Financer la rénovation énergétique des bâtiments publics locaux, le compte à rebours est lancé !

1609 Dernière modification le 10/04/2023 - 12:00
Financer la rénovation énergétique des bâtiments publics locaux, le compte à rebours est lancé !

 

« Le climat est un usurier. Tout ce que je ne fais pas aujourd’hui me coûtera plus cher demain » affirmait récemment Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. En ce début d’année 2023, le gouvernement souhaite encourager l’investissement public local qui pèse pour 70% de l’investissement public total. Dans un contexte où la transition écologique est au cœur des préoccupations, les collectivités sont en première ligne puisque 75% des leviers de la réussite reposent sur les acteurs locaux (Stratégie Nationale Bas-Carbone, mars 2020). Mais les collectivités en ont-elles les moyens ? 

Les bâtiments publics locaux au coeur des enjeux de la rénovation énergétique

Le financement de la rénovation énergétique des bâtiments publics est un enjeu majeur dans les territoires. Pour répondre aux enjeux climatiques, réglementaires et financiers et faire face à un besoin d’ingénierie croissant, le compte à rebours est lancé pour les acteurs locaux. Quelles marges de manœuvre ? Quelles perspectives ? Quelles solutions ?
Au carrefour d’exigences politiques, environnementales, juridiques, financières et techniques, la rénovation énergétique des bâtiments publics s’impose progressivement aux collectivités territoriales. Le dispositif éco énergie tertiaire, introduit par le décret du 23 juillet 2019 et complété par des arrêtés d’application oriente les collectivités territoriales vers un objectif clair : la réduction drastique et réelle de la consommation énergétique de leur parc tertiaire !
Trois chiffres illustrent cet enjeu : 

  • Le secteur des bâtiments représente près d’un quart des émissions de gaz à effet de serre en France ;
  • Les bâtiments des collectivités représentent près de 30 % du parc tertiaire national, soit près de trois fois plus que les bâtiments de l’Etat ;
  • La facture énergétique constitue le deuxième poste de dépenses de fonctionnement des collectivités, et les bâtiments représentent les trois quarts de cette facture.

Qu’est-ce qui explique ce constat ? 
D’une part, vieillissants, les bâtiments des collectivités sont souvent énergivores (la rénovation de certains bâtiments scolaires anciens peut conduire à réaliser plus de 80% d’économies d’énergie).  Le coût de leur consommation énergétique pèse de manière significative sur les budgets locaux. La facture énergétique a ainsi connu une augmentation sensible dans un contexte de crise énergétique depuis 2022. D’autre part, la transition écologique et la sobriété énergétique deviennent des préoccupations citoyennes grandissantes. Enfin, la réglementation se veut pour sa part de plus en plus ambitieuse s’agissant des économies d’énergie attendues des collectivités publiques, notamment pour répondre aux ambitions de la Stratégie Nationale Bas Carbone Française (SNBC).

Quand les urgences convergent avec la réalité énergétique 

Plus récemment, les tensions rencontrées sur le secteur énergétique, en France, en Europe et à l’international (crainte d’un arrêt d’approvisionnement des énergies, possibles délestages, croissance exponentielle des factures…) ont provoqué un effet ciseau pour les collectivités : 

  • D’une part, la rentabilité des projets de rénovation énergétique des bâtiments a doublé (puisque chaque kilowattheure de consommation évité conduit à économiser deux fois plus en moyenne), ce qui impose d’accélérer la dynamique de rénovation.
  • D’autre part, les obstacles financiers à la rénovation se sont renforcés : le cadre budgétaire contraint dans lequel les collectivités territoriales évoluent, vraisemblablement appelé à se resserrer encore davantage au cours des prochaines années, limite leur capacité d’intervention. Le contexte inflationniste conduit également à une augmentation des dépenses de fonctionnement des collectivités et dégrade leur capacité d’autofinancement. L'environnement de taux se montre quant à lui de plus en plus défavorable. Les capacités d’emprunt des collectivités ne sont pas saturées mais afin de mobiliser pleinement cette source de financement, une visibilité sur leurs ressources de fonctionnement est indispensable. 

