Rassurer les assureurs, une chance pour le photovoltaïque

Rédigé par

David Laurand

Avocat Associé - Cofondateur de CINETIC AVOCATS - Membre du Réseau Saxe Law

3100 Dernière modification le 26/06/2023 - 00:00
Rassurer les assureurs, une chance pour le photovoltaïque


« Le recours croissant au photovoltaïque étant inévitable, les assureurs n’ont d’autres choix que de s’adapter et d’accompagner les constructeurs dans cette transition énergétique. » - Tribune de David Laurand, avocat associé – CINETIC Avocats

Le photovoltaïque a de nouveau le « vent en poupe ». Il apporte une réponse à la préoccupation croissante des utilisateurs de s’inscrire dans une transition écologique et environnementale. 

Il permet également de rassurer face aux récentes fluctuation des prix (liées notamment à la guerre en Ukraine), en poussant les consommateurs à faire preuve de sobriété énergétique en produisant leur propre énergie. 

À cela s’ajoute un contexte normatif particulièrement favorable en raison de la nouvelle réglementation RT 2020 applicable à tous les permis de construire déposés après le 1er janvier 2022. Cette réglementation vient fixer un seuil maximal annuel de consommation d’énergie fossile entrainant, de facto, l’abandon du chauffage au fioul ou au gaz au profit des énergies renouvelables. 

Sans créer une véritable obligation d’installation de panneaux solaires, le gouvernement a trouvé un moyen indirect de contraindre les constructeurs à passer aux énergies renouvelables. 

À la fin du premier trimestre de l’année 2023, la France comptait ainsi 666 587 installations photovoltaïques. Ces panneaux photovoltaïques permettent de produire 38,05 % de l’énergie renouvelable française. 

L’essor du marché du photovoltaïque, rendu nécessaire par les enjeux écologiques et la contrainte réglementaire, ne réalise pas sans difficultés. 

Outre le fait que la filière française ait abandonné la fabrication locale au profit de pays comme la Chine, obligeant ainsi les acteurs professionnels à commander les produits à l’étranger, le secteur se heurte également à la défiance des assureurs de sorte que les professionnels éprouvent les plus grandes difficultés à obtenir les assurances nécessaires (dommages ouvrage, responsabilité décennale du constructeur, responsabilité civile de droit commun). Dans tous les cas, les primes demeurent élevés pour ceux parvenant à s’assurer.  
Ces difficultés assurantielles ont essentiellement deux raisons : d’une part, en raison de la forte sinistralité dans les années 2000, liée à l’apparition d’installateurs de panneaux solaires peu scrupuleux. D’autre part, en raison de l’effondrement récent des prix des produits photovoltaïques sur les marchés internationaux, ayant pour conséquence un maintien élevé des primes d’assurance.

La sinistralité passée du secteur photovoltaïque 
À la fin des années 2000, le secteur des panneaux photovoltaïques a connu un essor inédit. Boosté par des aides fiscales incitatives au bénéfices des particuliers, des installateurs de panneaux photovoltaïques sont arrivés en masse sur le marché pour faire face à une demande croissante.

Surfant sur la vague, les assureurs ont suivi le mouvement en accompagnant leurs clients et en adaptant leurs garanties.  
Ces installateurs de panneaux photovoltaïques, souvent dépourvus de compétences techniques, et n’offrant pas le professionnalisme attendu, ont été responsables de la sinistralité importante dans le secteur. 

La multiplication des sinistres a conduit les assureurs à être plus réticent sur la prise en charge des panneaux photovoltaïques. 

Les rares assureurs qui ont accepté par la suite de garantir l’installation de panneaux solaires ont donc mis en place une politique assurantielle sévère, et peu avantageuse pour les souscripteurs. Les compagnies d’assurance ont en effet augmenté leurs taux de cotisation, et ont relevé leurs primes planchers, rendant la souscription d’une assurance particulièrement onéreuse. 
Chez l’assureur AXA par exemple, les primes ont quasiment doublé entre 2014 et 2016. 

Vers une diminution de la sinistralité 
Le premier signe d’amélioration a été la disparition des installateurs opportunistes et peu scrupuleux, lesquels se sont raréfiés en même temps que les aides fiscales se sont taries. 
Au milieu des années 2010, le nombre d’installateurs de panneaux photovoltaïques a en effet été divisé par deux entrainant corollairement une baisse de la sinistralité en matière d’assurance construction dans le secteur photovoltaïque (sinistres divisés par sept depuis 2010). 

La forte baisse de la sinistralité trouve également son origine dans la mutation opérée par la filière qui s’est alors orientée vers plus de professionnalisme en encadrant le savoir-faire des intervenants et la qualité des produits par la mise en place de qualification des installateurs et de certification des produits mis en œuvre (comme CERTISOLIS pour les matériaux et QUALIPV pour la pose). 

La frilosité persistance des assureurs 
Cette diminution des sinistres n’a cependant pas permis de rassurer les compagnies d’assurances.
Il est en effet fréquent que les installateurs certifiés recourent à des sous-traitants (courant dans le secteur de la construction) pour procéder à l’installation des panneaux solaires, ce procédé ne permettant pas d’offrir aux assureurs les garanties nécessaires à la bonne réalisation des travaux et à une installation adéquate des produits. 

L’absence d’obligation de maintenance des installations photovoltaïques n’incite pas également les assureurs à garantir les travaux d’installations. Par ailleurs, si la sinistralité a fortement chuté, il en est de même de l’assiette des cotisations, qui permet de fixer les primes d’assurance, et qui a été divisée par 13 depuis 2010.

L’effondrement des prix des produits photovoltaïques sur les marchés internationaux a en effet pour conséquence une diminution de l’assiette des cotisations, de sorte que les primes d’assurance restent, à ce jour encore, élevées, malgré la diminution du risque. 

Les perspectives 
Le recours croissant au photovoltaïque étant inévitable, les assureurs n’ont d’autres choix que de s’adapter et d’accompagner les constructeurs dans cette transition énergétique. 
L’éligibilité à une assurance et la baisse des prix d’assurance passent inexorablement par la mise en avant d’une compétence avérée des professionnels et par la maîtrise des coûts des matériaux, d’où l’importance pour la filière française de se réapproprier la chaîne de production. 

Certains assureurs ont récemment fait le choix de se lancer de nouveau sur le marché du photovoltaïque en acceptant d’assurer à un coût raisonnable les professionnels déjà installés dans le milieu du BTP et qui souhaitent orienter leur activité vers l’installation de panneaux solaires. 

L’assurance personnalisée ouverte à ces professionnels est une preuve que les assureurs souhaitent réinvestir le secteur du photovoltaïque, conscients de la nécessité d’accompagner les installateurs dans la transition énergétique actuelle. 


David Laurand exerce dans les domaines du droit commercial et droit de la construction au sein du cabinet CINETIC Avocats, partenaire de confiance des entreprises, des femmes et hommes de la Construction et des Assurances. CINETIC Avocats intervient dans les secteurs de l’industrie, du tertiaire et du bâtiment autour de 3 pôles d’expertises : Affaires, Immobilier et Numérique en s’appuyant sur son réseau d’experts SAXE LAW. 

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