Connaître le BTP hors de nos frontières : une LEx à Copenhague donne l’exemple

Rédigé par

Amandine Martinet - Construction21

Journaliste

509 Dernière modification le 12/01/2024 - 12:00
Connaître le BTP hors de nos frontières : une LEx à Copenhague donne l’exemple

Expériences croisées de trois des vingt-cinq participants à une learning expedition organisée par le WinLab –, incubateur du CCCA-BTP – en juin 2023 dans la capitale danoise.

Stéphanie Camous, responsable des appels à projets et de la veille au CFA du bâtiment PACA, Émilie Hébrard, formatrice au BTP CFA OCCITANIE – Campus de Mejannes les Ales et Alexandre Van Ausloos, Adjoint technique-Délégué pédagogique à la Fédération Régionale des MFR (Maisons Familiales Rurales) Auvergne-Rhône-Alpes nous partagent leurs retours à la suite de ce voyage au cœur d’une autre vision européenne de la construction. 

Quelles sont vos impressions générales à la suite de la LEx à Copenhague organisée par le WinLab’ ? 

Stéphanie Camous : J’ai été émerveillée par ce voyage et j’ai énormément appris. Le programme, bien que dense, était très pertinent. Si j’avais effectué ce déplacement seule, je n’aurais jamais pu acquérir autant de connaissance sur les façons de faire danoises et les spécificités énergétiques du pays, par exemple. 

Alexandre Van Ausloos : Cette expérience a permis d’arrêter le quotidien pour réfléchir à d’autres pratiques dans le secteur du bâtiment, transférables notamment auprès de nos apprenants. Il s’agit d’un enrichissement aussi bien professionnel que culturel. 

Émilie Hébrard : J’ai surtout le souvenir de ma surprise devant un système si différent du nôtre. Éducation, communauté soudée… cela a été un vrai choc ! Ainsi, ce que je retiens surtout du voyage, c’est la cohésion de cette société danoise, visible au premier contact. Le respect réciproque, également. J’ai rencontré des personnes motivantes, innovantes !

Un souvenir marquant de cette learning expedition à nous partager ?

SC : J’ai beaucoup aimé notre visite d’un chantier hors-norme, celui de VINCI Grands Projets – la construction de tunnels immergés devant relier l’Allemagne au Danemark. Nous avons rarement l’opportunité de visualiser des projets de cette envergure. J’ai aussi été intriguée par l’usine de cogénération que nous avons découvert au sud de Copenhague, qui collecte les déchets pour restituer de l’énergie à la ville, et sur laquelle a été construite… une piste de ski, un mur d’escalade ou encore un rooftop avec un café. La structure a ainsi a su intégrer du social, comme une véritable extension de la ville. 

AVA : Pour ma part, je pense à la visite de l’écoquartier, avec une réflexion poussée sur le multiusage des bâtis, un réaménagement intelligent d’anciennes usines, une utilisation innovante de l’eau et un tri des déchets plus avancé que dans notre pays.  

Une suggestion supplémentaire pour parfaire le programme de cette LEx ? 

SC : J’aurais aimé visiter une éolienne, pour en savoir davantage sur le prisme de la transition énergétique spectaculaire du Danemark. 

AVA : Effectivement, nous avons beaucoup entendu parler d’éolien pendant ce voyage, sans avoir eu l’opportunité d’étudier de plus près cette production d’énergie renouvelable. 

Le choix du Danemark vous a-t-il paru pertinent ? Quelles spécificités de ce pays avez-vous retenues ?  

SC : De mon expérience dans le BTP, j’ai toujours entendu parler du modèle danois et des pays scandinaves plus largement, notamment au niveau de l’évolution spectaculaire du mix énergétique sur ces dernières années. Il était donc judicieux d’aller voir sur place ce qu’il en était ! J’ai ainsi pu constater que ma représentation mentale du pays était assez éloignée de ce qui se faisait réellement sur le terrain. 

Il faut savoir que le Danemark n’aborde pas le prisme de l’écologie de la même manière que la France : très marqué par le choc pétrolier, il a adopté une stratégie collective pour transformer son mix énergétique. 

Très marqué par le choc pétrolier, le Danemark a adopté une stratégie collective pour transformer son mix énergétique. 

