CapNavir, un projet de caractérisation des particules fines issues du trafic maritime et fluvial

676 Dernière modification le 23/08/2023 - 10:45
CapNavir, un projet de caractérisation des particules fines issues du trafic maritime et fluvial


Le projet CapNavir, piloté par le Cerema et destiné à caractériser la nature et les concentrations des particules fines émises par les navires passagers et le trafic fluvial, s'est achevé.

Des mesures ont été réalisées sur le site d'expérimentation du port urbain de Bordeaux, qui présente l’intérêt d’être un port en ville avec des critères favorables pour la réalisation de la campagne de mesures lancée septembre 2021. Les résultats sont disponibles.


CAPNAVIR, pour CAractérisation des Particules fines issues de la NAVIgation fluviale ou maRitime, a été retenu dans le cadre de l’appel à projet de recherche CORTEA financé par l’Ademe. Ce projet innovant visait à caractériser les particules fines (PM2,5 et PM1) issues de la navigation maritime ou fluviale et bénéficie d’un partenariat avec le Port de Bordeaux où les mesures ont été réalisées, le laboratoire CNRS d’aérologie de Toulouse, la société Particle Vision en lien avec l’Université de Fribourg (Suisse) et la société Fluidyn.

Une campagne de mesures de plusieurs semaines a été menée en septembre 2021 au port de Bordeaux, qui a la particularité de se trouver en zone urbaine. Ce projet a ainsi permis d'évaluer la situation afin d’envisager des moyens de réduction de cette pollution liée au transport maritime et fluvial, et diminuer l’exposition des citoyens.

Les préoccupations environnementales liées au trafic maritime, généré par l’augmentation du tourisme et des flux de marchandises, et à la qualité de l’air en particulier obligent à repenser les relations ville-port, dans le respect des enjeux d’un développement durable.

Dans ce contexte et même si la contribution du transport maritime à la pollution atmosphérique nationale est faible en comparaison au secteur routier, l’intérêt est grandissant d’une connaissance plus approfondie de la caractérisation des particules (tailles, composition chimique) et de leur contribution sur la qualité de l’air des zones portuaires urbaines particulièrement, au plus proche des populations exposées.

Alors que des mesures de réduction de pollution sont envisageables par les gestionnaires de navires, que ce soit en agissant sur les moteurs des navires pour les oxydes d’azote (NOx) ou sur les carburants pour le SO2, en application de la régulation internationale dictée par l’Organisation maritime internationale (OMI), le projet se focalise sur les particules non encore réglementées, à savoir les PM1, mais aussi plus largement sur les PM2,5, la finalité étant l’amélioration de la qualité de l’air liée à ces particules fines qui ont un impact en termes de santé publique.

Partenariats 

Le Cerema possède des compétences sur la qualité de l’air et sur le trafic maritime qui lui permettent de se positionner comme un acteur national et reconnu sur ce sujet à fort enjeu. Quatre partenaires ont accompagné le Cerema, coordinateur du projet CapNavir garant par son expertise de la méthodologie adoptée :

  • Le Laboratoire d’Aérologie de Toulouse (CNRS) qui apporte son expertise et son savoir-faire dans la caractérisation des particules fines en temps réel grâce à ses mini-stations de mesure communicantes fonctionnant en réseau ;
  • La société suisse Particle Vision qui utilise ses techniques d'échantillonnage et d'analyse, développées en partenariat académique, afin de caractériser la matière particulaire ;
  • La société Fluidyn qui intervient pour son expérience reconnue en modélisation CFD, applicable à l’échelle d’une zone portuaire, en utilisant l’inversion de données de capteurs en temps réel (méthode de reconstruction par renormalisation) ;
  • Le Grand Port Maritime de Bordeaux qui, en tant que gestionnaire de la zone portuaire déjà impliqué dans une démarche environnementale accompagne le projet pour le déroulement de l’expérimentation sur site et le recueil des données du trafic maritime.


Par ailleurs, dans le cadre du comité technique mis en place pour le suivi de ce projet ont également été associés Bordeaux Métropole et l’ATMO Nouvelle-Aquitaine.

Résultats de la campagne de mesure de 2021 

Une campagne de mesures a été menée entre le 15 septembre et le 5 octobre 2021 à l’aide de capteurs actifs à haute sensibilité, disposés le long des berges de la Garonne, avec la particularité d'avoir été réalisée en hauteur et au plus près de la zone de navigation, complétés par des mini-stations météo pour tenir compte des conditions locales. Ces capteurs ont permis de relever la présence de 9 types de polluants et de caractériser les particules fines émises par 14 passages de navires au niveau de la zone portuaire restreinte de Bordeaux centre, où les différentes phases d'activité d'un navire, en manœuvre ou à quai, ont été reproduites. Il s'agit en outre d'un environnement urbain avec un trafic routier important.

La mesure des particules en masse (en µg/m3) a été complétée par une mesure des particules en nombre au plus proche du panache de fumée ainsi que du dioxyde de soufre (SO2), polluant caractéristique réglementé et lié à la teneur en soufre du fioul marin utilisé. Le pont Jacques Chaban-Delmas en particulier a pu être instrumenté pour la première fois pour des mesures dans le panache de fumée au passage des paquebots.

Durant les 3 semaines de mesures, 24 capteurs ont été déployés sur 7 sites spécifiques pour récolter plus de 1 617 898 données. Les mesures récoltées ont été intégrées dans une base de données PostgreSQL et croisées également avec les informations fines du trafic maritime et fluvial.

La plupart des capteurs ont été positionnés en hauteur (toit bâtiment) afin de capter au plus près les particules émises par les panaches des navires, ce qui constitue une approche originale.

Des mesures ponctuelles ont été effectuées sur le pont Jacques-Chaban-Delmas au plus près des panaches des navires, ce qui a nécessité la pose et la dépose des appareils de mesure avant la fermeture et après la réouverture du pont à la circulation, ceci jour et nuit.

Plus de 1,6 millions de données ont pu être récoltées et intégrées dans une base de données pour un traitement optimisé. L’interprétation des mesures en champ proche et leur mise en relation univoque avec chaque navire et leurs manœuvres en cours ont été réalisées par l’analyse détaillée des activités des navires à l’échelle du port et par modélisation des points de mesure.

Les résultats basés sur la campagne de mesures ont mis en évidence les principaux éléments suivants :

  • Les concentrations des polluants étudiés et émis par les navires pendant les phases d’accostage sont avérées ponctuelles et furtives avec des concentrations du même ordre de grandeur de celles provenant de l’ensemble du trafic routier. Cette détection a été possible spécifiquement sur le pont Jacques-Chaban-Delmas pendant sa fermeture (arrivée et départ bateau), alors que le trafic routier de part et d’autre du pont a dû s’arrêter.
  • Compte tenu des augmentations de concentration similaires attribuées au trafic routier et au trafic maritime et de la période beaucoup plus longue pendant laquelle les émissions du trafic routier sont injectées dans l'atmosphère, l'influence des concentrations issues du trafic maritime mesurées pourtant à la hauteur la plus proche possible des cheminées de navire est pratiquement impossible à mettre en évidence en moyenne journalière, sur l’ensemble des mesures réalisées.
  • Pendant les périodes à quai, la caractérisation des particules issues du trafic maritime, par l’analyse d’indicateurs basés sur les concentrations en particules fines et en black carbon a pu mettre en évidence la production probable d’aérosols secondaires dont l’étude serait à approfondir. Les aérosols secondaires se forment par photochimie ou condensation de gaz précurseurs sur une particule (un "noyau").

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