La terre crue : de la caractérisation à l’application

Rédigé par

Magali HOULLIER

Responsable communication

2453 Dernière modification le 11/07/2023 - 00:00
La terre crue : de la caractérisation à l’application


Pour réduire l’empreinte carbone des bâtiments, les professionnels du bâtiment et de la construction sont de plus en plus conscients de l’importance d’utiliser des matériaux bio et géo-sourcés, bas carbone et locaux.

La terre crue : définition et caractéristiques

La terre crue, mélange d’argile (liant), limon, sable, graviers et cailloux, est un matériau de construction qui permet de limiter l’impact environnemental des bâtiments. Il s’agit d’un matériau largement disponible et qui nécessite peu de transformation. L’utilisation de la terre crue ne nécessite pas d’opération de cuisson au contraire de la terre cuite, du ciment ou encore de la chaux. Plusieurs techniques constructives peuvent être employées pour réaliser des ouvrages porteurs (pisé, bauge, brique de terre comprimée BTC, …) ou non porteurs (terre allégée, enduit, torchis, …).

Les caractéristiques du matériau terre crue dépendent de la nature et de la teneur de ses différents constituants. Les propriétés du matériau dépendent donc de son lieu d’extraction. Toutes les terres ne sont pas adaptées pour un usage en construction. Aujourd’hui les terres exploitées proviennent principalement de carrières (terre de carrière, terre de découverte) qui constituent des gisements conséquents de terres aux propriétés homogènes. Ces terres font donc l’objet d’une caractérisation fine qui permet de justifier de son aptitude à un usage en construction.

Les terres excavées constituent également un gisement de terre crue pour la construction, sous réserve que la matière fasse l’objet d’une caractérisation validant sa convenance pour cet usage. À ce jour la réalisation d’ouvrages en terre crue à partir de terre excavée nécessite la mise en place d’une organisation complexe (stockage de la terre, préparation, mise en œuvre) gérée chantier par chantier. L’utilisation des terres d’excavation pour la réalisation d’ouvrages en terre crue permet de réduire la quantité de déchets à évacuer tout en limitant l’empreinte environnementale des bâtiments par l’utilisation de ce matériau bas-carbone et l’économie de ressources (substitution). Le développement de cette pratique nécessite la création d’une filière de valorisation dédiée disposant des outils scientifiques, techniques et logistiques appropriés.

Comprendre la composition des sols pour construire en terre crue

La construction en terre crue utilise une terre composée de graviers, sable, limon et argile qui se situe généralement à 20 ou 30 cm de la surface, sous la couche de terre végétale – cette dernière, riche en matière organique, est inutilisable.

Lors des travaux d’excavation, la séparation des deux couches de terre (végétale et minérale) est un élément clé, afin de pouvoir utiliser ces deux couches de manière optimale. La terre végétale est précieuse aux paysagistes et agriculteurs ; tandis que la terre minérale peut être valorisée en aménagement et construction terre crue.

En complémentarité d’une caractérisation de la terre il est intéressant de procéder à la réalisation d’échantillons (prototypes) et de caractériser leur performance.

Les avantages de la construction en terre crue

Depuis des milliers d’années, la terre crue a été utilisée dans la plupart des régions du monde, notamment en Afrique, en Amérique latine et en Asie. En France, la terre crue a perduré jusque dans les années 1950 pour la construction de bâtiments, mais elle a depuis été remplacée par des matériaux plus industrialisés, comme la brique cuite ou le béton armé.

Cependant, les avantages des techniques de construction utilisant la terre crue sont nombreux en plus de l’aspect écologique :

  • Cela régule l’humidité intérieure : les ouvrages en terre crue ont la capacité d’absorber et de restituer l’eau contenue dans l’air intérieur. La terre crue possède en effet un pouvoir absorbant qui lui permet de s’imprégner de la vapeur d’eau jusqu’à ce qu’un équilibre hygroscopique s’établisse entre le matériau et l’air (Source Les Cahiers Techniques du Bâtiment).
  • Cela apporte de l’inertie thermique grâce à la masse de terre : ce qui participe au confort et à la réduction des consommations dans les bâtiments à faible inertie, tels qu’en construction bois.
  • C’est esthétique : les enduits en terre crue ont une texture et une couleur naturelles et chaleureuses qui peuvent apporter une touche d’authenticité et de caractère à un espace (exemple : la construction en pisé).
  • C’est durable : les enduits en terre crue sont durables et résistants aux chocs et à l’usure, ce qui en fait un choix intéressant pour des projets de construction ou de rénovation à long terme. De plus, en cas de détérioration les enduits peuvent être repris simplement à l’eau.
  • Cela résiste aux incendies : les enduits terre sont reconnus, notamment dans les Règles professionnelles de construction paille, comme une barrière efficace au feu.


Actuellement, les filières émergentes de la terre crue en France se concentrent sur :

  • Le pisé
  • Les enduits
  • La terre coulée
  • La terre allégée
  • Les panneaux extrudés ou comprimés
  • La fabrication de briques de terre comprimée (BTC) et les adobes.


Les BTC sont fabriqués en compressant de la terre dans des moules. Elles peuvent être stabilisées par une faible proportion de chaux ou de ciment (BTCS). Les BTC peuvent être utilisées pour construire des murs porteurs, des cloisons et aménagements intérieurs du type poêle de masse. La terre allégée est coulée ou projetée au sein d’une ossature bois porteuse. La terre crue est également utilisée dans la fabrication d’enduits isolants.

Face à la demande croissante en matériaux biosourcés et au développement de nouveaux produits issus de la R&D, il est aujourd’hui crucial de définir des normes pour la construction en terre crue.

En effet, la réalisation d’ouvrages en terre crue n’est cadrée par aucun NF DTU, Règle Professionnelle (sauf enduit terre crue sur support en terre crue ou support paille), ou Recommandation Professionnelle RAGE. Seuls des Guides de bonnes pratiques traitant des principales techniques de construction terre crue sont disponibles à l’échelle collective. Ces techniques constructives dites « non courantes » restent encore peu acceptées sur les chantiers (assurabilité des travaux).

Le Projet National Terre (PN Terre), placé sous l’égide du Ministère de la Transition Écologique et dont NOBATEK/INEF4 est membre doit conduire tous les acteurs de la filière pour amener ces techniques constructives vers la « traditionnalité » en accompagnant l’évolution des techniques de construction en terre crue, pour massifier l’usage du matériau.

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