Métropole de Grenoble : quelle politique de rénovation énergétique ?

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La rédaction C21

4256 Dernière modification le 13/07/2022 - 12:35

Lancement des focus thématiques Green Solutions ! Avec, comme premier sujet, la rénovation. Pierre Verri, vice-président de Grenoble-Alpes Métropole chargé de l'air, de l'énergie et du climat, intervient comme grand témoin de ce focus : il nous parle de la politique de rénovation menée dans la métropole de Grenoble. 


Quelle importance revêt la rénovation pour une collectivité telle que la métropole de Grenoble ?


La rénovation représente un sujet primordial pour Grenoble-Alpes Métropole. A travers notre Plan Climat Air Energie métropolitain 2020-2030 et notre schéma directeur énergie, nous nous sommes fixés comme objectifs de réduire de 22% notre consommation énergétique, dont une diminution de 30% de consommation en énergie fossile. Parallèlement, nous voulons augmenter notre production d’énergie renouvelable et de récupération (ENR&R) pour atteindre 35% de la consommation d’énergie finale.

Pour ce faire, nous prévoyons avec notre Plan Climat Air Energie 2020-2030 d’entreprendre ou d’accompagner :

  • la rénovation de 9 000 maisons individuelles sur les 21 000 présentes sur notre territoire ; 
  • la rénovation de 25 000 logements collectifs privés sur 75 000 ;
  • et la rénovation de 7 000 logements collectifs sociaux sur 25 000.

Le Plan Climat Air Energie 2020-2030 constitue donc la pierre angulaire de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, de l’adaptation au changement climatique et de l’amélioration de la qualité de l’air dans les territoires de notre métropole.

 

Plus concrètement, comment se traduisent ces objectifs sur le terrain ?


Afin d’atteindre ces objectifs, nous avons développé plusieurs axes d’actions à mener. Il y a tout d’abord la politique de campagne de rénovation mur-mur – mise en place en 2010 – qui est aujourd’hui devenue un service public. En effet, la métropole de Grenoble s’est dotée de la compétence de service public de l’efficacité énergétique de l’habitat. Ce qui nous permet d’abonder un budget annuel.

Par exemple, en tant que Vice-président de Grenoble-Alpes Métropole chargé de l’air, de l’énergie et du climat, j’ai fait prendre une délibération courant février à la Métropole, dans le but de tripler notre budget consacré à la rénovation énergétique des logements privés sur les 3 prochaines années. Il s’agit plus précisément d’un investissement public de 9 millions d’euros. Ce qui génèrera près de 70 millions d’euros de travaux avec les entreprises locales, et de 1 200 à 1 400 emplois.

Dans le même temps, en décembre 2021, nous avons consacré un budget d’1,5 million d’euros pour accompagner les collectivités territoriales et les entreprises – TPE et PME de moins de 50 employés – à franchir le pas de la rénovation énergétique. Avec notre Société Publique Locale (SPL) Agence Locale de l’Energie et du Climat (ALEC), nous leur fournissons une aide technique, telle que la conception d’un cahier des charges ou le diagnostic de performance énergétique, mais aussi une aide aux travaux, avec l’obtention de subventions de l’Etat, des collectivités territoriales ou de toute instance qui peut financer une partie de ces rénovations. 

 

De l'enjeu du bâtiment à celui du territoire : comment avez-vous intégré la question de la rénovation dans l’évolution du PLUi ? Y-a-t-il un lien avec l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) ?


Tout d’abord, ce n’est que depuis 2017 que les métropoles exercent de plein droit, en lieu et place des communes membres, les compétences d’Aménagement de l'espace métropolitain et de Politique locale de l'habitat.

La portée de l’objectif ZAN a été nettement renforcée par la loi Climat et Résilience, promulguée en août 2021, même si cette dernière est postérieure à notre PLUi, approuvé en décembre 2019. La métropole de Grenoble avait par ailleurs anticipé cet objectif, notamment avec la loi Alur de 2014 qui donnait des préconisations sur le ZAN, en inscrivant dès 2014 dans le PLUi la modération de l’utilisation de l’espace urbain.

