Santé, confort, économies : la qualité d'air intérieur a le vent en poupe

Santé, confort, économies : la qualité d'air intérieur a le vent en poupe

 

Ce n’est plus à prouver, une bonne qualité de l’air intérieur dans un bâtiment est absolument indispensable, autant pour la santé de ses habitants que pour assurer confort et économies. C’est notamment pour cela que des organismes tels que le Cerema œuvrent sur le terrain pour défendre l’importance de la ventilation et de l’aération dans le tertiaire comme dans les maisons individuelles. Le point sur le sujet avec Cécile Caudron, Responsable de projet Performances des bâtiments et Qualité de l'Air Intérieur. 

 

 

C21 : Pensez-vous que l’importance de la qualité de l’air intérieur (QAI) dans les bâtiments est assez reconnue en France à ce jour ?


Cécile Caudron : Les collectivités territoriales ne peuvent pas toujours prendre en compte le sujet de la qualité de l’air autant qu’elles le voudraient à cause des coûts associés, dans cette période de tension financière et énergétique qui oblige à revoir ses priorités. 

Pour autant, elles connaissent de mieux en mieux cet enjeu. D’une part, par l’effet de la crise sanitaire, avec certains gestes barrières qui ont aidé à prendre conscience de l’importance du renouvellement de l’air. D’autre part, grâce à des effets d’annonce, qui ont notamment eu pour effet l’achat de capteurs de CO2 dans les écoles, en partie subventionnés par l’Etat. Plus récemment, la sortie du PNSE 4 – Plan National Santé Environnement – en mai 2022 a proposé de mettre à jour la réglementation concernant la qualité de l’air intérieur. Enfin, deux décrets sur la surveillance obligatoire de la QAI sont parus à la fin du mois de décembre. 

En France, la problématique de la QAI a été mise sur le devant de la scène depuis les années 2000. Mais ces changements récents ont vraiment donné un coup d’accélérateur sur le sujet et ont déclenché une prise de conscience généralisée.
 

Quels sont les leviers principaux d’amélioration de la qualité de l’air dans les bâtis ?

CC : En termes de priorité d’action, nous préconisons en premier lieu de limiter les sources de pollution de l’air. Pour cela, il s’agit notamment d’utiliser des matériaux de construction, des produits et du mobilier moins émissifs, mais aussi d’effectuer un travail sur les usages – éviter d’utiliser des produits émettant des polluants, aérer au bon moment… –, ce qui requiert de la communication et de l’accompagnement. 

Ensuite, il faut bien sûr renouveler l’air. Cela passe par la ventilation et l’aération, qui sont deux leviers complémentaires. Les travaux que nous avons menés récemment confirment que l’installation d’une ventilation efficace est essentielle pour une bonne qualité de l’air chez soi. Nous ne préconisons pas un système de ventilation en particulier, le tout est d’adopter un équipement adapté à son logement, bien calibré et avec les bons débits. L’entretien de ce matériel est très important pour qu’il puisse durer dans le temps. 
 

Quels matériaux faut-il utiliser en priorité pour améliorer la qualité de l’air dans les bâtiments ?

CC : Depuis le 1er janvier 2013, il existe un étiquetage sanitaire obligatoire sur les matériaux de construction, mais aussi de décoration par exemple, sur lequel le grand public peut facilement s’appuyer. En choisissant les produits répertoriés A+ voire A, on s’assure de limiter l’impact sur la qualité de l’air intérieur. On constate que les fabricants ont fait beaucoup d’efforts sur ce sujet, et le choix est assez large. Bien entendu, il est aussi possible de s’appuyer sur les labels existants ou sur les FDES. 
 

Y a-t-il une typologie de bâtiments sur le territoire français dans laquelle la qualité de l’air doit être améliorée en priorité ?

CC : Il n’y a pas forcément de bâtiments plus sujets à cette problématique, cependant, il existe une typologie de population davantage exposée : il s’agit en premier lieu des enfants. Les plus petits notamment sont très sensibles à tout type de pollution, étant toujours au sol, avec un organisme encore en plein développement. Il faut donc les protéger au maximum. C’est d’ailleurs pour cela que la réglementation s’est focalisée dans un premier temps principalement sur les établissements accueillant ce type de publics (les crèches, les écoles…)

Pour rappel, la pollution de l’air intérieur regroupe non seulement les composés organiques volatiles, mais aussi tous les pollens, moisissures, les polluants physiques comme les particules fines ou encore les fibres, qui provoquent des allergies. Les impacts peuvent aller de la simple gêne à des pathologies qui peuvent être très graves.  
 

Les professionnels du BTP sont-ils assez formés à ces enjeux ?

CC : Il existe bel et bien des formations pour les professionnels au sujet de la QAI, notamment proposées par le Cerema qui continue de monter lui-même en compétences à ce propos. Mais il reste des efforts à faire pour aller encore plus loin, notamment en formation initiale. Nous sentons d’ailleurs qu’il y a de la demande et de l’intérêt pour ce sujet de la part des entreprises. 

Par ailleurs, même s’il existe des entreprises spécialisées dans la ventilation – surtout dans le tertiaire et peu pour la maison individuelle –, il n’existe pas encore ce fameux métier reconnu de « ventiliste » à ce jour. Pour le logement, cela est principalement lié à une question de rentabilité : les équipements ne sont pas très coûteux, et sont généralement embarqués dans une masse de travaux. Pour de petits projets de travaux uniques de ventilation, ce n’est donc généralement pas un professionnel spécialisé sur le sujet de la qualité de l’air qui intervient. 

Je garde tout de même un œil optimiste sur le sujet. Nous sentons que les choses évoluent dans le bon sens
 

Par quelles actions concrètes le Cerema fait-il progresser la qualité de l’air dans les bâtiments publics aujourd’hui ?

CC : Le Cerema mène plusieurs actions pour répondre à ces différents enjeux :

  • Un accompagnement auprès des collectivités locales sur la problématique de la qualité de l’air intérieur, en répondant à leurs interrogations ou en les aidant à s’informer et mettre en place la réglementation en vigueur, ou encore à diagnostiquer leur QAI, optimiser leur QAI et leurs consommations d’énergie, mesurer la QAI dans leurs locaux, etc.
  • Un travail de recherche et d’expertise pour faire avancer les connaissances sur ces sujets, en mettant à disposition des ressources sur nos différents supports ;
  • Nous pouvons également mettre en place des formations spécifiquement créées pour une entreprise ou une collectivité, en s’adaptant à ses problématiques.
     

Avez-vous des projets futurs à nous signaler pour l’année 2023 en ce sens ?

CC : Nous copilotons actuellement avec l’IFPEB le « Hub Air Energie ». Ce projet dure 24 mois et a pour vocation d’accompagner des collectivités et des bâtiments tertiaires pour les aider à faire un état des lieux puis améliorer la qualité de l’air intérieur de leur bâti, tout en maîtrisant leur consommation d’énergie – et pourquoi pas même faire des économies !  

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Rédigé par

Amandine Martinet - Construction21

Journaliste

Modérateur

Soline Fahmy

Chargée de communication ville durable