Les MOOC, accélérateurs de la mutation du bâtiment durable

3170 Dernière modification le 16/11/2016 - 10:26
Les MOOC, accélérateurs de la mutation du bâtiment durable

L’ADEME et le Plan Bâtiment Durable ont lancé, le 15 novembre, une plateforme de formations en ligne, appelés MOOC, sur les sujets du bâtiment durable. Par ce nouveau mode d’apprentissage, il serait possible d’accélérer la montée en compétences des professionnels du secteur. Christina Nirup, Chef du service formation externe à l’ADEME et Jérôme Gatier, Directeur du Plan Bâtiment Durable reviennent en détails sur cette initiative inédite en France pour le monde professionnel.

D’où est venue l’idée d’utiliser les MOOC pour la formation des professionnels du bâtiment ?

Jérôme Gatier : Dans le cadre des réflexions du Plan Bâtiment Durable en 2014, nous nous sommes réinterrogés sur la dynamisation de la rénovation énergétique. Comment accompagner les petites entreprises dans le mouvement de la transition énergétique, compte tenu des difficultés d’accès aux informations et aux compétences ? Nous avons confié à Sabine Basili, Vice-Présidente de la CAPEB, et à Ingrid Nappi-Choulet, Professeur à l’ESSEC, une mission sur ce thème, qui comportait un volet formation. Ingrid Nappi-Choulet nous a fait découvrir ce nouveau mode d’apprentissage venu des Etats-Unis, les MOOC. L’idée nous a plu tout en nous interrogeant sur les modes d’application. Mais ce qui nous a le plus surpris, c’est que des acteurs du secteur étaient déjà en train d’expérimenter sur les MOOC.

Christina Nirup : L’idée remonte à 2014. L’ADEME avait commencé à identifier les MOOC comme un vecteur potentiel pour la formation. C’était un sujet émergent pour nous et son intérêt nous a été confirmé quand nous avons appris que le réseau CLER souhaitait lancer un projet de formation en ligne avec le Plan Bâtiment Durable.

Christina Nirup, Chef du service
formation externe à l’ADEME
Jérôme Gatier, Directeur du
Plan Bâtiment Durable

 

De là, l’ADEME et le Plan Bâtiment Durable ont donc commencé à travailler ensemble sur les MOOC ?

C.N. : Tout à fait. Le Plan Bâtiment Durable nous a contactés pour créer des MOOC sur la thématique du Bâtiment Durable. Nous avons apporté l’expertise de l’ADEME en formation et nous avons lancé un projet collaboratif pour étudier la faisabilité d’une plateforme qui pouvait héberger des MOOC, avec un consultant spécialisé, François Duport, qui a d’ailleurs utilisé les communautés Construction21 pour travailler à ce projet. Nous avons évidemment aussi réfléchi aux conditions de création de ces MOOC.

J.G. : L’ADEME a été présente à tous les stades du projet. Il a fallu creuser pour mieux comprendre ce que sont les MOOC. Nous avons été aidés par des « inconditionnels » de ce mode d’apprentissage qui se marie bien avec notre époque de média sociaux et de réseaux d’apprenants. Nous avons aussi discuté avec le Ministère de l’Enseignement Supérieur. Au fur et à mesure, nous avons posé les différentes briques qui nous permettent d’intégrer les MOOC au secteur du bâtiment et de la construction.

C.N. : Pour unir tous les acteurs impliqués dans cette réflexion (fédérations, ministères, ONG, organisations professionnelles, associations, organismes de formation) et faire émerger les sujets des MOOC Bâtiment Durable, nous avons organisé un « MOOC Camp ». Il nous a également permis d’établir un plan d’action dès l’automne 2015.

J.G. : Lors de ce « camp », les projets de MOOC ont été soumis à des « sachants » ce qui a permis de dégrossir 5 projets différents.

Sous quelle forme vont se manifester ces MOOC ?

