Les biosourcés et le monde agricole font route ensemble !

Rédigé par

Salon BEPOSITIVE

1059 Dernière modification le 03/02/2022 - 10:45
Les biosourcés et le monde agricole font route ensemble !

Avec le RE2020, les filières des matériaux biosourcés sont plus que jamais en effervescence.  Tirés par la demande, poussés par les industriels et stimulés par le monde agricole, les biomatériaux devraient rapidement proposer aux marchés des offres complètes de solutions compétitives et efficaces. Le point avec Guillaume Delannoy, Responsable Développement Industriel et Étude, CODEM, un centre de transfert, de compétences et de connaissances au service des biomatériaux. 


Guillaume Delannoy,
Responsable Développement Industriel et Étude, CODEM

Où en est-on de l’offre biomatériaux ?

Au-delà de la construction bois qui est un sujet à part entière, les biomatériaux montent en puissance dans le bâtiment. Les industriels proposent chaque jour de nouvelles solutions bas carbone. L’entreprise Neolife a développé une farine de bois mixée avec du plastique et produit des bois composite esthétiques et résistants pour le bardage. Certains fabricants utilisent de l’amidon pour fabriquer des plaques de plâtre. On trouve également une peinture à base d’algues, même si la quantité de biomasse est à la marge car la peinture est un produit constitué majoritairement d’eau.  Il y a également Evertree qui vient de lancer une colle 100% biosourcée pour l’ameublement et la construction durable. On peut citer aussi le linoleum à base de lin ou encore des bétons végétaux de chanvre ou de lin avec Bâtilin.  
Mais c’est bien l’isolation que les biomatériaux investissent en priorité. Les solutions se multiplient. Pour y voir plus clair, nous avons édité un guide, en téléchargement sur notre site. Il met en avant des solutions concrètes et éprouvées et aide les utilisateurs dans leurs choix.

Comment la chaine de valeur des biomatériaux se met-elle en place ?

Le monde agricole pousse au développement des biosourcés. Des fabricants de matières premières montent des partenariats avec des coopératives agricoles, c’est ainsi que chaux et chanvre ont été associés pour développer depuis plus de 30 ans, le béton de chanvre. Cavac Biomatériaux, une coopérative agricole a développé sa propre gamme d’isolants à base de fibres végétales. Elle connait une croissance telle qu’elle construit une deuxième usine … De notre côté, nous accompagnons un partenariat entre un fabricant de blocs et COOPENERGIE, une coopérative agricole, dans le cadre du projet BIP-COLZA, un projet de recherche et d’innovation financé par l’ADEME, qui a pour objectif le développement d’éléments préfabriqués en béton de colza. Et puis, il y a les acteurs qui investissent toute la chaîne de valeur. On peut citer ACTIV PAILLE qui a été récompensé par EnergieSprong lors du dernier salon Bepositive en décembre dernier à Lyon. Ces dirigeants sont initialement spécialisés dans le fourrage paille et foin notamment pour la construction. Ils ont développé un nouveau produit d’isolation : une enveloppe extérieure de niveau passif, créée à partir de caissons en bois avec une isolation 100% en paille. Activ Paille gère toute la chaine de valeur, de l’organisation de la collecte des ballots avec un réseau d’agriculteurs, jusqu’à la fabrication de murs, en hors site ou sur chantier.

Où en sont les différentes filières ? 

Le lin et chanvre sont des plantes cultivées depuis toujours pour leurs fibres. Leurs modèles économiques sont déjà structurés avec des acteurs qui ont une vision industrielle. Au-delà de la récolte des graines, les agriculteurs livrent les pailles à des transformateurs qui vont séparer les fibres du reste de la paille qui sera transformée en granulats. Si la fibre est valorisée dans le textile ou les matériaux composites, les granulats ont des débouchés comme le paillage ou les panneaux de particules. Le chanvre devant valoriser toute la plante, l’application Bâtiment a été imaginé il y a de nombreuses années. Pour le lin, c’est plus récent, la fibre a une valeur beaucoup plus importante. 
Par contre pour le colza, tout est à construire. Qui collecte la paille laissée sur champ ? Qui la stocke ? Qui la transforme ? Qui fait l’investissement machine ? L’agriculteur ou l’éventuel transformateur ? Il faut structurer la chaine de valeur. 

Est-ce que la chaine de valeur des biomatériaux doit se positionner à un niveau local exclusivement ?

Nous venons de réaliser un gros travail collectif avec le hub des prescripteurs bas carbone autour de la filière biosourcé. Une des questions portait sur l’empreinte carbone de matériaux biosourcés si la matière première devait traverser la France pour être mise en œuvre sur chantier. Conclusion de cette étude, le gain d’un biosourcé en carbone est tel qu’il peut largement voyager à l’échelle de la France. Bien sûr, il est important que chaque territoire priorise sa ressource locale pour être au maximum dans l’économie circulaire, mais il ne faut pas interdire d’aller plus loin. Il faut mettre les efforts financiers aux bons endroits. Quand, pour transformer de la paille, il faut investir des millions d’euros dans une usine à proximité des lieux de récolte, où est le bénéfice carbone ?  Les filières existantes sont en train d’identifier des zones stratégiques à la croisée de territoires qui pourraient optimiser les chaines de valeur. 

Quels sont les freins à la mise en place des biomatériaux ?

Les usagers réclament de plus en plus des matériaux décarbonés et plus sains, notamment pour la qualité de l’air intérieur. Mais les prix de ces matériaux sont plus élevés et représentent un vrai frein à leur développement. Les usagers ont souvent du mal à franchir le pas. Ils s’interrogent sur la plus-value à la revente de leur bien. Ils préfèreront souvent investir dans une cuisine équipée. Mais ce frein sera levé dès que les filières auront réussi à massifier la production et à faire baisser les prix. Et il y a le frein psychologique sur biosourcé lié au risque incendie. Mais là, on est sur des préjugés. Par exemple le polystyrène présente aussi ce risque mais il n’a pas cette image. Là aussi, les industriels développent des solutions innovantes pour faire baisser l’appréhension du risque. Par exemple, des alliances se créent pour proposer non plus un isolant seul mais la combinaison avec une plaque de plâtre. Comme le système complet est testé, les résultats au feu sont meilleurs et plus proches de la réalité à l’échelle du bâtiment. L’ADEME et les territoires devront s’impliquer et donner un coup de main pour imaginer des solutions en intégrant le contexte réglementaire et surtout assurantiel. Mais la dynamique est en marche. Avec la RE2020, les choses devraient évoluer rapidement.

En savoir plus sur CODEM/ Le BATAB


image source: Depositphotos

Actualité publiée sur Salon Bepositive
Consulter la source

Partager :