Faire avancer un territoire : le rôle des imaginaires dans la gouvernance territoriale

L’imaginaire urbain renvoie à des sphères de désirs et de représentations que nous nous faisons du futur. Nos territoires sont ainsi forgés par ces imaginaires, qui se croisent, se mêlent et se confrontent. Les politiques publiques en sont leur incarnation, s’inspirant à la fois de certains désirs technologiques pour certains, de désirs écologique et décroissant pour d’autres. Néanmoins, il est nécessaire de comprendre que la force et pertinence de ces imaginaires est variables. C’est ainsi que certains désirs sont des constructions pour justifier certaines politiques territoriales. Il est donc important d’alimenter et mettre en perspective continuellement ces imaginaires territoriaux pour une fabrique de la ville toujours plus appropriée et durable.

Dessine-moi une ville, ou la place de l'imaginaire dans la fabrique de la ville de demain

La place de l’imaginaire dans la fabrique urbaine et territoriale, proue des politiques publiques


Utopies, dystopies, rêves, cauchemars, la ville a été, et est toujours, un sujet qui a fait écrire. Ces différentes projections tentent d’écrire ce que pourrait être nos territoires et sociétés de demain – souvent effrayante. Parmi ces scénarios, Georges Orwell nous narre par exemple une gouvernance de la tout-surveillance alors qu’Alain Damasio se projette dans un territoire tout numérique et privatisé dans Les Furtifs.

 Cependant, ces auteurs ne sont pas les seuls opérateurs d’imaginaires urbains. Ce sont bien tous les acteurs territoriaux qui les forgent au quotidien. Ce sont les fusions, les mélanges mais aussi les confrontations de ces différentes idées et désirs qui bâtissent les prémices des transformations de nos territoires. Par exemple, le désir d’une mobilité plus propre se décline à travers plusieurs imaginaires : les véhicules autonomes sont associés à un imaginaire d’une technologie avancée alors que les partisans de la dé-mobilité sont animés par une idée plus locale du territoire.

L’imaginaire a donc une place centrale dans la fabrique urbaine et territoriale. Il est à la fois une source d’inspiration pour les politiques publiques mais aussi parfois une justification.

 

Désir écologique et imaginaires, une destination et plusieurs voies


L’imaginaire est donc un outil non négligeable pour forger les politiques publiques et amorcer des transformations territoriales. Les sujets de transition écologique sont au cœur de ces stratégies de narration et de branding. Aujourd’hui plus que jamais, le préfixe éco- se conjugue à toutes les échelles : éco-quartier, éco-city, éco-mobilité, etc. La question se porte néanmoins sur la véritable pertinence de ces choix écologiques, sociétaux et surtout politiques.

Il s’agit donc de s’intéresser et de déconstruire les différents désirs et biais culturels qui façonnent une politique donnée pour comprendre les réels intérêts de la naissance de ces politiques et les acteurs territoriaux impliqués.

Exemple : Masdar, un rêve urbain en plein désert ou un mirage technologique ?
Masdar City est une ville nouvelle « verte » de l’Emirat d’Abou Dabi aux Emirats arabes unis. Situé en plein désert, cette cité à 15 milliards de dollars s’étend sur 6,5km2 et compte accueillir 50 000 habitants. Réseau de transport bas carbone, énergies renouvelables, stratégie zéro déchet, la ville veut devenir l’incarnation de l’imagine de ce que sera la ville verte de demain.

Cette cité laboratoire pose néanmoins certaines questions. Bien qu’elle soit une prouesse technologique, le coût de construction de la ville mais aussi son accessibilité pose des problèmes, créant une sorte de ghetto vert où la transition écologique ne serait accessible qu’aux plus riches, et donc peu pertinent. Ce modèle écologique urbain peut donc être plus assimilé à un mirage qu’à un imaginaire atteignable par tous.

 

Pour un futur collectif, construisons un imaginaire collectivement


Futur collectif, futur local et humain ?


Aujourd’hui, la majorité des politiques de développement durable et de fabrique territoriale sont guidées par des principes de développement à large échelle, de compétitivité et d’attractivité. Penser un futur collectif et plus bienveillant nécessite donc aussi de penser et construire des scénarios plus locaux et humains. Les collectivités territoriales et acteurs locaux ont donc un rôle fondamental à jouer dans cette transition plus bienveillante et réaliste, loin du solutionnisme global que proposent certains acteurs.

S’intéresser à l’histoire, la culture et l’identité particulière d’un territoire, le tout au pluriel, est essentiel pour mener à bien des politiques territoriales. Hors du sentier des « bonnes pratiques », il s’agit aujourd’hui de penser à des politiques appropriées et appropriables, pertinentes pour son territoire. La participation citoyenne et des diagnostics territoriaux approfondis en sont la clé.

 

L’atelier collaboratif, le temps et le lieu idéal pour co-construire un imaginaire par et pour toutes et tous


Afin d’éviter la panne, l’appauvrissement ou la redondance de représentations urbaines et territoriales, il est nécessaire de mener plusieurs actions collectives pour un questionnement, un travail et une création continue de ce que pourrait être les territoires de demain.

Le futur mérite d’être co-construit car il est sujet de toutes et tous. L’atelier permet donc à toutes et tous d’être opérateur d’imaginaire. Ce levier permet donc de réunir et fédérer une population derrière un imaginaire, un désir et un projet de société commun, grâce à un travail collectif. Il est ainsi intéressant de développer cette méthode de concertation et création à l’avenir pour proposer des politiques territoriales toujours plus cohérentes et pertinentes pour nos villes, et bâtir un avenir plus bienveillant et collectif.

Actualité publiée sur Ville E+
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