Éco Énergie Tertiaire : les clés pour décrypter le dispositif

Rédigé par

Benjamin Choulet

Chef de projets Patrimoine Immobilier et Bâtiments Numériques

2237 Dernière modification le 04/04/2023 - 14:38
Éco Énergie Tertiaire : les clés pour décrypter le dispositif


Depuis 2021 et la mise en place du dispositif Éco Énergie Tertiaire, tous les bâtiments à usage tertiaire de plus de 1000 m², qu’ils soient publics ou privés, doivent réduire leurs consommations énergétiques en réalisant des actions d’économie d’énergie et en affichant les résultats obtenus. Le dispositif entre dans sa phase opérationnelle : cet article propose donc de rappeler les clés pour le décrypter.

Vers l’écoresponsabilité dans les bâtiments tertiaires

Éco Énergie Tertiaire est une obligation réglementaire engageant les acteurs du tertiaire vers la sobriété énergétique. Elle impose une réduction progressive de la consommation d’énergie dans les bâtiments à usage tertiaire afin de lutter contre le changement climatique.

Le dispositif est bâti sur le triptyque des « 3A » (Agir, Adapter, Attester). Agir d’abord, car les textes législatifs et réglementaires imposent une obligation d’actions pour réduire la consommation d’énergie. Adapter ensuite, parce que chaque cas est particulier ; il est donc possible d'adapter les objectifs de consommation. Attester enfin, notamment pour mettre en visibilité les efforts réalisés et les résultats obtenus.

L’assujettissement : du bâtiment à l’entité fonctionnelle assujettie

Si tous les bâtiments sont incités dès aujourd’hui à réaliser des économies d’énergie pour atteindre les objectifs de neutralité carbone à long terme, le dispositif Éco Énergie Tertiaire concerne les bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments qui présentent une surface d’activité tertiaire égale ou supérieure à 1000m². Plusieurs cas sont cités dans les textes réglementaires : pour clarifier ces cas d’usage, le ministère de la transition écologique a publié un logigramme simplifié permettant de déterminer si un bâtiment est assujetti ou non au dispositif. Il est important de noter que la surface se regarde au global, même s’il y a plusieurs exploitants ou propriétaires au sein d’un même bâtiment.

Le dispositif Éco Énergie Tertiaire s’appuie ensuite sur une approche à l’entité fonctionnelle afin de responsabiliser individuellement chacun des exploitants (propriétaire occupant, preneur à bail ou occupant). Si un bâtiment est assujetti, on regarde donc dans un second temps les « entités fonctionnelles assujetties », terme qui désigne l’échelon auquel la déclaration et le calcul de respect des objectifs sont faits. L’espace ressources d’OPERAT détaille cette notion, notamment l’atelier d’animation et de décryptage n°2 piloté par l’IFPEB.

C’est à l’échelle de chaque entité fonctionnelle que sont effectués :

  • La déclaration de la consommation de référence,
  • Le renseignement des sous-catégories d’activités concernées, l’identification des surfaces et le renseignement des indicateurs d’intensité d’usage correspondants,
  • La détermination des 2 objectifs (en valeur relative et en valeur absolue) par la plateforme OPERAT sur la base des données saisies,
  • L’établissement de l’attestation annuelle, 
  • La notation Éco Énergie Tertiaire.

Connaître ses objectifs : le point de départ

Parlons justement des objectifs à atteindre. Les objectifs peuvent être atteints, en application de l’article 175 de la loi Elan, soit par l’atteinte d’un objectif « valeur relative » de réduction de la consommation d’énergie finale de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, par rapport à une consommation énergétique de référence, soit par l’atteinte d’un niveau de consommation d'énergie finale fixé en « valeur absolue ». En fait, il suffit d’atteindre l’un des deux objectifs (donc en pratique, le moins contraignant) pour être conforme à la réglementation.

Dans le cas d’un objectif en « valeur relative », la comparaison se base sur une année de référence qui, selon les textes, doit être comprise entre 2010 et 2019 et sur laquelle toutes les données de consommation sont disponibles. En réalité, il s’agit de retenir une période de 12 mois consécutifs.


Dans le cadre d’une mission pour les services de l’État en Auvergne-Rhône-Alpes, le Cerema a produit une « fiche conseil » sur le choix de la situation de référence, et a développé un outil tableur qui permet, pour une entité fonctionnelle assujettie, de déterminer l’année de référence optimale au vu des consommations énergétiques corrigées du climat et, le cas échéant, de l’intensité d’usage : https://www.cerema.fr/fr/actualites/dispositif-eco-energie-tertiaire-outil-du-cerema-choisir.


