Crise écologique, une opportunité́ pour une vision long-terme de l'entreprise ?

Rédigé par

Hélène MEYER

Responsable communication et marketing

1118 Dernière modification le 28/07/2023 - 10:40
Crise écologique, une opportunité́ pour une vision long-terme de l'entreprise ?

 

Retour sur l’édition 2022 du colloque Build & Connect, un événement consacré à l’adaptation du bâtiment aux crises climatiques et énergétiques que connaît le monde actuel. Lors d’une session organisée la journée du 23 novembre, Benoît Bazin, Directeur général du groupe Saint-Gobain, et Christian de Perthuis, économiste du climat, ont débattu ensemble sur la question de la transition écologique et énergétique comme moteurs de l’économie et de la croissance. 

 

Benoît Bazin, Directeur général du groupe Saint-Gobain rappelle d’entrée le contexte actuel ponctué par « un ensemble de facteurs exogènes violents sur laquelle la visibilité est réduite, mais sur laquelle l’entreprise peut agir » : hausse des prix de l’énergie, inflation, précarité énergétique… Des circonstances difficiles, donc, mais pas inextricables. 

Le CEO de Saint-Gobain ajoute que de nombreux défis animent le secteur de la construction à ce jour, avec en tête, ce trio : la nécessité de réduction des émissions de gaz à effet de serre, la raréfaction des ressources naturelles et l’accélération de l’urbanisation en pays émergeants dans un cadre de démographie mondiale galopante. Saint-Gobain souhaite répondre à ces trois enjeux en adoptant une façon de construire durable et légère pour la moitié de son activité, l’autre moitié étant consacrée à la rénovation énergétique plutôt que la construction neuve. Le dirigeant rappelle notamment que 5 millions de passoires énergétiques en France restent à éradiquer pour solutionner le problème de la précarité énergétique, et éviter de choisir entre se nourrir ou se chauffer. Un combat aligné avec la raison d’être du groupe : « making the world a better home ». 

Saint Gobain émet 10 millions de tonnes de CO2 sur ses scopes 1 et 2. Benoît Bazin rappelle cependant que cet impact a été réduit de 23% entre 2017 et 2021, malgré une accélération de la croissance et de la rentabilité de l’entreprise. Préserver la planète n’est donc pas antinomique à ces notions, au contraire ! 

Christian de Perthuis est auteur d’un ouvrage intitulé « Climat : 30 mots pour comprendre et agir ». L’économiste parle d’opportunité pour qualifier la transition écologique et préfère le terme d‘impératif. Pour lui, la crise climatique contraint nécessairement les entreprises à s’adapter et à penser sur le long terme. Les impacts du changement climatique étant déjà là et amenés à se renforcer sans cesse dans les prochaines décennies, cela va obligatoirement amener les entreprises à « pondérer leurs exigences de rentabilité économique » et à adopter des comportements de plus en plus résilients. Les investissements en ce sens doivent ainsi être de plus en plus importants selon lui. Christian de Perthuis appelle également à « désinvestir très rapidement » d’autres domaines, celui des énergies fossiles principalement.   

La clé réside donc selon l’économiste dans l’agilité des entreprises et cette dualité « investissement et désinvestissement », c’est-à-dire, une « aptitude à transférer des actifs économiques du fossile vers le décarboné ». Mais ce dernier point ne peut se réaliser sans l’aide des pouvoirs publics, qui selon Christian de Perthuis doivent donner de grandes orientations, et ce notamment par les normes et la réglementation. Un dernier point que Benoît Bazin appuie, en affirmant que l’entreprise a besoin de « normes stables » et une vision à échelle européenne pour pérenniser ses investissements. Par ailleurs, le CEO de Saint-Gobain évoque un frein au changement dans le fait « qu’un pan entier de l’économie et des banques privées ne s’intéressent pas au sujet de l’amélioration du parc de logement existant en France », et ce notamment sur le résidentiel. 

Et si enfin, l’apport de croissance de la transition écologique était à considérer sous un autre prisme ? Selon le Directeur général de Saint Gobain, adopter des comportements vertueux – réduire les déchets sur une ligne de fabrication, optimiser les transports, entrer dans des boucles fermées, baisser la consommation d’eau… – aide l’entreprise à devenir meilleure, à se perfectionner et devenir excellente et parfaitement paramétrée dans ce qu’elle fait. Aussi, s’adapter au changement climatique, c’est aussi innover, faire bouger les équipes des grands groupes, faire confiance aux jeunes générations… Un cercle vertueux pour la vie économique globale de l’entreprise. 

En conclusion du débat, Christian de Perthuis émet quelques réserves quant à la propension des acteurs économiques à bouleverser leurs comportements pour aller vers plus de résilience : « Nous sommes toujours prêts à faire les efforts pour ce qui nous arrange, mais qui est prêt à le faire pour ce qui le dérange ? » 

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