Le MOOC, accélérateur de business ? Le cas du bâtiment (2)

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On l'a vu, les modèles économiques du MOOC sont nombreux et loin d'être stabilisé. Il est intéressant d’imaginer à ce stade un scénario adapté au monde du bâtiment.

Des modèles complémentaires

Scénario “blended MOOC” : alliance MOOC et formations en présentiel

Le principe est de trouver une alliance directe entre le MOOC et les organismes de formation. Cette alliance porte à la fois sur le modèle économique et sur le modèle pédagogique (notion de “blended” ou mélangé).

Ce scénario peut se décliner ainsi :

  • une personne ayant une attestation de réussite sur un ou plusieurs MOOC bâtiment durable peut s’inscrire à une formation certifiante et qualifiante complémentaire dans un organisme de formation partenaire.

  • la liste des organismes partenaires proche d’elle lui est indiquée (utilisation géolocalisation, pour que cela soit adapté à son besoin)

  • Pour chaque nouvel inscrit, l’organisme rémunère la plate-forme : le MOOC est un moyen “d’apporter des affaires” aux organismes de formation partenaires.


Au niveau pédagogique, il s’agit de multiplier les passerelles entre le "offline" et le "online". Les MOOCs sont un complément à ces formations, qui s’insère dans un environnement où la formation tout au long de la vie devient un enjeu prioritaire. Dans ce scénario, les organismes de formations sont pleinement concernés et associés à la définition pédagogique des MOOCs.

Pour l’organisme de formation, cela permet de diversifier les approches pédagogiques. Concrètement, pour le public qui a suivi le MOOC, l’organisme de formation adapte son offre pédagogique : plus courte et plus pointue, plus orientée “travaux pratiques” (manuels ou théoriques) considérant que la partie théorique est déjà en partie acquise... C’est une l’opportunité de toucher une clientèle qui ne venait jusqu’à présent pas en formation, par manque de temps par exemple. C’est un moyen de faire la promotion de parcours long. Pour les OPCA, ce type de parcours répond aux exigences de la réforme de la formation continue puisque certifiante pour les personnes qui s’engagent dans un parcours riche. Enfin, c’est une occasion d’entamer la transition numérique dont il était question en début d’article.

Pour le stagiaire, c’est la possibilité d’avoir un temps présentiel plus court et plus riche. Il vient en cours en salle avec des questions, un bagage théorique accumulés pendant les semaines précédentes. Il développe ses compétences grâce à l’apprentissage de la mise en oeuvre sur des plateaux techniques.

Ce modèle s’intéresse à un public de professionnels : seuls ceux-ci sont susceptibles d’aller suivre une formation payante et certifiante/qualifiante. Les ménages (et les professionnels dont la formation n’est pas essentielle à leur métier) ne constituent pas un public susceptible de payer.

Scénario apprentissage online et examen en salle

Le scénario précédent peut être également décliné de manière simplifiée : seul un examen est passé en présentiel, afin d’obtenir une qualification ou une certification. Le passage de cet examen est payant. Pareillement, l’organisme qui fait passer cet examen rétribue la plateforme quand celle-ci lui a permis d’avoir un candidat.

Dans le secteur du bâtiment, cette modalité pourrait être envisagée pour l’obtention du signe de reconnaissance “Reconnu Garant de l’Environnement” (RGE étude et RGE travaux). L’obtention du signe de qualité a été rendue possible par le passage d’un QCM (en alternative à un formation présentielle de 3 jours).

Concrètement, la formation correspondant à l’obtention du RGE serait mise en MOOCs, et les apprenants qui auraient suivi le MOOCs (ou une majeure partie) auraient la possibilité de passer un QCM en salle dans un centre de formation.

Scénario freemium

Dans cette approche, l’accès au MOOC est gratuit, mais  des services supplémentaires sont payants.
Les services de ces modèles sont classiquement par exemple :

  • la correction des copies. Au-delà de l’auto-évaluation, de l’évaluation par les pairs et des QCM, un correcteur professionnel permet de corriger le travail. 

  • le coaching et le tutorat favorisant le maintien de l’engagement : suivi personnalisé permettant de conserver la motivation, de lever les difficultés… bref, d’obtenir de meilleurs résultats. 

  • la certification payante.
  • etc.

Scénario MOOC pour les ménages apporteur d’affaire pour les professionnels

Un MOOC est également un formidable outil de communication aussi bien en direction du grand public avec des MOOC favorisant la demande, qu’en direction des professionnels pour valoriser la filière et attirer des profils dans les métiers/compétences en tension.