C.N. : Pour commencer, nous allons lancer deux MOOC sur la rénovation énergétique qui commenceront le 17 janvier. Nous avons d’autres sujets à l’étude : le bâtiment d’outremer, les logements sociaux, la gestion des chaufferies, les matériaux biosourcés. Quant à leur forme, par définition, les MOOC sont des cours en ligne. Ils passent donc par internet, au travers de vidéos, des quiz et des échanges en ligne entre « MOOCeurs ». Nous nous sommes associés à FUN – France Université Numérique – pour développer une plateforme en marque blanche, dédiée au secteur bâtiment/construction. C’est une première, aucun autre secteur professionnel n’a fait cela. D’ailleurs l’ADEME a rejoint le GIP (Groupement d’Intérêt Public) de France Université Numérique. La plateforme sera ouverte le 15 novembre pour le début des inscriptions, des MOOC rénovation qui débuteront à la mi-janvier. Les premiers MOOC ont été co-financés par le programme PACTE .

J.G. : Cette nouvelle forme d’apprentissage a de nombreux avantages : une meilleure présentation pédagogique, la flexibilité des horaires, le caractère massif, l’absence de pré-requis à l’inscription et la constitution d’une communauté d’apprenants permettant l’entraide. Le professionnel choisit où et quand il veut se former et à quel rythme. D’ailleurs ces MOOC ne s’adressent pas uniquement aux professionnels, même s’ils en sont la cible principale. Le particulier peut lui aussi suivre un MOOC sur la rénovation pour anticiper ses propres travaux ou par simple curiosité. Nous voulons également que nos MOOC se parlent entre eux, qu’une communauté se crée entre les apprenants et les sachants, d’un sujet à l’autre. C’est d’ailleurs tout l’intérêt de la participation de Construction21 aux MOOC Bâtiment Durable. Les communautés en ligne de la plateforme vont pouvoir faciliter ces échanges.

Les formations bâtiment impliquent également des volets pratiques. Comment le MOOC s’articule-t-il avec la formation au geste ?

C.N. : La formation au geste reste essentielle. Le MOOC n’a pas vocation à la remplacer. En revanche, il facilite l’accès au volet théorique de la formation. L’artisan, une fois cette étape validée, peut par exemple s’inscrire à une session de formation au geste sur des plateaux techniques. C’est une question qui s’est posée pour les formations Praxibat®, qui gardent toute leur pertinence.  Peut-être, un jour les technologies de la réalité virtuelle et de la réalité augmentée permettront des formations au geste plus digitale.

Quelle est votre vision du MOOC dans le bâtiment pour les 5 prochaines années ?

J.G. : Nous n’en sommes encore qu’au début. Les MOOC ont vocation à évoluer à partir de cette forme première. On peut imaginer des petits MOOC chapeau qui invitent les apprenants à creuser. Avec ces premiers MOOC, nous allons suivre attentivement les retours des usagers pour nous adapter à la demande. Nous avons aussi mis en place un processus qualité pour cultiver l’intérêt pour ces formations. Côté modèle économique, aujourd’hui nos MOOC fonctionnent grâce à des fonds publics. Peut-être pourra-t-on envisager d’autres modèles venus du secteur de la formation privée, d’autant qu’on peut espérer une baisse des coûts avec la diffusion de ce mode de formation.

 C.N. : A terme, j’imagine 40 MOOC français assortis d’un volet de MOOC internationaux pour que nos professionnels s’inspirent aussi de ce qui se fait ailleurs. Nous pourrions aussi co-construire des MOOC avec d’autres pays. Je pense surtout que d’ici 5 ans, le MOOC sera largement reconnu comme moyen d’apprentissage et standardisé ; d’abord par l’action d’organismes comme FUN, mais aussi par l’information des professionnels. Nous avons l’intention de communiquer efficacement auprès du secteur, avec les fédérations professionnels et plus particulièrement via Construction21. Enfin, les organismes de formation se seront pleinement emparés de cet outil et sauront s’en servir comme vitrine de leur activité.

Communauté Construction Bois
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