Comment limiter la hausse des températures l’été dans nos habitats sans aggraver le réchauffement climatique ?

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Cercle Promodul/INEF4 Communication

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878 Dernière modification le 07/05/2020 - 09:10
Comment limiter la hausse des températures l’été dans nos habitats sans aggraver le réchauffement climatique ?

Avec une température moyenne mondiale supérieure à 1,1°C, 2019 est devenue la deuxième année la plus chaude de l’ère industrielle [1]. Et alors que l’Accord de Paris prévoit de limiter la hausse des températures en dessous de 2°C d’ici 2050, l’Organisation Météorologique Mondiale indique que « depuis les années 1980, chaque année a été plus chaude que la précédente » [2], laissant supposer, si rien n’est fait, une augmentation de 4 à 5°C d’ici la fin du siècle.

CHANGEMENT CLIMATIQUE ET VAGUES DE CHALEUR

Il s’agit désormais de composer avec des contraintes qui deviennent de moins en moins exceptionnelles, et qui s’imposent comme une nouvelle norme : les vagues de chaleur et épisodes de canicule reviennent plus fréquemment et avec davantage d’intensité, laissant envisager une « augmentation très probable du nombre de jours de vagues de chaleur au 21ème siècle » [3].

Source image : « En 2050, des pics à 55 degrés dans l’Est et le Nord« , journal du Dimanche, Août 2017

D’après une étude menée par sept chercheurs français (du Cerfacs, du CNRS, et de Météo France[4], si rien n’est fait pour enrayer le réchauffement climatique, l’augmentation des températures en France pourrait amener à des records de chaleur comme présenté dans la carte de droite dès 2050 (le « scénario du pire », qui prévoit une hausse de la température moyenne globale d’au moins 3,7 degrés par rapport à l’ère préindustrielle d’ici à 2100).

Ces pics de chaleur répétés auront des impacts non négligeables, à la fois sur notre santé, notre productivité, notre confort mais également sur les écosystèmesD’où la nécessité de prendre des mesures rapidement et de mettre en place des solutions de bon sens.

LIMITER L’IMPACT ENVIRONNEMENTAL : TENDRE VERS LA PASSIVITÉ DES BÂTIMENTS

Il est en effet illusoire d’envisager le recours à la climatisation comme seule réponse à la hausse des températures, tant d’un point de vue énergétique qu’environnemental.

En effet, l’utilisation de la climatisation amène à un véritable paradoxe : plus il fait chaud, plus il y a de climatiseurs et plus il y a de climatiseurs, plus il fait chaud. Les systèmes de climatisation sont très consommateurs en énergie ce qui entraîne une hausse des émissions de gaz à effet de serre qui contribuent à réchauffer encore plus la planète (l’Agence Internationale de l’Energie, dans un rapport de 2018, prévoit que le développement de l’air conditionné dans les pays émergents provoquera un doublement des émissions de CO2 liées à la climatisation d’ici à 2050) [5].

De plus, les climatiseurs favorisent le réchauffement des villes car chaque appareil rejette dans la rue la chaleur extraite du bâtiment dans l’espace urbain. Une étude de 2014 a simulé la hausse de température, de nuit, à un 1°C en centre-ville [6].

Ce phénomène est d’autant plus important à prendre en compte car vient renforcer les « Îlots de Chaleur Urbains » (ICU). Ces îlots thermiques aggravent l’effet des vagues de chaleur en ville, puisque selon les aménagements urbains ou les matériaux utilisés, la chaleur va se retrouver stockée, sans possibilité de rejet [7].

Partant donc d’un postulat simple que « l’énergie la moins polluante est celle que l’on ne consomme pas », les techniques de rafraîchissement passif en été permettent de réduire au maximum les besoins énergétiques des bâtiments sans restreindre le confort des usagers.

Des solutions architecturales aux solutions techniques, les systèmes passifs sont pensés pour compléter (et parfois remplacer ou suppléer) les systèmes actifs existants. Il s’agit avant tout de faire bénéficier aux usagers d’un excellent confort climatique tout en minimisant, autant que faire se peut, le recours à une climatisation conventionnelle.

