Trois idées maîtresses pour bâtir durable au XXIè siècle

Rédigé par

Alain Guisnel

Directeur Qualité Développement Durable

1554 Dernière modification le 18/10/2018 - 09:00
Trois idées maîtresses pour bâtir durable au XXIè siècle

Nous vivons actuellement une période aussi enthousiasmante que complexe pour concevoir les bâtiments de demain ! Beaucoup de progrès, des performances décuplées, un champ d’actions considérables, mais est-ce pour autant facile de s’y retrouver et de définir une stratégie solide et claire pour caractériser nos bâtiments durables à venir ? Pour relever ensemble les défis de l’innovation durable, l’opérateur immobilier Icade partage des pistes d’optimisation des projets de construction, issues de ses années d’expérience dans des opérations immobilières en France.

Démultiplication progressive des critères qualifiant la construction durable

Ces dix dernières années ont vu fleurir un nombre d’innovations bien plus important que les quarante années précédentes, tant sur le plan réglementaire que technique, numérique... Et si toutes ces innovations ne suffisaient pas, un nombre important d’accompagnateurs du changement nous sollicitent (organismes publics et privés, certificateurs, labellisateurs, bureaux d’études techniques - BET - environnementaux et sociaux...) pour mieux concevoir et qualifier nos projets.

A partir d’une première réglementation thermique en 1974, totalement axée autour d’une nécessaire réduction de consommation d’énergie, les acteurs du bâtiment n’ont pas chômé jusqu’à ce jour… 

  • Le champ des thématiques concourant aujourd’hui à la qualification d’un « bâtiment durable » a véritablement explosé ! Le bas carbone, la biodiversité, la mobilité, la qualité d’air, la connectivité des bâtiments… 
  • La part de l’humain, les notions de qualité de vie, de bien-être des occupants, d’usage des biens en exploitation sont arrivées en force, en complément de tout le reste pour qualifier nos bâtiments vertueux.
  • Cerise sur le gâteau, nous avons enfin compris que le bâtiment ne pouvait plus être conçu « hors sol » - ses interactions évidentes avec le quartier et la Ville nécessitant une analyse sur une assiette élargie…
  • Dernière innovation et non des moindres, dans certaines réglementations et labels, le calcul d’impact sur l’environnement se fait désormais - et c’est logique - sur tout son cycle de vie, « du berceau à la tombe », de la construction à la déconstruction !

Des acteurs de la construction en mode « silo »

Cette marche collective accélérée depuis 10 ans, ayant progressivement généré cette foison de critères de qualité, il faut avouer que l’industrie française de la conception immobilière n’a pas beaucoup évolué pour répondre le plus efficacement à cette période de changement.

Chacun des acteurs de la chaîne de conception immobilière, depuis les architectes en amont jusqu’aux utilisateurs en phase aval, ont de réelles compétences individuellement pour prendre en compte ces nouveaux enjeux. Pour autant, l’organisation « séquentielle » et donc souvent « cloisonnée » de la production, et la séparation des responsabilités ne sont pas toujours propices à une démarche holistique et transversale.

A titre d’exemple, notre schéma classique de construction d’un ouvrage est clairement découpé en quatre phases distinctes : Programmation, Conception, Construction, Gestion/Maintenance. Entre les deux phases centrales Conception et Construction - les plus concernées par l’atteinte des performances environnementales - tout ou presque est remis en cause, réétudié, redessiné, bref un reset quasi-total !

Quelques pistes d’optimisation…

Alors, comment faire ?

Quels sont nos atouts et nos outils pour atteindre nos meilleures ambitions sur des sujets aussi variés, avec une organisation à réinventer ?

Trois idées maîtresses et convergentes me paraissent contribuer à améliorer notre production à court terme, tant sur le plan qualitatif que sur le plan économique.

  • 1. Avoir une approche multicritère - Comment exercer des choix parmi des critères aussi différenciés que sont la thermique, la connectivité, la biodiversité et la qualité de vie, si l’on s’en tient à des référentiels lus de façon indépendante avec des experts qualifiés par domaine à chacune des phases d’un projet ?
    La recommandation de mettre des curseurs sur chacun de ces sujets pour se donner des priorités ne suffit plus du fait de l’explosion de l’offre des labels et certifications, et des coûts induits empilés, grevant des budgets sans cesse en optimisation.
    Une approche globale et multicritère mérite d’être déployée dès la phase d’un projet et tout au long de celui-ci. Cette démarche globale serait un mixte de missions de Commissionning actuelles (encore trop peu répandues en France) et de mission de qualités environnementales et d’usage. La garantie de résultat factuelle au profit du Maître d’Ouvrage et surtout de l’usager final serait l’objectif essentiel de ce type de mission.
  • 2. Introduire une dose d’ingénierie concourante - La démarche « franco-française » d’une séparation des missions entre les différentes composantes de la maîtrise d’œuvre (notamment entre les architectes et les BET), le côté séquentiel des différentes phases d’études avec une remise à plat des études entre chacune des phases… Tout ceci n’est pas propice à une ingénierie collaborative et concourante (une méthode d'ingénierie qui consiste à engager simultanément tous les acteurs d'un projet).
    La période actuelle faite d’innovations, tant sur les techniques de construction que sur des assemblages nouveaux de matériaux, milite fortement pour relancer l’idée de travailler plus efficacement en recourant à cette ingénierie concourante (de nombreux acteurs la pratiquent déjà sans le formaliser). (Cf. Rapport du GREMAP – Groupe de Réflexion sur le Management de Projet, Ministère du Logement, décembre 1996). 
  • 3. Recourir au BIM (Building Information Modeling) de façon systématique et structurée - Les différentes réflexions et pistes d’actions citées ci-dessus, sont facilitées aujourd’hui avec le développement fulgurant de la démarche en BIM, une vraie démarche collaborative ! Mais attention aux écueils, ce mot « magique » BIM recélant trop souvent encore des illusions tant dans la pratique que dans les résultats obtenus... Il est donc sage de prendre le temps et de s’entourer de vrais professionnels pour définir très en amont des projets les objectifs visés.
    Plusieurs groupes professionnels s’activent actuellement pour aider les acteurs de la construction à y voir plus clair et à posséder un cadre de performance pour cette démarche à tous les stades d’un projet !

Article signé Alain Guisnel, directeur qualité Développement durable, Icade

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