Notre anticipation à ce sujet s’est notamment traduite par l’objectif de transformer et revaloriser 35% des parcelles urbanisées de notre territoire en parcelles agricoles à l’horizon 2030. Ainsi, depuis 2014, 150 hectares de terres urbaines ont été converties en terres agricoles. 

Concernant la rénovation énergétique des bâtiments, nos objectifs ont été transcrits dans le PLUi. Par exemple, l’article 10 sur la performance énergétique stipule d’une part l’exigence énergétique minimale à atteindre selon les fiches certificat d’économie d’énergie (CEE) ainsi que le label BBC rénovation. Et d’autre part, ce texte législatif recense l’ensemble des labels de performance énergétique pour les constructions neuves.

Par rapport aux constructions performantes, nous avons dépassé les standards de la RT2012 de 20% sur l’ensemble du territoire métropolitain. Certains secteurs ont même atteint -30% par rapport à la RT2012.

Enfin, nous avons inscrit dans l’article 7 de notre PLUi la nécessité d’augmenter la part d’ENR, avec notamment l’obligation de raccordement aux réseaux de chaleur quand ceux-ci existent. Les réseaux de chaleur ont donc été classés. Ainsi, pour toute construction ou lorsqu’une rénovation nécessite de toucher au système de chauffage, un raccordement au réseau de chaleur est impératif.

 

Rencontrez-vous des obstacles ou des difficultés dans la mise en place de votre Plan Climat Air Energie 2020-2030 ?


Dans le but de massifier la rénovation sur le territoire hexagonal, l’Etat a lancé en 2020 MaPrimeRénov’ (MPR), en remplacement du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) et des différentes aides de l’Agence nationale de l’Habitat (Anah). Avec MPR, l’Etat offre 3 750 euros de subventions par foyer – quel que soit leur niveau de revenus – aux syndicats de propriétaires. En conséquence, les foyers très modestes et modestes n’ont plus la possibilité de cumuler les différentes aides étatiques, de l’Anah et des métropoles. Il en résulte parfois des restes à charge de plus de 15 000 euros pour un foyer modeste ou très modeste, ce qui est complètement inconsidéré. C’est pourquoi certaines copropriétés refusent d’engager des travaux de rénovation.

De notre côté, dans le but de pallier les baisses des subventions étatiques, la métropole de Grenoble et ses communes membres versent entre 6 000 et 8 000 euros par foyer très modeste et modeste propriétaire d’un logement. Il en résulte le plus souvent des restes à charge de 5 000 à 6 000 euros, comme avant le lancement de MPR. 

Les collectivités territoriales sont donc en train de se substituer aux différentes instances étatiques. C’est pourquoi j’ai interpellé les députés locaux et la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili pour mettre en lumière ces dangers, encore plus prégnants dans des communes et collectivités territoriales qui ont moins de moyens financiers. Il y a donc une vraie question économique qui se pose avec MPR. 

 

Selon vous, quelle place doivent prendre les collectivités dans les incitations à la rénovation ?


Si nous voulons réellement faire des économiques d’énergie et atteindre la neutralité carbone, alors les collectivités territoriales doivent accaparer l’enjeu crucial de la rénovation et le rendre prioritaire dans leurs plans d’actions. 

Au-delà des collectivités territoriales, il faut également sensibiliser les citoyens. Dans cet esprit, la métropole grenobloise vient tout juste de lancer la Convention citoyenne pour le climat, pour laquelle 120 citoyens sont tirés au sort parmi les 450 000 habitants. Il leur est demandé leurs préconisations dans le but de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre et notre consommation d’énergie, mais aussi la manière dont chaque citoyen doit ou devrait s’investir sur ces sujets.

Fin 2022, le président de Grenoble-Alpes Métropole, Christophe Ferrari, organisera un conseil métropolitain extraordinaire pour traiter toutes les questions et l’ensemble des propositions qui seront formulées par la Convention citoyenne pour le climat. Pour les enjeux les plus complexes, il n’est par exemple par exclu de faire un référendum, notamment dans le but de sensibiliser et responsabiliser les citoyens de la métropole de Grenoble.
 

Propos recueillis par la rédaction Construction21

Cet article fait partie du focus Rénovation, soutenu par Parexlanko/SIKA, qui comprend études de cas, interviews, vidéos... Découvrez tous les contenus sur la page dédiée 

 

 

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