Les eaux grises, un carburant peu exploité

4576 France - Dernière modification le 04/01/2023 - 13:00
Les eaux grises, un carburant peu exploité


Récupérer les calories des eaux usées grises pour produire de l’eau chaude sanitaire. C’est désormais une réalité éprouvée. Exemple avec Quai d’Ivry, une résidence étudiante de 92 chambres livrées en 2020. Une solution qui coule de source pour décarboner.

Au bord des quais de Seine, dans le quartier en pleine construction du 13e arrondissement de Paris, se trouve la résidence étudiante Paris Quai d’Ivry (Linkcity, RRP et RIVP) conçue par l’agence d’architecture Ameller Dubois. Son originalité : fournir l’intégralité des besoins en eau chaude sanitaire des étudiants via un système de récupération de chaleur fatale des eaux grises. Le principe est simple puisqu’il combine un réseau spécifique de collecte des eaux grises du bâtiment avec des pompes à chaleur dites « eau/eau » à haute efficacité pour la production d’eau chaude sanitaire à une température supérieure à 55°C. « Une économie conséquente sachant que la part de l’eau chaude sanitaire représente déjà 50% de la consommation globale du bâtiment et deviendra prépondérant dans un avenir proche avec les améliorations des enveloppes thermique du bâtiment », argumente Jérôme Gonçalves, responsable commercial chez Solaronics ECS.

Concrètement 

Dans les faits, les eaux des douches, baignoires, éviers, lave-linges et lave-vaisselles sont récupérées et filtrées avant d’être stockées (entre 25°C et 35°C tout au long de l’année) dans une cuve de 8 900 litres qui alimentent les pompes à chaleur.
« Les eaux grises sont le carburant de la pompe à chaleur, l’énergie primaire », poursuit Jérôme Gonçalves. La récupération de la chaleur fatale des eaux grises par les pompes à chaleur permet d’élever la température de l’eau de ville à 58°C et de se prémunir de tout risque de légionellose. L’eau de ville ainsi montée en température est stockée dans des ballons d’eaux chaudes calorifugés (sept sur ce site d’une capacité de 1 000 litres chacun) avant d’alimenter les logements étudiants. La consommation moyenne de ce site est de l’ordre de 10 à 13 m3 par jour.

La pompe à chaleur utilisée affiche un COP théorique de 6,4 et un COP réel moyen annualisé de 5 en exploitation – NDLR pour 1 kWh électrique consommé, une pompe à chaleur produit 6,4 kWh thermique. « Le taux d’énergie renouvelable de l’eau chaude sanitaire produite est d’environ 80%. Les 20% restants servent à alimenter les pompes, les compresseurs et les auxiliaires du système. Au final, nous divisons la consommation énergétique du poste ECS par 5 ». Elle est également dotée d’un mélange spécifique zéotrope de deux fluides frigorigènes en adéquation avec le seuil réglementaire de 2030 (le potentiel de réchauffement global (WGP) est d’environ 145 kg CO2 /kg fluide).

D’autres installations à suivre

Le système, appelé PAC Facteur 7, fonctionne sur ce site depuis deux ans avec une intervention de maintenance tous les trois mois consistant essentiellement à du nettoyage. « Tous nos sites sont monitorés en continu depuis le nord de la France. Et bénéficient d’une maintenance prédictive ». Il est conseillé de positionner le local technique en point bas du bâtiment pour collecter les eaux grises par gravité et ainsi éviter leur relevage vers le système PAC Facteur 7. Solaronics ECS compte une vingtaine de références comme ABC La Montagne à Grenoble, la Tour Skylight à Puteaux ou encore la Maison des Etudiants de la Francophonie de la Cité Universitaire à Paris XIVe. D’autres viendront comme l’Îlot Fertile d’Eole Evangile à Paris XIXe ou une résidence de 99 logements à Torcy. Dans le XIVe arrondissement de Paris, un tout premier chantier de transformation de bureaux de l’Institut de Mines-Télécom en 96 logements vient de démarrer – ce qui inaugure également des opportunités dans la transformation d’usage de bâtiments.

Le système PAC Facteur 7 est essentiellement destiné aux logements collectifs, à l’hôtellerie et aux équipements publics, mais il pourrait tout aussi bien être envisagé pour des usages industriels comme les laveries collectives, les conserveries… L’investissement reste tout de même important : de l’ordre de 2 500 euros par logement pour un bâtiment de 100 logements avec un retour sur investissement sur une dizaine d’années. Cependant, le taux EnR important du système ouvre la possibilité de son financement par le Fond chaleur de l’Ademe ramenant ainsi l’investissement initial à 1 800 euros par logement. « Il devient véritablement pertinent à partir de 100 logements », indique Rémy Rochard, directeur général associé. 

Bref, une solution qui coule de source pour décarboner avec les eaux grises !

En vidéo ! 


 

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Rédigé par

Stéphanie Obadia

Directrice de la rédaction

Modérateur

Alexia ROBIN

Responsable Communication-Evénementiel