Mutation des “espaces vacants”, une nouvelle réserve foncière pour fabriquer nos villes ?

Rédigé par

Joris Gaudion

AMO chef de projet senior

840 Dernière modification le 17/05/2021 - 10:55
Mutation des “espaces vacants”, une nouvelle réserve foncière pour fabriquer nos villes ?

Les mutations de “friches commerciales” sur nos territoires sont des leviers d’action pour le développement de nos territoires tout en luttant contre l’artificialisation des sols. Ces espaces de plus en plus nombreux sur nos territoires représentent des nouvelles réserves foncières pour nos villes. Elles sont donc une véritable opportunité pour développer positivement un territoire, permettant de proposer des activités alternatives et complémentaires intégrées au grand paysage territorial des villes. Déjà, plusieurs outils sont à disposition des acteurs publics pour engager cette reconversion.

Réserves foncières et friches commerciales, état des lieux

 

Les friches commerciales, ces réserves foncières qui s’ignorent

 

“Les friches commerciales sont des bâtiments, des locaux ou des bureaux situés en milieu urbain, dans une commune de plus de 5 000 habitants, d’une surface minimum de 300 m2 d’emprise, vides depuis au moins deux ans et dont l’état n’importe pas.”

Elles se multiplient sur nos territoires à cause des effets des différentes crises vécues mais aussi des mutations des dynamiques territoriales et commerciales. Au-delà des incidences économiques que peuvent avoir ces vacances commerciales, ces espaces constituent un enjeu majeur pour les politiques publiques qui visent un aménagement du territoire équilibré et durable. Ces espaces sont aussi vu par certains comme un foncier libre disponible à transformer pour éviter l’artificialisation de nouveaux sols.

Les villes moyennes et les plus petites villes sont les plus touchées, comme en témoigne les différentes actions des acteurs publics. 

 

Les friches commerciales en périphérie et en entrée de ville, repenser les zones détendues pour une harmonie paysagère

 

De même, dans les villes plus grandes, ces espaces se trouvent majoritairement en entrée de ville ou dans leurs périphéries, dans des zones plus détendues. Ce sont généralement des friches d’anciens magasins commerciaux spécialisés de taille intermédiaire à grande.

Ces surfaces commerciales contribuent à l’image de la « France moche » pour beaucoup. Cependant, il est indéniable que ces espaces sont pour certains territoires des zones clés concernant l’attractivité économique. En France, c’est 62 % du chiffre d’affaires du commerce qui se réalisent en périphérie, contre 25 % en centre–ville et 13 % dans les quartiers [Source].

Ces friches ont donc besoin de s’adapter aux mutations économiques et aux impératifs environnementaux. Il s’agit aujourd’hui de mieux penser l’intégration paysagère, économique et social de ces zones dans nos territoires.

 

Exemple : Eviter le phénomène de « dead mall », une étude de l’agence d’urbanisme Bordeaux Aquitaine intitulée « Vers des friches dans les grands formats commerciaux ? »

A’Urba, agence d’urbanisme Bordeaux Aquitaine, a publié en mars 2020 une étude intitulé « Vers des friches dans les grands formats commerciaux ? ». Cette étude montre la diversité de la notion de friches commerciales et de commerces vacants, complexifiant les actions publiques sur ces secteurs. Suite à un état des lieux de la situation en Gironde, le document propose des pistes de reconversion de ces sites avec des procédés de végétalisation mais aussi des processus de réversibilité ou de mutualisation, une bonne source d’inspiration ! [Source]

 

Valoriser le territoire grâce aux espaces vacants, un levier pour nos territoires ?

 

Des outils d’urbanisme opérationnels pour agir sur ces espaces vacants

 

Plusieurs outils d’urbanisme opérationnels existent pour intervenir sur ces friches commerciales. Parmi ces derniers, on peut penser à l’obligation de démantèlement et de remise en état du site après cessation de l’exploitation commerciale, qui a été renforcée par loi Elan de 2018.

De même, le Projet Partenariat d’Aménagement (PPA) entre l’Etat et des acteurs locaux permet de repenser les secteurs d’aménagement. « Cet outil a été utilisé à 90 % pour du recyclage urbain, et notamment de friches, avec mobilisation de crédits du programme ministériel 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat » mais aussi des aides des opérateurs Anah, Anru, Ademe, etc. » selon Jean-Baptiste Butlen, sous-directeur de l’Aménagement Durable au Ministère de la Cohésion des territoires.

 

La Taxe sur les friches commerciales, impôt local facultatif

 

La taxe sur les friches commerciales (TFC) est aussi un outil largement utilisé par les municipalités ou les établissements publics de coopération intercommunale pour lutter contre la vacance commerciale. Cet impôt local facultatif permet d’imposer de manière progressive les biens soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties « qui ne sont plus affectés à une activité soumise à la cotisation foncière des entreprises (CFE) depuis au moins deux ans, au 1er janvier de l’année d’imposition, et dont l’absence d’exploitation n’est pas indépendante de la volonté du propriétaire ». Selon l’AMF, cet outil permet de « lutter contre le phénomène de rétention foncière délibérée », « permettre la remise sur le marché des locaux vacants », « maîtriser les loyers devenus trop élevés en centre-ville » ou encore « encourager la rénovation des locaux commerciaux et la reconversion de locaux désuets en logements ».

En 2017, ce sont 112 communes qui ont voté l’application d’une TFC sur leur territoire pour un total de 1 197 locaux imposés et un montant total d’environ 2 400 000 euros mis en recouvrement.

 

Une opportunité pour introduire de nouvelles activités en ville ?

 

Ces espaces libres peuvent être une opportunité pour développer de nouvelles activités sur le territoire afin d’impulser un dynamisme territorial ou bien revitaliser certains quartiers, le tout dans une logique de zéro artificialisation nette des sols.

Par exemple, introduire des nouveaux sites de logistique en entrée ou en cœur de ville peut être intéressant pour rendre plus éco-responsable la logique du dernier kilomètre sur les territoires denses. Cet enjeu particulier ne cesse de croitre avec le développement rapide du e-commerce.

De même, résorber cette vacance peut être une opportunité pour servir la création et les tissus sociaux locaux. Ce sont des espaces (plus au moins grands selon la localisation) qui peuvent repenser leur solidarité pour accueillir des acteurs locaux : associations, mouvements citoyens, entrepreneurs, artisans locaux, filières locales, etc. Mettre en place une logique d’occupation ou d’urbanisme temporaire et transitoire peut être un levier pour amorcer une transition dans la destination de ces lieux.

 

Pour aller plus loin : L’avenir des bureaux, mutations et perspectives des espaces de travail

Actualité publiée sur Ville E+
Consulter la source

Partager :