"Ne sacrifions pas la rénovation énergétique pour des économies budgétaires"

Rédigé par

Frédéric Lafage

504 Dernière modification le 20/03/2024 - 10:57

Tribune de Frédéric Lafage, président de la fédération CINOV.

Depuis le 12 février, les annonces du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, sont loin de susciter l'enthousiasme attendu au sein des 92 000 entreprises représentées par Cinov. Au contraire, elles semblent compromettre l'ambition initiale de la réforme MaPrimeRénov', destinée à libérer des milliers de logements de leur statut de passoires énergétiques et à promouvoir des rénovations globales et ambitieuses.

Les annonces ministérielles récentes ont été faites sans consultation préalable des experts, notamment des bureaux d'études membres de la Fédération Cinov qui pilotent les rénovations énergétiques, contrairement à la démarche suivie pour la SNBC du Bâtiment et la réforme de MaPrimeRenov', qui ont bénéficié d'un large débat impliquant toutes les parties prenantes.

Elles suggèrent une réduction de l'obligation de recourir à un "MonAccompagnateurRénov'" uniquement pour les subventions les plus élevées, excluant ainsi les ménages modestes. Cette décision est accueillie avec inquiétude par les professionnels, notamment les bureaux d'études d'ingénierie qui ont investi temps et argent pour se conformer aux exigences prévues pour le 1er janvier 2024.

Ce revirement a un impact économique direct sur de nombreux bureaux d'études présents dans les territoires, principalement des TPE-PME, et entrave également la capacité des ménages à entreprendre des rénovations énergétiques efficaces. En levant les restrictions de financement sur les mono-gestes de rénovation, ces annonces risquent de concurrencer les rénovations multigestes, pourtant plus efficaces du point de vue de la performance énergétique.

La proposition de modifier la méthode de calcul du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) pour les logements de moins de 40 m² classés F, G ou E soulève également des préoccupations. Cette approche risque de réduire artificiellement le nombre de passoires thermiques, sans réellement résoudre le problème de la précarité énergétique.

Nous exhortons le gouvernement à réaffirmer son engagement en faveur de rénovations énergétiques ambitieuses.

De plus, la volonté du ministre de modifier le coefficient d'énergie primaire sur le gaz et l'électricité pourrait fausser la perception du statut énergétique des logements, sans réelle amélioration de leur efficacité.

Il est crucial de rappeler que ces décisions surviennent dans un contexte où le budget de MaPrimeRénov' est réduit, malgré les 12 millions de Français en situation de précarité énergétique. Le secteur du bâtiment représentant, par ailleurs, une part significative des émissions de gaz à effet de serre, il est impératif de maintenir une vision ambitieuse et de ne pas sacrifier l'avenir pour des économies budgétaires à court terme.

En conclusion, nous demandons instamment l'extension immédiate du Comité de suivi afin d'éviter des décisions prises de manière isolée et déconnectées des réalités et nous exhortons le gouvernement à reconsidérer ces annonces et à réaffirmer son engagement en faveur de rénovations énergétiques ambitieuses, indispensables pour atteindre nos objectifs nationaux en matière d'efficacité énergétique et de lutte contre le changement climatique.

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