Construction : Mieux recycler et utiliser les matériaux alternatifs

1278 Dernière modification le 29/10/2021 - 10:48
Construction : Mieux recycler et utiliser  les matériaux alternatifs

Retour sur un article du Cerema paru dans la revue TechniCités, sur le développement du recyclage des matériaux du BTP et leur réutilisation.
Le secteur de la construction et de l’aménagement a un rôle important à jouer dans le développement d’une économie circulaire. Cette réussite commence dès la conception, et se poursuit via la rédaction de l’appel d’offres et le choix des matériaux.

Dans une logique d’économie des ressources naturelles et afin de s’inscrire dans une société du recyclage, des orientations ont été définies au niveau national priorisant la prévention de la production de déchets ainsi que leur recyclage.

Valoriser 70% des déchets : le rôle clé du commanditaire des travaux

Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, il est demandé d’effectuer une valorisation matière de 70 % des déchets en 2020 (code de l’environnement, art. L.541-1).

De plus, à partir de 2020, au moins 60 % en masse de l’ensemble des matériaux utilisés pendant l’année dans les chantiers de construction routiers de l’État et des collectivités territoriales doivent être issus du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage de déchets (loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, art. 79).

Pour répondre à ces objectifs, le commanditaire de travaux, responsable de la prévention et de la gestion des déchets générés dans le cadre de ses chantiers, doit étudier les possibilités de réemploi, de valorisation des déchets et du recyclage de matériaux alternatifs issus de déchets et ainsi, participer activement à la mise en place d’une économie circulaire des matériaux.

 

Par matériau alternatif, on entend tout matériau élaboré à partir de déchets non dangereux et destiné à être utilisé, seul ou en mélange avec d’autres matériaux, alternatifs ou non.

Pour développer l’économie circulaire dans la construction et l’aménagement, les engagements du commanditaire des travaux sont notamment :

  • la prévention des déchets générés par les choix de conception du projet (par exemple équilibre déblais/remblais);
  • le traitement des déchets par des installations de recyclage;
  • la prise en compte systématique de matériaux alternatifs dans les appels d’offres de travaux.

Pour respecter ces engagements, le commanditaire des travaux de construction et d’aménagement doit tout d’abord anticiper la prévention et la gestion des déchets de conception.

Il doit ensuite adapter ses marchés de travaux et contrats et, enfin, mettre en place un contrôle des prescriptions au cours de la réalisation des travaux.

Pour anticiper la prévention et la gestion des déchets générés par le chantier, il est nécessaire, en amont de la rédaction des appels d’offres de travaux, de connaître les déchets qui seront générés. Lors de la réalisation de ce diagnostic prévisionnel, il s’agit d’estimer :

  • la typologie des déchets de conception générés, intégrant les ressources pouvant être réemployées dans le cadre du chantier;
  • les quantités exprimées en tonnes pour chaque typologie, leur localisation sur le périmètre du projet,
  • le phasage d’apparition des déchets en fonction de l’exécution du projet.

Le diagnostic prévisionnel permettra au commanditaire des travaux d’identifier ou de faire identifier les déchets qu’il sera possible d’utiliser dans le cadre de son chantier, ceux qu’il sera possible d’utiliser sur d’autres chantiers locaux ou ceux à diriger vers des installations de recyclage ou autres voies de valorisation. Le dépôt en installation de stockage de déchets ne pourra être étudié qu’en dernier recours pour respecter la hiérarchie des modes de traitement des déchets, notamment si ces derniers ne sont pas conformes au titre de leur évaluation environnementale. 

Cet objectif du commanditaire des travaux en matière de prévention et de gestion des déchets doit être précisé dans ses appels d’offres. Les entreprises ont ensuite l’obligation de proposer des solutions permettant de respecter cet objectif, de préférence sur des chantiers de proximité.

Traçabilité des déchets

Les installations de recyclage des déchets, qui sont généralement des ICPE suivies et contrôlées par les préfectures, sont largement répertoriées, notamment par les préfectures de régions (dans le schéma régional des carrières, SRC), et par les conseils régionaux (dans le plan régional de prévention et de gestion des déchets, PRPGD).

Les appels d’offres de travaux devront prescrire une traçabilité des déchets, du chantier d’origine jusqu’à la filière de valorisation finale; et préciser les performances géotechniques que les matériaux doivent atteindre en fonction de l’usage convoité, sans préciser le type de matériau, le matériau alternatif ne pouvant en aucun cas être écarté pour d’autres raisons que techniques (performances et environnement).

Une fois le marché de travaux attribué, les prescriptions seront mises en œuvre en phase travaux. L’origine et la qualité des matériaux alternatifs entrant sur le chantier devront être contrôlées et la traçabilité des déchets assurée.