Les valeurs à atteindre en « valeur absolue » sont, elles, indépendantes de l’année de référence. Elles sont précisées dans les différents arrêtés d’application du dispositif Éco Énergie Tertiaire; elles suivent la segmentation par catégorie d’activités définie dans les textes (voir le fichier « Segmentation détaillée : ce qu'il est possible de renseigner »)

Adapter ses objectifs : la modulation et la mutualisation

L’intensité d’usage est donc l’un des critères de modulation des objectifs à atteindre, au regard du volume d’activité. La « valeur absolue » sera modulée en fonction de ce volume d’activité (amplitude horaire, effectifs en présence par exemple). Ces indicateurs d’intensité d’usage sont précisés par catégorie d’activité dans les arrêtés : des valeurs étalons sont données et prises par défaut par OPERAT pour le calcul mais peuvent être modifiées par les assujettis si elles ne correspondent pas à leur usage réel.

D’autres critères de modulation doivent être étudiés : en particulier, en raison de disproportion manifeste du coût des actions par rapport aux avantages attendus en termes de consommations d’énergie finale ou pour des raisons techniques, architecturales ou patrimoniales. Dans ce cas, un dossier technique devra être constitué par l’assujetti.


Dans un article web, CegiBat détaille le contenu possible d’un dossier technique à déposer pour moduler ses objectifs : https://cegibat.grdf.fr/reglementation-energetique/decret-tertiaire-objectifs-reduction-consommations


À noter également qu’il est possible de mutualiser les résultats à l’échelle de tout ou partie d’un patrimoine. La foire aux questions sur OPERAT précise en ce sens qu’il s’agit d’une mutualisation des résultats et non un objectif à part entière à l’échelle de tout ou partie d’un patrimoine. Il convient d’apprécier la consommation d’énergie totale sur l’ensemble du patrimoine et de permettre de compenser les « moins bons » résultats de certaines entités fonctionnelles qui n’ont pas atteint l’un des objectifs qui leur étaient assignés par les bons ou excellents résultats obtenus par d’autres entités fonctionnelles qui ont atteint l’un des objectifs. Ce principe de réaffectation des résultats est présenté à l’article 14 de l’arrêté du 10 avril 2020.

Les moyens d’agir : quatre leviers d’action

La réduction des consommations énergétiques peut passer par une rénovation lourde des bâtiments, mais d’autres leviers d’action peuvent être mobilisés. Le dispositif Éco Énergie Tertiaire en prévoit quatre :

  • L’adaptation des locaux et la sensibilisation des occupants aux économies d’énergie : extinction automatique des éclairages en période d’inoccupation, éco-gestes… pour réaliser rapidement des économies avec un investissement modéré.
  • Les travaux sur l’enveloppe du bâti : isolation des murs, de la toiture ou du plancher, remplacement des menuiseries, installation de protections solaires.
  • L’installation d’équipements performants pour le chauffage, la ventilation, la production d’eau chaude sanitaire ou le refroidissement, avec dispositifs de contrôle et de gestion active.
  • L’optimisation de l’exploitation des équipements : renouvellement des contrats d’exploitation en y intégrant des objectifs de résultats, installation de systèmes de gestion de maintenance assistée par ordinateur.

En particulier, des actions « simples et efficaces » peuvent être engagées rapidement. Elles sont consignées dans un guide publié par le Cerema en 2020 : https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/diminuer-consommation-energetique-batiments


En déclinaison, il est nécessaire dans chaque situation d’identifier les leviers d’actions mobilisables. Un recensement (non exhaustif) est donné dans le tableau suivant, selon les 4 axes d’amélioration et les 3 étapes de la méthode des « 3A ».

L’accompagnement à la mise en œuvre

Il est parfois difficile de mettre en œuvre le dispositif : quels sont les bâtiments réellement assujettis ? Comment déterminer les objectifs de consommation ? Quelles actions mettre en place en fonction de l’état initial des bâtiments ?

C’est pourquoi les pouvoirs publics et leurs partenaires œuvrent à la mise en œuvre de plusieurs ressources documentaires pour comprendre et se lancer dans la démarche. D’une part, les services de l’État (DDT et DREAL) sont en mesure, au-delà de leur rôle de contrôle du bon respect de la réglementation, d’informer les assujettis sur le dispositif. De plus, citons les principales ressources suivantes :

D’autres dispositifs seront développés tout au long de ce dossier.

 

Un article signé Benjamin Choulet, Cerema 
 


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