/// REGARD : Alfonso Femia, l’architecte qui a redonné vie aux Docks de Marseille

2175 Dernière modification le 06/11/2017 - 10:37
/// REGARD : Alfonso Femia, l’architecte qui a redonné vie aux Docks de Marseille

En novembre 2017, Batimat lance la première édition d’un ouvrage baptisé Regard sur l’Architecture, qui vise à présenter, aussi bien au public d’exposants du salon qu’aux visiteurs, des réalisations d’exception qui mettent la question de l’usage au centre du projet.

Le centre commercial « Les Docks », situé dans le quartier de la Joliette à Marseille, fait partie des projets publiés. Le bâtiment a été élu “meilleur centre commercial” en 2016. Entretien avec Alfonso Femia, l’architecte de ce nouvel espace public au cœur de la cité phocéenne.

L’Architecture d’Aujourd’hui : Les Docks (Marseille) fait partie des réalisations présentées dans Regard sur l’Architecture. Que pensez-vous de cette initiative éditoriale menée par Batimat ?

Alfonso Femia : Je crois que l’on doit toujours raconter le projet et le faire comprendre à tous. Il est aussi important d’expliquer le processus qui a amené à la réalisation du projet. Parler des objectifs, des contraintes, des ambitions, des difficultés, de la cohérence entre le projet et la réalisation, du dialogue entre les acteurs du projet : du maître d’ouvrage aux artisans, qui ont tous contribué à sa réalisation.

Ainsi, il est très important pour moi de pouvoir en parler ici, grâce à l’initiative de Batimat, en collaboration avec L’Architecture d’Aujourd’hui.

L’Architecture d’Aujourd’hui :  Sur ce projet spécifique, quel était le principal défi rencontré et comment l’avez-vous résolu ?

Alfonso Femia : Le défi principal a été de ne pas trahir le corps et l’âme des Docks tout en réussissant à lui donner une âme en continuité avec son histoire et à travers sa nouvelle identité. Dès le début du projet, j’ai toujours voulu faire des Docks un lieu de destination et non pas un lieu de transition ou de simple passage. Pour arriver à cela, les Docks devaient devenir un lieu « public » où les gens puissent se sentir à Marseille, au cœur de la Méditerranée, « chez » les Docks.

Tout le travail sur la matière, dans un dialogue continu avec un artiste (Danilo Trogu), des artisans, des entreprises industrielles, une entreprise de construction, la bureaucratie française, le maître d’ouvrage, a été un défi encore plus grand. Démontrer que l’on peut, même en France avec toutes ses règles bloquantes (certifications, sécurité…) sur la matière, encore travailler dans une « renaissance » du projet ; un projet créé dans un processus ouvert à la recherche, à la spécificité, à la richesse de l’histoire et de la contemporanéité. Nous avons réussi à la faire : dans les délais et dans le budget. Nous avons créé un lieu de découverte(s) et de surprise(s), grâce à un travail d’équipe.

Et c’est ça que j’aime. Le projet doit se souvenir de l’autre. Il doit entrer en dialogue avec l’empathie des personnes.

L’Architecture d’Aujourd’hui : Votre projet illustre une problématique essentielle : l’adaptation de l’architecture à l’appropriation. Comment avez-vous intégré les questions d’usages dans votre projet ?

Alfonso Femia : Travailler sur le patrimoine, sur l’existant est le vrai lieu de l’imaginaire, de l’invention. En effet, nous vivons dans une société devenue une société de règles, pas une société de contraintes. Les règles ne permettent pas de développer une pensée, alors que les contraintes nous y obligent. Ainsi, pouvoir penser un usage différent pour un bâtiment né pour assouvir d’autres fonctions, dans un contexte différent, avec des espaces héroïques, des épaisseurs, des dimensions, est extraordinaire. Cela nous donne la possibilité de continuer à penser des lieux extraordinaires. Pour Les Docks, comme je le fais pour chaque projet de réhabilitation, j’ai regardé et écouté le bâtiment afin de proposer un projet qui n’entrait pas en conflit ou prévaloir sur l’identité des Docks. Nous avons déclaré toutes nos actions au bâtiment, nous l’avons ouvert pour le rendre poreux et perméable au flux et à la lumière, là où était possible. On a introduit le nouveau système “vital” des techniques et gaines et, lors de ces deux actions, nous avons mis en scène la Méditerranée, l’idée d’un espace de merveille mais proche de nous tous grâce à la céramique, la nature, le bois, la pierre, les œuvres d’art, les mots… la lumière.

Entretien réalisé par L’Architecture d’Aujourd’hui en août 2017.

Observateur engagé des grandes tendances du secteur, Batimat a lancé à l’occasion de la Biennale d’Architecture de Venise 2016, la démarche Regard sur l’Architecture, fruit d’un questionnement simple mais primordial : les architectes formulent de véritables visions, mais qu’en est-il de l’impact de leurs bâtiments sur les habitants et les usagers ? Qu’en est-il de l’ambition ultime de l’architecte, à savoir assurer notre mieux-vivre ?

Véritable enquête de terrain menée pendant 12 mois auprès de ceux qui conçoivent, réalisent et vivent le bâtiment, Regard sur l’Architecture offre un éclairage inédit sur une sélection de réalisations hors du commun, réalisées récemment, et choisies pour la qualité de leur « réponse architecturale » à une problématique donnée : habitat d’urgence, habitat social, habitat collaboratif…

Conçu comme un carnet d’inspiration à destination des professionnels et du grand public, Regard sur l’Architecture se concrétisera par l’édition biennale d’un mook, dont la première édition sera disponible en novembre, à l’occasion de Batimat 2017.

Rencontrez les contributeurs du projet lors d’une après-midi de débats animés par L’Architecture d’Aujourd’hui, mercredi 8 novembre à partir de 13h00 sur le Forum Regard sur l’Architecture de Batimat (hall 5A).

En savoir plus

Article publié sur Mondial du bâtiment
Consulter la source

Partager :