Massifier une construction hors-site adaptée aux territoires ? C'est possible !

Rédigé par

Hélène MEYER

Responsable communication et marketing

3242 Dernière modification le 15/09/2022 - 12:22

Le groupe thématique Chimie, Matériaux et Systèmes Constructifs du Pôle Fibres-Energivie a publié en juin 2022 un livre blanc dédié au hors-site. Le document revient notamment sur la définition et les enjeux de ce mode de construction ainsi que les prérequis pour une opération hors-site réussie. Ses enseignements seront partagés lors du colloque Build & Connect, qui se tiendra du 22 au 23 novembre 2022 à Strasbourg. Rencontre avec André de Chefdebien, Directeur Innovation et Marketing stratégique pour le groupe Rector Lesage, qui préside le groupe de travail.

Comment définissez-vous le hors-site ?

André de Chefdebien : Le hors-site est un mode de construction qui regroupe plusieurs niveaux d’industrialisation et de finition. Il existe ainsi différentes formes de hors-site : la préfabrication de composants, les systèmes constructifs préfabriqués, la construction modulaire 2D ou 3D, etc. Ces notions conduisent à des différences importantes en termes de finition et de travail d’assemblage sur le chantier. Dans le livre blanc du Pôle Fibres-Energivie, nous définissons le hors-site comme « une nouvelle culture de construction s’appuyant sur la préfabrication, l’industrialisation et sur le numérique » qui consiste à « produire en atelier des éléments et des systèmes constructifs de différentes tailles à un niveau élevé de définition et de multifonctionnalités » puis à « les transporter et les assembler sur site. » Cela concerne tous types de matériaux (acier, bois, béton, etc.) et englobe de nombreuses techniques de production, d'assemblage et de transport.

En quoi le hors-site peut répondre aux enjeux actuels du secteur du bâtiment, notamment la transition écologique ?

André de Chefdebien : La construction hors-site a le vent en poupe aujourd’hui. De nombreux acteurs s’y intéressent (maîtres d’ouvrage, constructeurs, industriels, etc.) car elle offre une réponse à de multiples enjeux rencontrés par le monde de la construction, dont la durée des chantiers, la gestion des ressources et des déchets ou encore la conformité aux attentes environnementales. 

En effet, la conception très en amont des éléments, avec l’apport du numérique, permet d’optimiser la quantité et qualité des matériaux utilisés. Cela évite ainsi la surconsommation de ressources et favorise la mixité des matériaux, au bénéfice des biosourcés permettant de stocker du carbone.

De plus, le hors-site ouvre la voie à une productivité et une maîtrise de la qualité bien meilleures que les chantiers traditionnels. Grâce à la fabrication en atelier, il n’y a plus qu’à assembler sur site. Les chantiers sont donc plus rapides et nécessitent, en nombre, moins de transport. Cela répond également à des enjeux de pénibilité pour le personnel des chantiers. Il est de façon évidente plus facile de travailler en temps de canicule ou en période de fortes intempéries avec le hors-site.

Le Pôle Fibres-Énergivie a publié en juin 2022 un livre blanc sur le hors-site. Pourquoi l’avoir réalisé ?

André de Chefdebien : Le travail sur le livre blanc a démarré au printemps 2021. Le groupe de rédaction comprend un large panel d’intervenants : maîtres d’ouvrage, maîtres d'œuvre, industriels, architectes, centres techniques, etc., dont certains pratiquent déjà le hors-site. Cette vision très large nous a amené à nous intéresser aux différentes facettes de ce mode constructif. 

L’idée derrière ce livre blanc était double : 

●     Montrer la diversité des solutions hors-site en France ;

●     Donner notre vision de ce que pourrait être l’évolution de la filière, afin que le hors site puisse se diffuser largement dans le secteur professionnel de la construction de notre pays, se décliner sous différents niveaux et solutions et  s’adapter aux types architecturaux régionaux.