Il est donc primordial de prendre en considération un ensemble d’éléments pour maximiser les effets d’un tel rafraîchissement :

  • tenir compte de l’environnement direct d’un bâtiment (climat, végétalisation, ambiance minérale, parois réfléchissantes, organisation de l’espace urbain) ;
  • tenir compte de la structure du bâtiment (orientation, pièces traversantes avec des ouvertures en opposition, choix des matériaux, protection solaires et isolation efficace etc.) ;
  • tenir compte des systèmes technologiques déjà existants (ventilation mécanique ou naturelle, gestion automatisée ou pas des fermetures, puits géothermiques etc.).

Si cette anticipation peut aisément se faire pour les constructions neuves, le parc bâti existant ne doit pas être oublié pour autant. Cette résilience est essentielle : on estime à plus de 20 millions le nombre de logements à rénover d’ici 2050 (correspondant à l’objectif bas carbone de la France) [8]La rénovation thermique des bâtiments doit être « un levier à la fois pour faire baisser les émissions de gaz à effet de serre et pour adapter les territoires aux impacts négatifs du réchauffement » [9].

 

« Les constructions réalisées aujourd’hui seront en effet pour la plupart d’entre elles toujours utilisées dans cinquante à cent ans, à une époque où les problèmes posés par les dérèglements climatiques seront vraisemblablement beaucoup plus aigus qu’aujourd’hui. Par conséquent, si l’on continue à construire des bâtiments ou des quartiers en se basant seulement sur les chroniques du climat passé, on ne fait rien d’autre que construire les villes invivables de demain » [9].

FAIRE ÉVOLUER LES COMPORTEMENTS

Atténuer la chaleur ressentie dans nos bâtiments ne dépend pas uniquement des améliorations à apporter sur les structures ou sur les équipements. Nos comportements jouent également un rôle fondamental et doivent évoluer rapidement.

Car si l’émergence de la climatisation dans les années 1970 a révolutionné notre définition du confort, en incluant une idée de facilité [10], nos habitudes peuvent être difficiles à changer (mais pas impossible !). Nos comportements sont par définition, complexes : ils vont dépendre de notre culture, de notre perception et de certaines données qui nous sont propres (âge, sexe etc.).

Il est donc difficile d’en établir une homogénéité, d’autant qu’ils renferment dans le même temps certaines contradictions [11] :

  • Nous avons à la fois le désir de ne s’occuper de rien, de laisser les équipements gérer le confort intérieur permettant d’atteindre la température désirée ;
  • Mais également le besoin de pouvoir prendre la main sur la technique, lorsque cette dernière ne nous convient pas totalement (augmenter ou baisser la température de la climatisation).

Des gestes simples sont tout de même recommandés et faciles à mettre en place pour atténuer le ressentit des fortes chaleurs dans nos habitats, et ainsi modifier notre rapport aux solutions technologiques : anticiper la fermeture des fenêtres et volets lors des fortes chaleurs, faire circuler l’air la nuit, éviter l’utilisation d’appareils ménagers qui produisent de la chaleur etc. [12].

C’est donc une combinaison intelligente de ces deux composantes (rafraîchissement passif et évolution de nos comportements) qui donnera plus de résilience au bâtiment, lui permettant ainsi de tendre vers davantage de durabilité.

Sources : 

[1] Actu environnement – Les indicateurs climatiques mondiaux battent des records en 2019

[2] Le Monde – Climat : l’année 2019 devrait conclure la décennie la plus chaude jamais enregistrée

[3] Météo France – Changement climatique et vagues de chaleur

[4] CERFACS – Les canicules extrêmes en France dans la deuxième moitié du 21ième siècle et le seuil de 50°C

[5] Sud Ouest – Canicule : d’où vient la climatisation ? Et pour le climat, est-ce bien la solution ?

[6] Sciences et Avenir – Le paradoxe des climatiseurs qui réchauffent la planète

[8] FFB – Le défi de la rénovation énergétique

[9] Rapport d’information du Sénat sur l’adaptation de la France aux dérèglements climatiques à l’horizon 2050, par MM. Ronan DANTEC et Jean-Yves ROUX.

[10] The Conversation – Boom de la climatisation : des pistes pour éviter la surchauffe planétaire

[11] Cercle Promodul / INEF4 – Les Sciences Humaines et Sociales : un allié majeur de la rénovation énergétique des bâtiments

[12] ADEME – Garder son logement frais en période de forte chaleur

Article publié sur Promodul
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