AVA : Ce pays se distingue également par le rythme de ses habitants. Les journées de travail sont courtes – elles se terminent entre 15h et 16h environ –, laissant un temps important pour les loisirs et la sociabilité. Sur l’aspect social, je pense notamment à la fête des bacheliers à laquelle nous avons assisté, une sorte de rite initiatique où les jeunes se retrouvent pour faire la fête de façon presque protocolaire. 

L’aspect éducatif est également intéressant. Au Danemark, on laisse une grande autonomie aux enfants, et l’Etat finance intégralement les débuts et fin de vie de chacun. Cela implique que les jeunes obtiennent rapidement des aides pour s’indépendantiser du foyer et commencer leur vie professionnelle au plus tôt (à partir de 13 ans !)

EH : En effet, le choix de ce pays me paraît particulièrement pertinent dans la mesure où le système éducatif est pensé là-bas de façon différente depuis le plus bas âge. Visiter des lieux de formation recevant des publics plus âgés nous a montré directement le résultat de cette éducation, de cette philosophie de vie à deux têtes, si je peux dire : d’un côté, la vie en communauté, et de l’autre une autonomisation forte.

SC : Sur l’aspect purement constructif, nous avons constaté que les professionnels danois travaillaient de façon particulièrement propre ! Autre spécificité, celle de la vision de la sécurité sur les chantiers, beaucoup moins drastique au Danemark qu’en France. 

En quoi selon vous ce type d’initiative à l’étranger est-il enrichissant dans votre métier ? 

SC : Une learning expedition permet d’enrichir son réseau avec des individus de tous horizons – pas uniquement en provenance de CFA. J’ai pu rencontrer des professionnels œuvrant dans des maisons familiales, dans le secteur industriel, des journalistes… Des compétences très variées, donc, et chacun peut apporter à l’analyse des autres. 

EH : Ce type d’initiative permet d’élargir son horizon, de repenser ses pratiques et de remettre en question nos façons d’enseigner, d’éduquer et de vivre. Cela donne des orientations générales, mais aussi des idées d’applications immédiatement utilisables.

SC : Se rendre dans un autre pays, c’est aussi découvrir des solutions nouvelles, qui peuvent être dupliquées sur notre territoire. 

AVA : Et puis, cela permet de relativiser ! En voyant ce qui se fait ailleurs et en constatant certaines lacunes à l’étranger, nous pouvons aussi nous rendre compte de notre propre avance dans plusieurs domaines. 

Aviez-vous d’autres expériences à l’étranger à votre actif ? 

EH : Je n’avais jamais participé à ce genre d’initiative, j’en suis très heureuse et j’espère pouvoir recommencer bientôt, c’est tellement riche !

SC : Pareillement, c’était une première pour moi. Cela m’a donné envie de répliquer cette expérience, pourquoi pas via le programme Erasmus destiné aux salariés. 

AVA : Pour ma part, j’ai déjà eu la chance de partir à Prague au cours de mon expérience de formateur, dans le cadre d’Erasmus justement. Au-delà de la mobilité des jeunes, je trouve cela intéressant d’encourager celle des enseignants. Les adultes doivent eux aussi s’ouvrir à d’autres horizons, ne serait-ce pour être sur la même longueur d’ondes que leurs étudiants. 

Les adultes doivent eux aussi s’ouvrir à d’autres horizons, ne serait-ce pour être sur la même longueur d’ondes que leurs étudiants. 

Quelle destination choisiriez-vous pour une prochaine learning expedition ? 

EH : Je choisirais le Royaume-Uni si cela se déroule sur le continent européen, ou sinon le Japon, pour découvrir un autre système radicalement opposé et revenir avec de nouvelles idées et pistes d’innovation !

AVA : L’Asie m’attire également. Nous ne savons pas toujours ce qu’il se passe dans le BTP dans ces régions si lointaines. En outre, la question de la gestion de la chaleur – une problématique malheureusement de plus en plus actuelle – dans les pays de l’hémisphère sud m’intéresse également. Là-bas, comment réguler sans forcément avoir recours à des systèmes tels que la climatisation ? 

SC : Je serais pour ma part curieuse de découvrir le secteur du BTP dans un pays d’Amérique du Sud, car nous parlons très peu de cette région du monde sous ce prisme. Par exemple, le Costa Rica, dont on dit qu’il s’agit d’un pays très en avance sur la biodiversité et l’écologie. Qu’en est-il des constructions ? 

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