Repenser le stationnement dans les centres-bourgs peut être l’opportunité d’améliorer la valeur d’usage des espaces publics clés pour leur attractivité : principaux enseignements issus des études PVD du Cerema dans le Var

465 Dernière modification le 23/01/2024 - 10:05
Repenser le stationnement dans les centres-bourgs peut être l’opportunité d’améliorer la valeur d’usage des espaces publics clés pour leur attractivité : principaux enseignements issus des études PVD du Cerema dans le Var

Le Stationnement joue un rôle majeur dans la revitalisation des centres-bourgs : accès aux commerces et services du quotidien, stationnement des résidents, des livraisons, etc. L'enjeu de la revitalisation des centre-bourgs est notamment de remettre la voiture « à sa juste place », en rééquilibrant l’occupation de la voirie et des espaces publics entre le stationnement, la circulation et les espaces piétons ou végétalisés.

Un contexte en territoire peu dense

Le programme national Petites Villes de Demain (PVD), piloté par l’ANCT, s’adresse à des communes rurales de moins de 20 000 habitants exerçant un rôle de centralité en raison de leur offre de services essentiels de proximité1. Ces territoires connaissent toutefois des fragilités socio-démographiques, l’habitat se dégrade, l’offre commerciale décline, dévitalisant peu à peu les centres-bourgs, d'où la nécessité de les rendre plus attractifs.

Dans les communes PVD étudiées en région PACA2, les déplacements domicile-travail intra-communaux sont largement majoritaires, avec des distances parcourues souvent compatibles avec la pratique du vélo ou de la marche. Mais la voiture reste le mode quasi exclusif, quels que soient les motifs de déplacement. Même si la part des déplacements à pied est sensiblement supérieure aux moyennes départementales (part plus importante des séniors ou des jeunes sans permis automobile), les modes actifs représentent un potentiel à mieux exploiter, à condition que le centre et ses voiries deviennent plus accueillants.

Des constantes observées contribuant au manque d'attractivité des centres bourgs

Beaucoup de places et parvis provençaux ne sont pas suffisamment mis en valeur ou n’assurent pas leur fonction urbaine, en raison du stationnement omniprésent. Au-delà de son impact visuel négatif, ce dernier constitue une barrière physique pour les modes actifs (piétons, PMR, vélo…) en matière d’accessibilité comme de sécurité, mais aussi une barrière sociale en limitant les interactions entre usagers. La suroccupation du sol par le stationnement accentue également l’imperméabilisation et la surchauffe urbaine, notamment l'été. En outre, les visiteurs de passage ont souvent du mal à comprendre où stationner aux abords du centre : parkings non signalés ou au statut flou, jalonnements directionnels peu visibles, absence de cheminements piétons qualitatifs. Cela peut générer des circuits de recherche de places inutiles au coeur même du centre, voire décourager les touristes de s’arrêter. Alors que commerçants et usagers pointent des difficultés pour stationner, les analyses montrent une offre plus importante que la demande, un temps de recherche de place déclaré de moins de 5 minutes. Par ailleurs, les isochrones de temps de marche indiquent une majorité de commerces situés à moins de 5 minutes à pied d’un parking capacitaire. Enfin, si la plupart des commerçants identifient le stationnement comme levier principal pour inciter les clients à venir en centre-ville, c’est plutôt la qualité des espaces publics qui est plébiscitée par les clients (végétalisation notamment) (3).


Développer une approche intégratrice et plus qualitative

Il ne s'agit pas de créer des places supplémentaires, mais d’optimiser l’organisation de l’offre pour répondre aux différents besoins, et éviter les conflits d’usages en proposant des espaces publics plus apaisés, inclusifs et continus au sein d’un parcours de déambulation.

L'éloignement du stationnement en lien avec les profils d'usagers 

Le stationnement situé à proximité des commerces d’achat de courte durée (moins de 10 minutes4) doit s’adresser en priorité aux clients ; les temps de stationnement et d'accès sont à mettre en adéquation avec le temps d’achat5.

Des zones rotatives en journée permettent de proposer une offre gratuite non occupée par des véhicules ventouses, qu’il convient de contrôler pour en assurer l’efficacité. Pour les résidents, du stationnement sécurisé longue durée, intégrant des bornes de recharge pour véhicule électrique, peut être proposé en limite du centre. Les visiteurs, qui ont plus de temps, peuvent être orientés vers des parkings périphériques, à rendre lisibles par du jalonnement (parkings nommés, nombre de places indiqué), confortables par la qualité des cheminements piétons.


 

Témoignage : Cathy Venturino-Gabelle, Maire de Barjols (83), 3017 habitants, ville lauréate PVD

« En tant que territoire rural avec une offre de transport restreinte et où il est difficile de se passer de la voiture, le stationnement est au cœur de notre projet de revitalisation. Le principal enjeu est d’apaiser notre centre-ville tout en garantissant son accessibilité. Notre stratégie consiste à le rendre aux piétons en retravaillant les espaces de stationnement. Cela passe par la valorisation des parkings périphériques à moins de 15 minutes à pied du centre, actuellement peu utilisés : une dizaine de parkings avec une capacité d’accueil de 500 places. Nous tâchons dès à présent à réduire l’emprise de la voiture dans le centre-ville, notamment sur le parking central de la Rouguière, afin de redonner de la place à l’espace public : passage de 180 à 140 places après avoir créé du stationnement en périphérie. Nous sommes convaincus que ce point est essentiel pour la dynamisation de Barjols et l’amélioration du cadre de vie des habitants. »

Des aménagements plus flexibles

Les besoins de la ville, en stationnement comme en espaces publics, fluctuent dans le temps. Les évènements saisonniers, hebdomadaires ou ponctuels, sont inspirants pour attribuer de nouvelles fonctions à l’espace public, faire évoluer favorablement l’opinion. Concevoir un plan de circulation et de stationnement « flexible » permet d’expérimenter des réaménagements éphémères, avant d’envisager un projet plus pérenne. La suppression du stationnement doit néanmoins créer impérativement de nouveaux usages (espaces de loisir, lieux de rencontre, de détente, etc.), en associant les citoyens aux réflexions. Enfin, l'attractivité du cadre de vie et la rési-lience des espaces urbains passent par l'apaisement des voiries, la nature en ville et le confort thermique avec la nécessité de gérer à la source les eaux pluviales, d'intégrer l'écoconception dans les aménagements…

Notes :

1- Mohamed Hilal, David Moret, Virginie Piguet, Hélène Bouscasse, Jean Cavailhes, et al..

Centralités : comment les identifier et quels rôles dans les dynamiques

locales et intercommunales ? Un volume principal, et trois volumes annexes. [reportType_] ANCT. 2020. hal-03064655.

2- L’article se base sur les communes étudiées dans le cadre du programme PVD : Aups (83), Aureille (13), Barjols (83), Cogolin (83), Le Beausset (83), Les Arcs-sur-Argens (83), Salernes (83), Sault (84).

3- Le stationnement : Éléments clefs d’une politique globale à l’échelle du Grand Avignon, AURAV, 2022.

4- Comme les boucheries, boulangeries, pharmacies, tabacs, presses, fleuristes, banques.

5- L’analyse de l’attractivité du centre-ville des Arcs-sur-Argens (83), Lestoux & Associés, 2020.

Auteurs :

Marlène Long, Responsable d’études aménagement durable et espaces publics, Cerema Direction Territoriale Méditerranée

 Sylvain Michelon, Chef du Groupe Aménagements Urbains, Cerema Direction Territoriale Méditerranée

Article publié dans la revue TEC Mobilité intelligente : le n° 259 de novembre 2023 

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