Energie Carbone: "Il faut parier sur la matière grise"

Rédigé par

Philippe NUNES

DG

1637 Dernière modification le 10/04/2017 - 08:19
Energie Carbone:

J’ose ici avancer quelques généralités en enfonçant tout d’abord une porte ouverte : un bâtiment n’a pas pour vocation première d’être neutre en énergie ou en carbone.

Sinon, le bâtiment idéal serait celui qu’on évite de construire. Et si c’est quand même le cas, que ce bâtiment reste inoccupé !

Après cette porte et cette boutade, deux questionnements s’imposent a minima :

  • Nous construisons et réhabilitons des bâtiments, d’abord pour satisfaire durablement la demande des occupants. Premier sujet de réflexion : cette demande correspond-t-elle aux besoins souvent imaginés et imposés par l’offre (industriels, décideurs et concepteurs) ?
  • Nous construisons des « objets » pour plusieurs décennies. Le bâtiment n’est pas un objet de consommation industriel classique. Il perdure et ses impacts doivent être mesurés à moyen et long termes. Deuxième sujet de réflexion : peut-on continuer à construire avec une perspective bornée à la garantie décennale ? Peut-on continuer à construire en se contentant d’une addition conventionnelle de solutions techniques ou de recettes architecturales ?

Ces deux questions ainsi posées incitent à répondre deux fois « non ». Ce n’est pas la formulation qui engendre ces négations, mais leurs contenus.

Il faut faire du « E+C- » évidemment. C’est le sens de l’Histoire. Et la démarche tend à vouloir répondre au moins à la question du long terme à travers l’énergie grise et les ACV. Mais nous sommes encore loin du compte alors que le futur s’accélère…. Il devient urgent que les acteurs programment, conçoivent, construisent des bâtiments réellement et durablement confortables et gérables. L’envisager et passer à l’acte suppose de traiter de manière concomitante des sujets complexes et interagissant. Il faut, en vrac et pour faire court : remettre l’occupant au centre du concept, ne pas se précipiter sur les offres soi-disant modernes et oser endosser l’image du ringard dubitatif, évitant ainsi de transformer l’occupant, soit en consommateur du « tout connecté », soit à l’opposé, en militant écologiste contrarié, mettre en œuvre des systèmes de suivi des consommations et du bien-être en intégrant vraiment le projet dans les processus de remontées de terrain collectives, concevoir le bâtiment dans sa dimension urbaine et sociale (mobilité, modularité, mutualisation) et dans le temps (comportement du bâtiment et changement climatique), …

Nous avons déjà les produits, les outils, les méthodes pour y parvenir. Reste le temps… En particulier, il devient urgent de laisser du temps aux concepteurs pour maîtriser toutes ces questions dans leurs projets. Il faut parier sur la matière grise, moyen le plus efficace pour atteindre les objectifs dans des conditions technico-économiques acceptables.

Bernard SESOLIS
Consultant Energie - Environnement,

Docteur en géophysique spatiale / environnement, Bernard Sesolis a une longue expérience en secteurs publics (Ministère de l’Equipement) comme privés (fondateur et directeur des bureaux d’études Tribu puis Tribu-Energie). Auteur de nombreux ouvrages, il est également investi dans plusieurs associations (AICVF, Effinergie, ICEB…)

Extrait du Manifeste EnerJmeeting 2017

Télécharger le manifeste EnerJmeeting 2017

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