En fin de chantier, il est conseillé d’effectuer un bilan de l’opération en comparant les quantités et les destinations estimées avec celles réellement réemployées et valorisées. Ces bilans d’opérations permettront aux commanditaires de travaux d’optimiser la gestion de leurs déchets et la valorisation de matériaux alternatifs de leurs futurs projets.

Concernant les matériaux alternatifs, ils peuvent être utilisés dès lors qu’ils respectent les référentiels de performances de l’appel d’offres de travaux, d’une part, et les prescriptions réglementaires environnementales de mise en œuvre, d’autre part.

Des guides sur l'acceptabilité environnementale des matériaux

Couverture d'un guideAfin de promouvoir la valorisation de matériaux alternatifs en construction et aménagement, le Cerema travaille avec les fédérations professionnelles représentant les entreprises productrices de déchets et consommatrices de matériaux alternatifs, ainsi qu’avec les donneurs d’ordre publics de la construction (conseils départementaux, communes et métropoles) de manière à élaborer les méthodes autorisant leur acceptabilité environnementale et, le cas échéant, sanitaire. 

Ces méthodes sont reconnues par le ministère en charge de l’Environnement et disponibles sur le site internet du Cerema. Les premiers documents édités concernent l’acceptabilité environnementale en technique routière de matériaux alternatifs issus de mâchefer d’incinération de déchets non dangereux (MIDND), de laitiers sidérurgiques, de déchets de déconstruction du BTP, de sables de fonderie et de cendres de centrales thermiques. D’autres travaux sont en cours sur les gisements de sédiments de dragage et de terres excavées en vue d’un emploi en technique routière et équipements associés.

Cette démarche d’acceptabilité environnementale de matériaux alternatifs a également été élargie pour répondre à la construction de plateformes d’activités économiques et de merlons de protection visuelle, acoustique, thermique ou anti-déflagration.

Acceptabilité environnementale de matériaux alternatifs en technique routière - Les cendres de centrale thermique au charbon pulvérisé

 

Acceptabilité environnementale de matériaux alternatifs en technique routière - Les sables de fonderie

 

Acceptabilité environnementale de matériaux alternatifs en technique routière - Les matériaux de déconstruction issus du BTP

 

Acceptabilité environnementale de matériaux alternatifs en technique routière - Les laitiers sidérurgiques

 

Acceptabilité environnementale de matériaux alternatifs en technique routière - Les mâchefers d'incinération de déchets non dangereux (MIDND)

 

Acceptabilité de matériaux alternatifs en technique routière - Evaluation environnementale

 

Recyclage des agrégats d’enrobés dans les mélanges bitumineux à chaud

 

Le recyclage en centrale des enrobés bitumineux

 

Retraitement des chaussées et recyclage des matériaux bitumineux des chaussées

L'acceptabilité environnementale des matériaux alternatifs 

Pour étendre les usages de matériaux alternatifs, deux nouvelles méthodes sont en cours de rédaction : l’une sur l’acceptabilité environnementale et sanitaire de matériaux alternatifs destinés à la construction et en partie supérieure des terrassements sous bâtiment et l’autre sur l’acceptabilité environnementale en travaux maritimes et fluviaux. Ces documents techniques sont destinés aux maîtres d’ouvrage et aux maîtres d’œuvre responsables de l’emploi de matériaux alternatifs dans leurs projets. Ils permettent en outre de présenter aux entreprises de la construction et aux industriels, potentiels producteurs de matériaux alternatifs, les niveaux d’exigence environnementale et sanitaire requis par ces matériaux en fonction de leur usage.

Par ailleurs, ces guides constituent également les référentiels à respecter pour toute sortie explicite du statut de déchets, sous condition de la publication d’un arrêté ministériel. 

Notamment, conformément à l’arrêté ministériel du 4 juin 2021 fixant des critères de sortie du statut de déchet pour les terres excavées, sédiments et ballasts ayant fait l’objet d’une préparation en vue d’une utilisation en génie civil ou en aménagement, les guides dédiés à ces trois gisements permettent de fournir les référentiels environnementaux à respecter.

 

Ainsi, les objectifs nationaux d’économie circulaire passent par la prise en compte, dès l’amont des projets, de la prévention et gestion des déchets, avec une priorité donnée au réemploi et au traitement des déchets dans les installations de recyclage ou autres voies de valorisation puis, de l’utilisation des matériaux alternatifs au sein des chantiers.

L’optimisation du recyclage de matériaux alternatifs est au cœur de l’objectif d’économie circulaire porté par les pouvoirs publics. Elle permet en outre au porteur de projet de faire valoir son engagement d’acteur responsable, de faciliter l’acceptabilité sociale de ses projets sur le territoire et de contribuer à la consolidation de notre société du recyclage.

 

Article rédigé par Agathe Denot, Responsable d'études Économie Circulaire et Préservation des Ressources.

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