Ainsi, une mobilisation de l’ensemble des sources de financement disponibles est nécessaire pour accélérer la rénovation énergétique du patrimoine des collectivités.

Le financement comme cheville ouvrière de la rénovation énergétique

Deux volets d’investissements rentrent en compte dans la rénovation énergétique : l’amélioration de la performance thermique de l’enveloppe (murs, toit, huisseries) et l’amélioration du rendement des équipements de chauffage, ventilation, climatisation et éclairage.
Le préalable pour une collectivité est bien de se doter d’une véritable stratégie de rénovation, qui implique un diagnostic du patrimoine et l’adoption d’un schéma directeur pour planifier les actions à mener. Pour cela, les besoins en ingénierie, y compris pour se saisir des véhicules juridiques et capter des financements, sont considérables. Ils sont surtout indispensables à tous les stades de la stratégie. 
Les besoins d’investissement des collectivités dans la rénovation énergétique de leurs bâtiments sont significatifs : de l’ordre de 3 milliards d’euros par an d’après l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE, 2022). Ils pourraient atteindre jusqu’à 8 milliards d’euros selon des hypothèses de coût de rénovation plus pessimistes. 
Les modes de financement abondent (subventions, prêts, certificats d’économie d’énergie, intracting …), mais sont utilisés inégalement selon le territoire, la strate démographique et le type de collectivités. A titre d’exemple, le CEREMA insiste, dans une enquête publiée fin 2022, sur l’intérêt des Certificats d’Economie d’Energie (CEE) pour le financement des travaux de rénovation énergétique mais rappelle que leur utilisation reste difficile pour les collectivités (manque de connaissance du dispositif, manque de temps et de moyens humains …). 


En réponse aux impératifs d’économies d’énergie, un gestionnaire de patrimoine bâti a plusieurs leviers à sa disposition, notamment l’exploitation-maintenance et la rénovation énergétique. Mais quels types de contrats passer et quels types de financements leur associer ? Existe-t-il des aides, subventions ou modes de financement innovants qui permettent d’aider à supporter la charge financière conséquente que représentent ses actions ? L'étude menée par le Cerema dresse le panorama des principaux types de contrats d’exploitation-maintenance et les modes de financements et de subventions innovants associés afin de donner aux maitres d’ouvrages publics et privés des clefs d’aide à la décision.


Une étude AFL réalisée par les élèves de l’INET bientôt disponible sur le sujet

Conscients des leviers de financement disponibles -mais souvent méconnus des collectivités- pour la rénovation énergétique, l’Agence France Locale (AFL), le CEREMA et l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) ont confié une étude à un groupe d’élèves administrateurs et ingénieurs en chef territoriaux de l'Institut National des Etudes Territoriales (INET) en mai 2022. 
L’étude, dont la publication est prévue en mars 2023, pointe les enjeux essentiels : malgré les nombreuses contraintes (financières, techniques, juridiques, humaines), le contexte environnemental et règlementaire impose d’accélérer significativement l’effort de rénovation, dans le cadre de stratégies pluriannuelles.
L’horizon de neutralité carbone en 2050 fixé par l’Union européenne astreint fortement l’action publique nationale et locale. Il est urgent de massifier les travaux et (re)donner les possibilités techniques et financières aux collectivités. Les dispositifs de financement existent, sont nombreux et cumulables, selon des règles d’articulation variable selon les territoires. 
Cette étude éclaire ces différents dispositifs et recense les acteurs mobilisables par les collectivités locales. Elle montre que, même sans intervention de l’Etat, des marges de manœuvre existent. Le compte à rebours est lancé !

 

Un article co-signé Lou Lamure-Guigard, AFL, et  Mélisande Barraud, Faustine Coache, Charlotte Corrius, Théo Gal, François Le Behot, Quentin Maleine, Maxime Noel, Pauline Robert, groupe d’élèves administrateurs et ingénieurs en chef de l’INET


Article suivant : Intracting : financer facilement et sur fonds propres ses économies d'énergie pour répondre au dispositif Éco Énergie Tertiaire, Sandrine de Ternay


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