Anticiper les risques pour construire et consolider le bâti

Rédigé par

Sakina Pen Point

Responsable de programme - Adaptation au changement climatique

460 Dernière modification le 11/03/2024 - 11:43

Pour les nombreux acteurs du secteur immobilier, l’analyse des risques qui pèsent sur le bâtiment se révèle cruciale pour mener à bien des projets résilients et durables. Dans ce contexte, l’outil Bat-ADAPT permet de disposer d’une vision multirisque afin de concevoir au mieux le bâti de demain. 

Les risques physiques climatiques qui influencent et impactent le secteur du bâtiment résultent des dommages induits par des phénomènes qui varient en fréquence, intensité, durée, à cause du changement climatique. En France, il s’agit des risques suivants  :

  • La dégradation du confort thermique des bâtiments, due à l’augmentation du nombre, de l’intensité et de la durée des canicules estivales, notamment en zone urbaine, quand celles-ci sont couplées aux phénomènes d’îlots de chaleur urbain. 
  • L’apparition de plus en plus fréquente de fissures pouvant causer des effondrements de biens du fait de l’augmentation de sécheresses dans des zones aux sols argileux, qui sont à l’origine de phénomènes de retrait-gonflement des argiles (RGA).
  • Les inondations de bâtiments dans des ampleurs, intensités et fréquences amplifiées du fait de précipitations intenses sur des zones fortement artificialisées ou avec des sols érodés. Ce risque peut également être causé par des débordements de cours d’eau ou des remontées de nappes à la suite de la modification des régimes de précipitations.
  • Les intrusions d’eau saline dans les bâtiments (pouvant causer des effondrements), en raison de l’érosion côtière et des événements de submersions marines dues à la montée du niveau de l’eau.
  • Les dégradations et arrachements d’éléments extérieurs des bâtiments liés à des vents violents et des tempêtes. 
  • La perte de bâtiment dans des incendies den raison de sécheresses accrues, résultant d’une fréquence accrue  de feux de forêts et une propagation plus rapide et incontrôlable.

L’occurrence de cet ensemble de risques est d’autant plus dommageable qu’ils interviennent désormais dans des zones auparavant pas ou peu exposées. 
Afin de prévoir les mesures d’amélioration de la résilience climatique des bâtiments et biens, et de planifier les stratégies d’adaptation à mettre en place, la première étape est de caractériser le risque. Cette caractérisation nécessite une expertise qui s’appuie sur la modélisation de scénarios climatiques permettant d’avoir des indicateurs prospectifs d’exposition au risque. Ces informations préliminaires sont ensuite évaluées au regard de la réponse du bâtiment face à l’exposition du risque, ou vulnérabilité de celui-ci, selon les caractéristiques de sensibilité (choix techniques de construction, rénovation, etc.) et d’usage du bâtiment.  

Pourquoi un outil d’analyse de risques climatiques ?
Pour les acteurs de l’immobilier, privés ou publics, du tertiaire ou du résidentiel, le déploiement de stratégies d’adaptation, à l’échelle du bâtiment ou d’un patrimoine, nécessite un approfondissement de ces connaissances. Dans le cas d’un patrimoine, la collecte des informations nécessaire à la caractérisation de la sensibilité pourra être déterminante et se révéler un enjeu de taille. Dans le cas d’un accompagnement de projet de construction ou de rénovation bâtiment intégrant l’adaptation, la collecte d’informations sera simplifiée, mais le niveau de détail à obtenir pour la prise de décision nécessitera souvent une intervention d’expertise différenciée selon l’aléa à traiter, et selon l’ambition portée. Les outils d’analyse de risques permettent de réaliser des analyses plus ou moins fines, face à une quantité d’aléas climatiques plus ou moins importante, et nécessitant un investissement variable.

Un certain nombre de textes réglementaires incitent également à conduire des analyses de risques climatiques et à mettre en  oeuvre des stratégies d’adaptation, dont la Taxinomie européenne et la loi Énergie-Climat. Les futures normes intégreront également de plus en plus de conditions concernant l’adaptation, comme annoncé dans les premières consultations autour du troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC 3).

Quels critères pour choisir les outils ?
Pour choisir son outil selon ses usages et besoins, il est important de garder en tête certains critères différenciants :

  • Selon les outils, risques, aléas, modèles et horizons évalués différents : pour être en accord avec la réglementation actuelle et future, ainsi qu’avec les recommandations des autorités, il est important de comparer l’exhaustivité des risques traités, l’utilisation de scénarios climatiques du GIEC (RCP ou SSP), et l’existence de projections temporelles à court (2030), moyen (2050) et long terme (2100).
  • L’analyse du risque doit être approfondie grâce à l’évaluation conjointe de l’exposition et de la vulnérabilité, prenant en compte les spécificités du système étudié (bâtiment, maison individuelle, infrastructures, etc.)
  • La comparabilité spatio-temporelle doit être assurée : il est essentiel de pouvoir comparer les analyses des bâtiments entre eux sur un large périmètre adapté, pour assurer un ordonnancement de déploiement des stratégies en identifiant les bâtiments et biens prioritaires. En termes de comparabilité temporelle, s’assurer de la pérennité de l’existence de l’outil est primordiale pour conserver une trace de l’évolution des analyses de risques d’année en année selon les mêmes méthodologies. Par ailleurs, la capacité à avoir une comparabilité avec l’ensemble du secteur de l’immobilier est une grande force afin de mieux caractériser le risque. Enfin, la trajectoire préconisée pour l’évaluation de l’adaptation à l’échelle gouvernementale en France est la Trajectoire d’Adaptation au Changement Climatique (TRACC) ; il est donc impératif que l’outil prévoie d’intégrer des indicateurs selon cette trajectoire à l’échelle de la France quand ils seront disponibles.
  • La transparence des modèles est également un facteur majeur différenciant : l’absence de transparence ne permet pas de comprendre les biais et limites de ces analyses qui, en l’absence de normes pour les définir, ont toutes des choix méthodologiques différents.

Un outil dédié aux acteurs de l’immobilier et des collectivités
L’OID propose une plateforme d’analyse de la résilience Resilience for Real Estate (R4RE) sur lequel un outil d’analyse de risques climatiques et d’aide à la décision pour l’adaptation est disponible : Bat-ADAPT. Cet outil vise à respecter l’ensemble des conditions évoquées dans cet article, et est en accessibilité libre pour tous les acteurs qui ont besoin de réaliser des analyses de risques climatiques sur leurs biens et bâtiments. Plus d’un million de bâtiments ont déjà été analysés face aux risques climatiques sur Bat-ADAPT.

Bat-ADAPT propose des cartographies de risques, des indicateurs prospectifs selon les scénarios climatiques du GIEC, à proche, moyen et long terme, pour huit aléas. Il fournit des indicateurs d’exposition et de vulnérabilité, et permet d’assurer la comparabilité spatio-temporelle avec des modèles à l’échelle de la France et de l’Europe. 
Pour aller plus loin, Bat-ADAPT propose depuis juillet 2023 une sélection d’actions d’adaptation à mettre en place selon le profil de risque du bâtiment. Ces actions sont récapitulées dans le Guide des actions adaptatives de l’OID et comptent des Solutions fondées sur la nature (SFN) et des indicateurs de suivi. De plus, un nouveau parcours à destination des acteurs de collectivités, Bat-ADAPT Territoires, sera disponible à partir de mi-mars 2023. Celui-ci s’appuiera sur des indicateurs en accord avec la TRACC.

Cet article fait partie de notre dossier Adaptation & Résilience des bâtiments que vous pouvez retrouver ici.

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