Des projets de construction en bois de plus en plus controversés

Rédigé par

Simon Mercier

5529 Dernière modification le 23/11/2017 - 10:23
Des projets de construction en bois de plus en plus controversés

Les constructions en bois ont le vent en poupe. Mais qu’il s’agisse d’habitations ou de bureaux, architectes et promoteurs passent généralement sous silence les conséquences écologiques et les risques que représentent ces constructions, bien souvent abusivement présentées comme l’avenir de la « construction durable ».

Un impact écologique déplorable

En mai 2017, 23 appartements neufs en bois seront livrés à leur propriétaires. Située à Issy-les-Moulineaux, la réalisation de cette résidence a été souhaitée par la mairie et menée par le promoteur Woodeum. De nombreux arguments sont mis en avant pour ce type de construction : il n'y a pas besoin d'eau pour ériger un tel bâtiment, le bois est un matériau renouvelable, une fois que son ossature est livrée la construction est très rapide, etc. Pourtant, il convient de faire un point sur différentes réalités parfois oubliées qui vont de pair avec ce matériau qu’est le bois.

Chaque matériau de construction a un impact CO2 lié à sa fabrication. En effet, pour l’abattage, le sciage, le rabotage, le séchage, le transport, le conditionnement, etc., les quantités d’émissions de CO2 sont considérables. Pour le bois, l’impact durant le processus de fabrication est de 147 kg de CO2 émis par tonne. Entre la scierie et la forêt, la distance moyenne est de 110 km, auxquels il faut ajouter en moyenne 500 km jusqu’aux chantiers. En effet, le bois vient souvent de loin. L’origine des sciages utilisés en construction se partage comme tel : 60% d’importation contre 40% d’origine française.

Il est également intéressant de se pencher sur les ressources et l’avenir de la forêt française. Une exploitation industrielle de nos forêts détériore la biodiversité, les forêts deviennent des espaces préfabriqués par l’Homme, avec une monoculture qui appauvrit la biodiversité. Si tant est que ceux-ci soient replantés : la filière bois elle-même s’est récemment inquiétée de la déforestation et de la raréfaction du bois français.

La sécurité en question

Outre son empreinte écologique, les constructions en bois sont sujettes à caution d’un point de vue sécuritaire. Pour rappel, on dénombre plus de 250 000 incendies domestiques par an. Le bois est classé dans la catégorie D selon les normes européennes dans un tableau allant de A1, A2 à F. Cela signifie qu’il résiste à une attaque brève de petites flammes mais une construction en bois représente toujours un risque pour la sécurité de ses occupants, notamment en cas d’effondrement. En effet, lorsqu'il brûle, le bois se consume d’un centimètre en 15 minutes. Dans ces conditions, même les madriers et poutres de soutien risquent de s’effondrer, pour peu que l’incendie dure quelques heures, d’autant plus que le chêne se fait rare en construction…

Afin d’améliorer sa résistance au feu, le bois est traité par des produits chimiques et toxiques pour l’homme. A ceux-ci s’ajoutent un traitement insecticide et fongicide et l'utilisation d'une substance de collage qui émet un gaz toxique : le formaldéhyde. Ce produit émis sous la forme d’un gaz incolore est présent dans les panneaux en bois et pollue considérablement l’air intérieur. Le respirer nous expose à différents risques : d'une part il est allergène et irritant, d'autre part il peut provoquer des dommages neurologiques, ainsi que le cancer du nasopharynx. Les habitations en bois sont bien souvent des sources d’émissions toxiques et peuvent porter atteinte à la santé des populations. Tout cela pour des avantages techniques et esthétiques qui paraissent bien dérisoires à côté.

Des propriétés qui ne correspondent pas aux attentes d’un lieu de vie

Lorsque l’on construit une habitation, il faut que les matériaux de construction répondent à certains critères. Le pouvoir isolant est par exemple très léger pour le bois : dans la composition d’un mur, plus de 95% de la résistance thermique est réalisée par l’isolant. Ainsi, l’inertie thermique du bois (sa capacité à absorber de la chaleur ou de la fraicheur et à la restituer progressivement) est très faible. Dans une construction en bois il faudra davantage penser à mettre en place des solutions alternatives comme la climatisation pour réguler les températures.

Concernant l’isolation acoustique, l’indice d’affaiblissement dépend de la masse du bois. Il faut par exemple 80 cm d’épaisseur de plancher en bois pour pouvoir obtenir une isolation suffisante. En termes d’entretien enfin, le bois nécessite une rénovation régulière, pour une maison de 100 m2, le nettoyage des bardages se fait une fois par an et est estimé à 3000 euros. Pour les peintures contre l’écaillement, il faut renouveler l’opération tous les 3 ans pour un coût estimé à 3500 euros.

L’essor des constructions en bois ne doit pas occulter la réalité de ses propriétés intrinsèques. La construction d’une habitation doit répondre à des critères indispensables : sécurité, solidité et la garantie d’un lieu de vie sain. Le matériau approprié est celui qui constituera le meilleur compromis entre ces critères, pondéré par le facteur prix. En la matière, le bois semble assez mal engagé. 

Sources:

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