Un MOOC en direction du grand public qui permette à tout un chacun de définir son projet de rénovation en liaison avec les structures publiques d’accompagnement locale (Points Rénovation Info Service et plate-formes locales de la rénovation énergétique…). Les ménages qui suivent un MOOC pour monter leur projet de rénovation énergétique, qui travaillent sur ce projet de manière collaborative, constituent déjà des prospects qualifiés pour les professionnels du bâtiment.

Plusieurs solutions :

  • soit il s’agit de structurer le MOOC pour qu’il devienne un lieu de rencontre, avec géolocalisation. La mise en relation entre ménages et professionnels se fait de manière naturelle : les professionnels qui participent au MOOC en apportant leur savoir faire ont accès à de potentiels clients ;

  • soit il s’agit de valoriser les données accumulées : un projet qualifié constitue une information qui est monnayable auprès de professionnels, à l’image de certains sites internet (quelleenergie.fr, calculeo.fr…).


Cette piste a le mérite de s’approcher de ce que nous souhaitons au final : susciter l’émergence de la réalisation de projets de rénovation.
Elle a l’inconvénient de poser des questions en termes de déontologie (exploitation des données de personnes qui veulent d’abord apprendre et pas forcément être mises en contact avec des professionnels…) et crédibilité morale (risque de voir des professionnels participer uniquement par intérêt commercial...).

Dans ce cas, le modèle économique nécessite de penser le scénario pédagogique comme étant d’abord destiné aux ménages (contrairement aux scénarios précédents, qui étaient plus tournés vers les professionnels).

Scénario valorisation

Il est assez évident qu’il pourrait être intéressant pour des industriels de chercher à développer des MOOCs pour valoriser les matériels et matériaux qu’ils vendent.

Cela pose une question importante de neutralité commerciale du contenu des MOOCs : un mécanisme doit garantir cette neutralité, au risque sinon que les MOOCs se transforment en gros spot de publicité.

Cependant, sans placer leurs produits dans le contenu des MOOCs, les industriels peuvent être intéressés à participer au financement des MOOCs en contre-partie, par exemple, de l’association de leur logo au MOOC financé (sur la page d’accueil etc.). On peut supposer qu’au regard des coûts (très limités en comparaison avec une campagne de publicité conventionnelle) et de l’audience large et qualifiée que les MOOCs sont susceptibles de créer, ils y trouvent un intérêt important au point de pouvoir en financer une bonne partie. Mais associer une/des marque(s) à un MOOC, ne serait-ce pas déjà trop en matière de rupture de la neutralité commerciale ?

Scénario privatisation des MOOCs

Comme expliqué précédemment, certains entreprises voient un intérêt à privatiser un MOOC (pour en faire un “SPOC”). Ce cas peut peut-être s’appliquer au bâtiment.

Par exemple, les négociants en matériaux pourraient être intéressés à privatiser certains MOOCs afin de pouvoir les proposer aux professionnels qui sont leurs clients. En effet, la distribution s’est largement engagée dans l’aide à la formation, comme un moyen d’apporter des services à leurs clients.

Scénario mixte

Toutes ces sources de revenus peuvent évidemment être mixées, en fonction des publics, des MOOCs...

Conclusion provisoire

Oui, il y a des modèles économiques. Oui, cela demande un investissement initial important. Mais il faut voir cet investissement dans un cadre plus large qui est celui de la transition numérique du secteur.

A ce stade, la conclusion est probablement inconfortable : nous ne connaissons pas le business model qui pourrait fonctionner pour le cas des MOOCs dans le bâtiment durable.  Il sera nécessaire de tester, à la manière des start-up, les moyens d’une monétarisation de la valeur ajoutée de ce outil.

Il n’y a sûrement pas un business model idéal et il convient d’en inventer un en essayant des combinaisons adaptées à nos attentes et objectifs. On le voit bien, le MOOC n’est pas un objet monolithique, mais un moyen de moderniser l’offre de formation. En la matière nous sommes condamnés à innover.

Ces pistes sont là pour vous faire réagir….

  • Que pensez vous d’une plate forme technique et pédagogique mutualisée ?
  • Quel modèle est le plus approprié pour le secteur bâtiment durable ?
  • Avez vous d’autres pistes de réflexions ?

Premier article : Le MOOC, accélérateur de business ? état de l'art (1)


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