PARISBLOOM : des microalgues sur la façade des bâtiments

Rédigé par

David Portugais

Responsable Marketing

10320 Dernière modification le 12/02/2021 - 13:36
PARISBLOOM : des microalgues sur la façade des bâtiments

Spécialisé dans l’algoculture urbaine, le projet PARISBLOOM, développé par le cabinet d’architecture XTU, innove avec le développement d’un système de biofaçade alliant nature et technologie. Son objectif est de développer la filière des microalgues en milieu urbain tout en améliorant les performances énergétiques du bâtiment. Entretien avec Anouk Legendre, architecte et porteuse du projet PARISBLOOM, finaliste du Grand Prix de l’Innovation Construction Durable & Cadre de Vie organisé par le Technopôle Domolandes.

 

Pourriez-vous nous parler de votre solution ?

Anouk Legendre : PARISBLOOM est un projet d’algoculture urbaine, porté par XTU Architects. Il consiste à déployer des biofaçades sur les bâtiments pour y cultiver des microalgues, produites à partir de gaz carbonique transformé par photosynthèse. Les microalgues sont porteuses de nombreux bénéfices pour un bâtiment : elles purifient l’eau et l’air qui y circulent et elles captent l’énergie thermique du soleil, chauffant ainsi naturellement les locaux. Les microalgues ont l’avantage d’avoir les mêmes besoins thermiques que les humains : elles se plaisent et se développent entre 16°C et 25°C. Nous pouvons ainsi profiter de l’ambiance thermique déjà présente dans les bâtiments, sans leur demander un effort énergétique particulier, pour cultiver ces végétaux microscopiques. Cela permet d’économiser jusqu’à 80% de l’énergie nécessaire pour produire les microalgues. Une fois produites, les microalgues pourront être utilisées dans l’alimentation, la cosmétique ou encore les médicaments biosourcés. C’est un produit à haute valeur ajoutée, qui génère de la richesse pour le bâtiment qui les cultive.

 

En quoi les biofaçades contribuent à la transition vers des villes plus durables ?

A. Legendre : Notre démarche s’inscrit dans l’éco-conception et l’écoconstruction. La culture de microalgues est très bénéfique pour la ville durable. Cela participe fortement à l’amélioration du bien-être des occupants d’un bâtiment et plus généralement du cadre de vie urbain, notamment grâce à la réduction des émissions carbones. En effet, ces micros végétaux consomment du gaz carbonique : les biofaçades constituent ainsi des puits de carbone urbain. Les biofaçades permettent également de réduire la consommation énergétique des bâtiments puisque comme je l’ai dit, les microalgues captent le rayonnement solaire, réchauffant ainsi les locaux. Cela peut aller jusqu’à 50% des besoins thermiques. C’est une véritable symbiose énergétique.

De plus, ce supervégétal encourage le développement d’une consommation vertueuse. Il pourra être utilisé dans différents domaines pour remplacer des produits fabriqués chimiquement. Un de nos objectif est ainsi d’œuvrer à terme au remplacement de la production chimique par du biosourcé. Cela permet également de favoriser le circuit court, en installant des biofaçades au plus près des lieux de consommations de microalgues.

En résumé, les biofaçades proposent une nouvelle expérience du bâtiment mêlant activités humaines et culture organique. Elles améliorent l’efficacité énergétique des bâtiments et créent une nouvelle activité locale d’agriculture urbaine. Les villes ont ainsi la possibilité de participer à la production de leurs besoins, à l’instar des campagnes et de leur agriculture locale.

 

Concrètement, comment développer des algues sur la façade d’un bâtiment ?

