Ville et Bâtiments : accompagner la sortie de crise et se préparer aux crises sanitaires futures

Rédigé par

Communication CSTB

802 Dernière modification le 08/09/2020 - 10:06
Ville et Bâtiments : accompagner la sortie de crise et se préparer aux crises sanitaires futures

La crise sanitaire liée au Covid-19 a profondément modifié notre mode de vie pendant quatre mois. Nous avons passé pratiquement 100 % de ce temps dans notre logement ou à moins d'1 km de celui-ci. Cette situation inédite a souvent mis en évidence que les espaces où nous vivons peuvent autant être des refuges que des vecteurs de la pandémie.

La pandémie associée au virus SARS-CoV-2, repose, du fait de son impact à l'échelle internationale, une question essentielle : quel rôle le bâtiment et l'environnement construit peuvent-ils jouer dans la gestion d'une crise en termes de qualification de l'aléa (qu'il soit sanitaire, écologique, associé aux évènements climatiques, sismique, etc.) ou de caractérisation de la vulnérabilité induite (qu'elle soit sanitaire, économique, écologique, structurelle) ?

Le CSTB développe au travers de ses différentes approches disciplinaires, une méthodologie d'analyse structurée des phénomènes de crise, permettant ainsi d'apporter, avec ses partenaires scientifiques, des réponses systémiques et opérationnelles aux différents acteurs socio-économiques et décideurs politiques, et non une simple réponse disciplinaire.

Les crises se déclinent [toujours] suivant une même temporalité pré-crise / crise / post-crise, avec deux modulations spécifiques par les échelles des temps long et court : l'anticipation et la prévention pour la pré-crise au temps long résultant de l'apprentissage de la post-crise à la même échelle. Ainsi la problématique initiale se déclinera-t-elle dans une analyse de la contribution du bâtiment et de l'urbain à une résilience multifactorielle face aux crises, quelle qu'en soit la nature. La césure du temps court quant à elle ouvre la voie aux crises résultantes qu'elles soient sanitaires, économiques, sociales ou environnementales, qui se surajoutent à la sortie de crise dans un processus d'amplification des effets.

La crise de la maladie Covid-19 n'échappe pas à cette réalité. Si la pré-crise a été mondialement sous-estimée, malgré des foyers épidémiques récents (coronavirus : SRAS en 2003, MERS en 2012, grippe H5N1 en 1997-2003, H1N1 en 2009) et des réalités plus explicites de pandémies mondiales (grippe espagnole en 1918, grippe asiatique en 1957, grippe de Hong Kong en 1969), l'évolution en pandémie, exacerbée par les mobilités inter-régionales et l'absence de protection organisée, nous a conduits à la crise actuelle, sans que nous n'y soyons réellement préparés.

Au vu des 80 % du temps quotidien passé par chacun d'entre nous dans un bâtiment, que ce soit logement, tertiaire, commerce, la mise en place d'un confinement place ainsi le bâtiment et l'espace urbain au cœur des questionnements, ici sanitaires, avec plus de 95 % de temps contraint, même si jusqu'à présent cela n'a pas été explicite.

Au-delà des sujets « bâtiment » versus crise, le révélateur du confinement a été de remettre sur le devant de la scène la problématique sociale, du fait ici de la crise économique découlant de la crise sanitaire. Mais cela pourrait tout autant s'appliquer aux autres crises ou phénomènes d'ampleur comme par exemple la surmortalité à la suite des vagues de chaleur du fait de la « crise » environnementale (même si le terme crise ne s'applique pas précisément du fait de sa non-finitude), de la paupérisation des plus faibles à la suite de la « crise » environnementale encore, mais cette fois-ci liée aux extrêmes orages, tornades, inondations, etc. Ce point est très important car comme on l'a remarqué au niveau international (USA notamment) la fracture sociale est exacerbée par ce type de crise qui révèle des disfonctionnements majeurs, récurrents, mais sous évalués par le politique (exemple de la politique de la santé vs. hôpital notamment, mais aussi le déficit d'équipement de certains foyers en termes d'outil numérique (PC) pour l'éducation des enfants).

