Fonds d'arbitrage carbone d'Eiffage : un mécanisme astucieux pour réduire les émissions de GES

1202 Maroc - Dernière modification le 24/03/2017 - 14:43
Fonds d'arbitrage carbone d'Eiffage : un mécanisme astucieux pour réduire les émissions de GES

Responsable ingénierie durable chez Eiffage, Joachim Lémeri était présent au MIPIM, lors de la conférence "Cities against climate change: what actionable solutions?" organisée par Construction21 et Green Planet Architects. Lors de son intervention, il a évoqué le Fonds d'arbitrage carbone développé par Eiffage. Il répond ici à nos questions à propos de cet outil particulièrement innovant.

1. Qu’est-ce que le fonds d’arbitrage carbone (FAC) et qu’introduit-il de nouveau dans votre approche des marchés ?

C’est un fonds sélectif de financement des différentiels de coûts entre des solutions innovantes bas carbone et des solutions traditionnelles. Cet outil, créé par le groupe Eiffage en 2010 et expérimenté lors du chantier de la ligne TGV entre Le Mans et Rennes entre 2012 et 2015, représente un effet de levier dans la réduction de l’empreinte carbone d’une opération : il permet en effet de lever le verrou financier que peuvent représenter des solutions (techniques, matériaux,…) moins carbonées. Volontaire et autofinancé en interne, le fonds d’arbitrage carbone-énergie d’Eiffage (E-FACE) est désormais généralisé à l’ensemble du groupe depuis début 2017. Outil d’innovation, il vise à encourager la recherche de solutions moins émissives en GES ou économes en énergie, dans un secteur non soumis au marché carbone et dont les logiques industrielles ne permettent pas toujours de réinterroger les standards et les pratiques. Enfin, il installe la variable « carbone » comme paramètre complémentaire clef dans l’analyse et la comparaison des techniques et des technologies, aux côtés d’autres critères habituels.

2. Sur un sujet aussi transverse et une opération de cette ampleur, comment impliquer tous les acteurs ?

Tout acteur de l’entreprise, qu’il soit ingénieur technique, environnementaliste, QSE, directeur de projet ou de travaux, conducteur d’opérations, responsable technique ou de l’innovation, ou encore acheteur…peut soumettre une solution bas-carbone en candidatant sur une plateforme interne accessible à tous. La solution, en mettant en avant les émissions carbone évitées et le coût de cet évitement, est soumise à l’analyse d’un comité de validation interne. Lorsque le coût de la tonne de CO2 évitée est suffisamment bas, la solution est automatiquement financée. C’est assurément un moyen pour chaque fonction opérationnelle et fonctionnelle de l’entreprise de développer l’innovation et de favoriser des retours d’expériences qui pourraient inspirer de nouvelles solutions pour d’autres opérations voire d’autres activités de l’entreprise. L’étalon du coût de la tonne de CO2 évitée permet des comparaisons plus aisées et une émulation entre les équipes.

3. Quels sont les premiers retours d’expérience de ce premier fonds d’arbitrage carbone ? Est-il réplicable et à quelle échelle ? 

Lors de la réalisation du projet de la ligne TGV Le Mans Rennes, entre 2012 et 2015 (LGV dite « BPL », pour Bretagne – Pays-de-Loire), 54 demandes de financement via le fonds carbone BPL ont été enregistrées, et 22 solutions ont été retenues. Durant les travaux, ce sont ainsi 14 000 tonnes eq.CO2 qui ont été évitées grâce au fonds, soit l’émission due à la construction de près de 2 km de LGV, ce qui représente les émissions annuelles du célèbre rallye du Paris-Dakar. La mise en œuvre du fonds carbone, une première, dans ce grand projet multi-métiers, a ainsi permis d’avoir un retour d’expérience probant, qui a fait l’objet d’un focus en mai 2016 au sein de la publication « Carbon Footprint of Railway Infrastructure » publiée par l’UIC (International Union of Railways). Il a également été présenté lors du congrès dédié au développement durable de l’UIC à Vienne en octobre 2016.

En généralisant le fonds testé dans le projet BPL à l’ensemble du groupe Eiffage en 2017, d’autres types d’opération pourront ainsi profiter de ce levier.

4. Peut-on imaginer le reproduire sur la construction d’un bâtiment ou d’un quartier ?

C’est même l’objectif de ce fonds. Il s’adresse à toutes les branches du groupe Eiffage, en ce y compris l’immobilier et l’aménagement. Il vise à faire émerger des variantes, des innovations techniques et organisationnelles, voire à réinterroger les pratiques constructives et les standards habituels pour in fine faire la différence. Par ailleurs, il peut également être couplé à d’autres outils utilisés couramment dans le secteur immobilier, tels que les certificats d’économie d’énergie (CEE). 

Partager :