A. Legendre : Notre solution se présente comme un aquarium plat, sous la forme d’un double vitrage, que nous appelons photobioréacteur. Nous allons ensuite assembler plusieurs photobioréacteurs pour constituer la façade d’un bâtiment. Le client peut opter pour un fond transparent ou non, selon s’il souhaite pouvoir voir les microalgues de l’intérieur. Ces photobioréacteurs, conçus pour maximiser la productivité des microalgues, sont alimentés par un réseau d’eau et de gaz carbonique dont les végétaux se nourrissent. Un échangeur thermique est placé à l’arrière des photobioréacteurs, afin de réguler la température des aquariums et de capter l’énergie thermique émise par ces derniers pour la rediriger vers le bâtiment.

 

Pourriez-vous nous décrire l’une de vos réalisations les plus emblématiques ?

A. Legendre : PARISBLOOM est une société très jeune. Avec nos partenaires, nous avons récemment gagné le concours Réinventer Paris, qui soutient l’innovation et le développement de nouvelles technologies. Le premier prix est la réalisation d’une façade d’un bâtiment à Paris, dans le 13e. Le projet, qui se nomme AlgoHouse, consiste à installer des microalgues sur la façade et le toit de logements pour chercheurs. Nous pourrons produire, consommer et vendre sur place des microalgues. Il s’agira du premier bâtiment à biofaçade commercialisé destiné à l’habitat. La façade sera suivie pendant 20 ans, afin de s’assurer que le système fonctionne bien. Cette première expérience nous permettra également de développer et d’améliorer les pratiques culturales pour améliorer leur rendement.

 

Quelles sont vos perspectives pour le futur ?

A. Legendre : A long terme, nous souhaitons développer sept démonstrateurs de ces systèmes de culture de microalgues. Développés dans différents pays, sous différents programmes et climats, ils permettraient à notre solution de s’implanter n’importe où. Les microalgues étant présentes dans le monde entier, il suffit de trouver quelle souche correspond le mieux à son environnement.

Nous sommes à la recherche de partenaires afin de développer d’une part le marché des algues à destination de l’alimentation ou du médicinal, et d’autre part pour la construction d’autres bâtiments. Nous visons donc le marché des logements collectifs, les résidences de services et étudiantes, l’immobilier de bureau ou encore les sociétés de rénovation thermique des bâtiments. Nous souhaitons également étendre les biofaçades sur d’autres programmes, comme des usines avec dégagement de gaz carbonique ou usine des eaux.

A ce jour, nous n’avons pas encore de concurrents, seuls des pilotes sont en cours de construction.

 

Qu’est-ce que votre suivi par le Technopôle Domolandes vous a apporté ?

A. Legendre : Être finaliste du Grand Prix de l’Innovation organisé par le Technopôle Domolandes nous a permis de mieux structurer notre démarche. Nous avons eu un retour très constructif du jury, dont les observations vont nous servir à mieux développer notre produit. De même, nos rencontres et nos échanges avec les autres candidats, nous ont permis de nous faire des contacts dans le milieu de la construction durable.

 

 

Implanté dans les Landes à l’initiative du Conseil Départemental et de la Communauté de Commune Maremne Adour Côte Sud, le Technopôle DOMOLANDES favorise l’innovation et accompagne les entreprises vers le numérique, la construction durable et la solidarité.

Domolandes rassemble un écosystème d’acteurs publics et d’entreprises privées autour d’un centre de ressources et de développement propice à la performance des entreprises. Il stimule la transition numérique auprès des acteurs de la construction et encourage la lutte contre la précarité énergétique pour l’Habitat de demain.

Pôle d'excellence, Domolandes organise chaque année, depuis 2012, le Grand Prix de l’Innovation Construction Durable & Cadre de Vie qui identifie et récompense les projets les plus innovants de la filière Bâtiment sur le plan national. Ce concours a généré aujourd’hui plus de 1 000 manifestations d’intérêt, 500 dossiers étudiés, 76 start-up retenues pour le Grand Jury, composé des Présidents et Directeurs Généraux des grands acteurs du Bâtiment et d’experts de l’innovation et de la création d’entreprises, et 20 lauréats récompensés.

 

 

Propos recueillis par Construction21, la rédaction

 

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