Les effets du déréglement climatique sur le terroir français

Rédigé par

ALTEREA Ingénierie

Ingénieriste de l'énergie

2002 Dernière modification le 15/09/2020 - 09:53
Les effets du déréglement climatique sur le terroir français

Les épisodes caniculaires que nous avons vécus au cours du mois d’août attestent des changements climatiques en cours. On observe ainsi depuis plusieurs années des étés plus chauds qui se révèlent de plus en plus dangereux pour le terroir français 

L’agriculture est paradoxalement responsable et victime du dérèglement climatique. Elle qui représente près de 20% des émissions de GES françaises en subit aujourd’hui les conséquences. L’impact de la variabilité du climat sur le terroir français apparaît souvent négatif, et pourtant il existe des situations dans lesquelles il est profitable.

Le réchauffement climatique, ou plutôt dérèglement climatique

Il convient d’abord de rappeler les caractéristiques propres au dérèglement climatique que nous connaissons aujourd’hui. Il est préférable de parler de dérèglement, et non de réchauffement climatique. En effet, le climat connaît aujourd’hui une forte variabilité, dans les températures chaudes comme les froides.

Cette instabilité se traduit par des écarts de températures plus importants, une hausse progressive de celles-ci et l’apparition de phénomènes météorologiques plus extrêmes et plus réguliers. Ces changements climatiques entraînent ainsi une modification progressive du rythme des saisons, qui vient considérablement troubler les productions céréalières, viticoles et autres, souvent très dépendantes du rythme des éléments.

palmiers

Les effets sur les productions céréalières et maraîchères

Les effets du dérèglement climatique sur les productions céréalières et maraîchères sont sensiblement les mêmes. C’est d’abord une question d’eau. La hausse des températures provoque un phénomène d’évaporation plus important qui réduit l’humidité dans les sols. Les plants ont alors plus de difficulté à accéder à l’eau pour se développer.

De plus, les plantes déploient des mécanismes de défense face aux températures élevées. Pour limiter l’évaporation, elles ferment leurs pores et développent davantage de racines afin d’aller chercher l’eau encore présente dans les sols. Ce mécanisme de défense ralentit leur développement, faisant alors baisser les rendements. On sait ainsi que les rendements de maïs et de soja diminuent d’environ 6% les jours où la température est supérieure à 30 degrés. Ceci est particulièrement problématique dans les régions très productrices telle que la Beauce. Une étude menée par le Potsdam Institute for Climate Impact Research avance même qu’un quart des cultures de blé et un tiers de la production maraîchère pourraient disparaître d’ici 2100.

Enfin, le dérèglement climatique a également pour effet moins connu, la prolifération de mauvaises herbes et parasites (pucerons, chenilles, etc.). Certaines espèces profitent en effet de la hausse des températures, mais également de l’augmentation de la teneur en CO2 dans l’atmosphère. Ceci participe d’autant plus à l’affaiblissement voire au déclin de certains plants.

L’adaptation des agriculteurs est une solution

Des solutions existent pour tenter d’adapter les méthodes de culture. Certains producteurs ont développé des techniques alternatives telles que la modification de la date de semis, l’utilisation de semences à cycle court, l’irrigation renforcée des parcelles, etc. D’autres ont développé des OGM plus résistants à la chaleur, bien que l’impact environnemental de ces derniers soit toujours discutable.

L’alternative qui apparaît cependant la plus durable réside dans une méthode bien connue ; celle de l’agro-écologie. Ce système de culture polyvalent se fonde sur l’utilisation de variétés multiples et adaptées à l’écosystème local. La diversification des cultures permet d’allier des espèces complémentaires et de réduire l’utilisation des ressources. Elle se traduit alors par une meilleure adaptation aux changements environnementaux. En plus de représenter un atout économique pour le producteur, l’agro-écologie représente une alternative permettant de répondre aux besoins des consommateurs tout en respectant l’environnement.

Les effets sur les territoires viticoles

Un des produits phares du terroir français réside bien évidemment dans le vin et le champagne. Si le premier est produit un peu partout sur le territoire, le second repose sur une aire de production assez réduite.

La viticulture et la qualité des vins dépend beaucoup des conditions climatiques : l’équilibre peut être difficile à trouver entre soleil et besoin en eau. On voit déjà les conséquences du changement climatique à travers l’avancement progressif des vendanges. La hausse des températures entraîne une maturation plus précoce du raisin. Ainsi selon l’INRA, les vendanges débutent 2 à 3 semaines plus tôt qu’il y a 30 ans.

vignes

Tous les vignobles ne vivent pas de la même façon ces changements. Dans le Sud-Ouest par exemple, la situation s’avère bénéfique pour les vins rouges du Bordelais. La chaleur et l’ensoleillement produisent en effet de meilleurs millésimes. En revanche, les vins de Sauternes pâtissent de la sécheresse et du manque d’humidité qui produisent trop de sucrosité. Autre exemple en Alsace, où la hausse des températures menace la qualité des vins et les volumes de rendement. Dans la région de la Loire en revanche, la chaleur améliore progressivement la qualité gustative des vins, faisant d’eux les futurs grands vins français.

Pour le champagne, la situation est pour l’instant positive puisque la hausse des températures donne des raisins plus sucrés et donc plus recherchés. Cependant, selon une estimation du GIEC, des vins semblables au champagne pourraient être produits en Norvège d’ici à 2100.

La multiplication des épisodes climatiques extrêmes représente également une menace pour le raisin, en atteste la maison Château d’Yquem qui n’a pu produire de vin en 1992 et 2012 du fait d’une météo trop capricieuse. Quoiqu’il en soit, le dérèglement climatique aura pour effet certain la modification de la carte des vignobles telle qu’on la connait aujourd’hui.

abeilles

Les effets sur la production de miel

Les Français font partie des premiers consommateurs de miel en Europe. Bien que les consommateurs portent également leur choix sur du miel étranger, la France n’est pas en reste. Elle produit près de 20 000 tonnes par an. Mais là encore, la situation apparaît contrastée en fonction des régions.

De manière générale d’abord, il apparaît incontestable que le dérèglement climatique affecte les abeilles. La hausse des températures est dangereuse pour ces dernières qui résistent mal aux grosses chaleurs. La baisse du nombre de pollinisateurs, également due à d’autres facteurs tel que l’épandage de pesticides, entraîne une réduction du nombre de fleurs et plantes. C’est alors un cercle vicieux qui s’instaure, puisque les abeilles récoltent moins, se nourrissent moins et produisent moins. De plus en plus d’apiculteurs se voient obliger de nourrir les colonies (avec du sirop par exemple) du fait du manque de ressources.

Cependant, on voit des régions où la production de miel augmente progressivement. En Bretagne par exemple, les pollinisateurs profitent du climat plus doux pour butiner sur une période plus longue. La production de miel peut débuter alors plus tôt, au printemps souvent. Si l’effet est plutôt positif, on peut tout de même s’interroger sur la durabilité du phénomène.

Ainsi, l’heure est à l’adaptation pour les producteurs du terroir français qui voient leurs habitudes et leurs méthodes bouleversées. Néanmoins, il ne faut pas oublier que l’adaptation doit impérativement être pensée conjointement avec la réduction. Car c’est la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre qui nous permettra réellement de limiter les conséquences du changement climatique et de les anticiper.

Article rédigé par ALTEREA

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