la Région Occitanie

Avec 31 guichets Renov’Occitanie et 176 conseillers, la Région Occitanie, porteuse associée du dispositif SARE est très impliquée dans la mise en œuvre du service public de la rénovation énergétique de l’habitat. Nous sommes engagés financièrement à hauteur de 50 % dans le financement du dispositif, conscients que les crédits SARE demeurent insuffisants pour répondre aux enjeux de la rénovation énergétique. Et d’autant plus dans le contexte actuel de crise climatique et énergétique.

Aujourd’hui, notre défi collectif  est le changement d’échelle avec une accélération significative du rythme des rénovations, en particulier pour les foyers les plus modestes.  Pour s’y atteler, il faut que l’État stabilise le dispositif d’aides et donne de la visibilité aux guichets Renov’Occitanie, y compris sur les suites du programme SARE.

Nous demandons également que le statut du conseiller soit reconnu pour ses compétences à la fois techniques, juridiques et réglementaires, et revalorisé. La prime “surchauffe” délivrée l’an dernier par le Gouvernement suite à nos messages d’alerte a contribué à améliorer la situation des guichets Renov’Occitanie mais cette aide ponctuelle demeure insuffisante. Seule une vraie revalorisation du métier permettra de faire face aux tensions de recrutement.

Enfin, nous souhaitons que les Régions soient enfin confortées dans leur rôle de cheffe de file de la transition énergétique et associées aux réflexions sur l’avenir de ce service public dans un esprit de co-construction avec l’État. Elles doivent être reconnues comme coordinatrices et animatrices de ce service public  afin d’enclencher des dynamiques territoriales favorisant par exemple la mutualisation de moyens.

Sans ces changements majeurs, il ne sera pas possible d’accélérer.

 

Actualité publiée sur CLER - Actualités
Consulter la source

Partager :