La question que le CSTB aborde – quel est le rôle du bâtiment et de l'environnement construit dans la gestion d'une crise – s'inscrit dans chacune de ces phases, dans une logique scientifique, mais doit répondre aux attentes des différents acteurs dans des délais et des niveaux de complexité variables. Elle nécessite une réponse collective, tant au niveau du CSTB que de ses partenaires scientifiques et des acteurs socio-économiques du secteur.

Dans la phase actuelle de la gestion de cette crise si particulière, l'expertise du CSTB, issue de travaux de recherche menés depuis de nombreuses années, permet d'ores et déjà de répondre à certaines problématiques de ses donneurs d'ordres :

  • caractériser les sources du Covid-19, les facteurs déterminant son transport dans le bâtiment et l'exposition des occupants ;
  • proposer des moyens de gestion, des conditions d'occupation et de fonctionnement du bâtiment et ses équipements (par exemple sur ventilation, la réduction du taux d'occupation des locaux) au regard de la contamination biologique ;
  • comparer par simulation les solutions de circulation les unes aux autres, en évaluant l'influence sur le reste du bâtiment, et identifier les zones de congestion potentielle susceptibles de provoquer des lieux à risque ne permettant pas de garantir les distances sanitaires ;
  • identifier si les solutions de gestion sont en adéquation avec les règles existantes, notamment en termes de sécurité incendie, de ventilation et traitement d'air, de sécurité de fonctionnement des appareils à combustion et d'accessibilité ;
  • analyser l'impact de stratégies de ventilation (type de système, niveau de renouvellement d'air) vis à vis de l'efficacité du renouvellement d'air et du transfert de contaminant et du niveau de concentration intérieure ;
  • déterminer des stratégies de nettoyage des surfaces et des réseaux et de mise en œuvre des équipements spécifiques de traitement d'air (par exemple épurateurs autonomes, dispositifs en CTA).

Au-delà de ces expertises directement disponibles, le CSTB a décidé de mobiliser ses compétences scientifiques pour conduire des travaux de recherche, pour améliorer les connaissances et les réponses à apporter sur les enjeux de circulation et de traitement d'un virus à l'intérieur d'un bâtiment ou en milieu urbain.

Plus précisément, le premier projet se penchera sur la circulation des virus dans les espaces bâtis, leur interaction avec les revêtements ou les meubles et l'élaboration de protocole d'évaluation des systèmes de traitement de surface et de leur impact tant sanitaire que physique.

Le second projet étudiera la prise en compte des enjeux sanitaires dans la conception des espaces publics et dans leur réalisation, de leur géométrie jusqu'au choix des matériaux les plus adaptés en termes notamment de capacité à être nettoyés, et de résistance aux agressions chimiques.

La crise sanitaire et le confinement ont par ailleurs profondément modifié notre rapport à notre lieu de vie et plus largement à notre environnement. L'espace public urbain, hier réservé aux fonctions de déplacements automobiles et alternatifs a parfois retrouvé pendant le confinement sa dimension de lieu de villégiature. Cette transformation est-elle durable ou sera-t-elle purement ponctuelle ? C'est un enjeu majeur pour les collectivités locales et les aménageurs pour l'exercice de leur responsabilité. Cela nécessitera de mobiliser une capacité de recherche sur ces modifications potentielles de nos comportements. Le CSTB souhaite se mobiliser et participer à des travaux de recherche de plus grande ampleur sur les évolutions sociologiques voire sociétales induites par la crise sanitaire.

La Corée du Sud nous a montré l'exemple. Touchée par les précédentes pandémies du SRAS et du MERS, elle a su investir pour préparer les crises sanitaires futures et notamment développer leurs connaissances des facteurs qui permettent d'en limiter l'impact. Nous ne partons donc pas de rien. Le CSTB se mobilisera avec tous les partenaires scientifiques et économiques de bonne volonté sur ces domaines d'excellence pour participer à l'effort collectif indispensable pour préparer la prochaine crise, qu'elle soit sanitaire ou environnementale.

 Crédit photo  Photo : Bertrand Rieger / hemis.fr

Article publié sur CSTB actualités
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