L’adaptabilité au contexte architectural local est en effet une des conditions pour que le hors-site puisse se développer en France. Un ancrage industriel local permettra également de renforcer sa dimension sociétale. 

Quels sont les grands enjeux et défis à relever pour développer la construction hors-site ?

André de Chefdebien : Ils sont nombreux ! Nous en avons identifié trois principaux :

●     Un enjeu organisationnel. Le hors-site demande un effort de conception initial très important, qui consiste à anticiper tout ce qui va se passer en phase fabrication et montage sur site. Cet effort n’est pas compatible avec les façons usuelles de construire. Il faut donc revoir toute l’organisation du processus.

●     Un enjeu de co-conception. Le hors-site nécessite de faire travailler ensemble plusieurs corps de métiers, qui n’en ont pas forcément l’habitude. Il faut mettre en place les conditions d’une meilleure association et coopération entre ces acteurs, afin de permettre l’échange et le dialogue.

●     Un enjeu de formation. Le hors-site engendre une évolution des métiers, notamment sur les chantiers. La productivité gagnée en usine doit ensuite être transposée sur le terrain. Il faut donc des personnes avec des compétences en assemblage de sous-ensembles.

Les nouvelles technologies numériques, comme le BIM, peuvent-elles aider au déploiement plus massif de la filière ?

André de Chefdebien : Sauf à figer les possibilités de variation d’un projet, Il est très difficile de faire du hors-site sans une digitalisation des procédés de conception et de fabrication. De plus, le digital permet de répondre aux trois enjeux évoqués précédemment : il est à même de favoriser l’anticipation, la co-conception et l’assemblage sur site. Ainsi, dans le livre blanc, nous affirmons que le développement de l’inter-opérabilité entre les outils digitaux métiers est un enjeu majeur pour pouvoir rassembler les architectes, les ingénieurs, les industriels, les artisans autour de projets hors-site. Mais également que « la puissance et la flexibilité de ces outils permettent une industrialisation personnalisée du projet global via les éléments préfabriqués. »

Le BIM apparaît comme un levier indispensable pour déployer la filière et faciliter l’industrialisation des processus. Il offre notamment une promesse de continuité de l’information entre les différents acteurs à chaque étape. Cela permet de garantir l’interopérabilité des processus de la conception à la construction et d’apporter un suivi personnalisé aux opérations.

Quelles sont les prochaines étapes à suivre pour développer le hors-site ?

André de Chefdebien : Il y a encore des progrès à faire sur l’interopérabilité des outils informatiques. Dans le livre blanc, nous notons que « les outils de simulation [...] peinent à transmettre les informations de manière standardisée, au sein d’une maquette unique. » Le BIM est un levier essentiel pour dépasser cet enjeu. 

Une autre étape importante réside dans la mobilisation des maîtres d’ouvrage. Il est nécessaire de les sensibiliser et de les encourager à se tourner vers le hors-site. Ce que fait déjà un peu la RE 2020 d’ailleurs. Cette réglementation est une véritable opportunité pour le développement de ce mode constructif. Elle encourage la mixité des matériaux et porte des exigences fortes en termes de résultats, sur la conception des bâtiments : elle favorise ainsi un travail poussé très en amont du chantier et en ce sens, est favorable au hors-site.

Le hors-site est en plein développement aujourd’hui. Nous constatons un foisonnement d’initiatives sur des éléments divers de bâtiment (par exemple sur l’enveloppe, l’isolation ou encore les planchers, le modulaire 3D, etc.), soutenues par des investissements importants. Il faut continuer sur cette voie !

Télécharger notre livre blanc sur le sujet ! 

La construction hors site progresse chaque année de 25 à 30% à travers le monde et est considérée comme une évolution majeure du secteur de la construction.

Découvrez en plus sur notre livre blanc et le sujet en général sur : http://www.fibres-energivie.eu/fr/actu/livre-blanc-une-construction-hors-site


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