La végétation urbaine face aux fortes chaleurs et l'impact sur le confort thermique

Rédigé par

Eric LARREY

Directeur de l'innovation

9064 Dernière modification le 22/02/2022 - 11:03
La végétation urbaine face aux fortes chaleurs et l'impact sur le confort thermique

Développer la présence du végétal afin de rafraîchir l'espace public et lutter contre les îlots de chaleur est à juste titre une des principales mesures mises en oeuvre dans les cœurs urbains. Quel est alors le bénéfice apporté en matière de confort thermique ? Pour répondre à cette question légitime, il est nécessaire de s'intéresser au comportement de la végétation confrontée à deux réalités souvent concomitantes : les fortes chaleurs et le stress hydrique

Nos espaces urbains connaissent des conditions climatiques toujours plus extrêmes et déréglées, soumettant la végétation à des stress fréquents. Nous avons déjà abordé la question du stress hydrique dans un précédent article. Les symptômes sont d'abord une diminution temporaire des apports écosystémiques, notamment le rafraîchissement et la photosynthèse. Cette diminution peut évoluer en disparition totale, temporaire puis permanente, s'accompagnant potentiellement de la destruction d'une partie ou de la totalité de la structure végétale. Si ce stress hydrique peut s'observer couramment durant les périodes estivales, elles n'en ont pas l'apanage. Toute période prolongée sans précipitations peut l'occasionner. 

Mais qu'en est-il lorsque la végétation est soumise à des températures élevées, alors même que l'accès à la ressource en eau reste possible ? 

La figure ci-contre représente l'évolution de la température à l'abri d'une structure végétale arborée, composée d'essences européennes au cours d'une journée chaude

Cette structure est dotée d'un fort pouvoir rafraîchissant, du moins tant que la température extérieure ne dépasse pas une certaine limite. Dès que la température extérieure dépasse les 35°C, on note une très rapide baisse du potentiel de rafraîchissement, pouvant atteindre 60 à 70%. Ce changement de comportement au seuil de 35°C a déjà été identifié, comme par Bueno et al (1). 

Certains végétaux, notamment ceux de nos régions, ne sont pas toujours adaptés aux températures très élevées. Pour se protéger de la surchauffe et du rayonnement solaire, ils développent diverses stratégies. Ces dernières limitent ou stoppent l'évapotranspiration, modifient l'orientation des feuilles pour réduir l'interception solaire... Par voie de conséquence, ces mêmes végétaux limitent ou stoppent la photosynthèse, réduisant l'ensemble des apports écosystémiques. Sur le long terme, l'exposition de ces végétaux à des conditions extrêmes peut conduire à des modifications plus profondes et durables, à des difficultés de croissance, ...

Cette autre figure présente, dans les mêmes conditions, le comportement d'une structure végétale non arborée composée d'essences plus résistantes aux fortes températures. Si le potentiel de rafraîchissement est moindre, il ne présente pas de dégradation particulière dans la plage de température rencontrée. Les services écosystémiques tels que l'évapotranspiration et la photosynthèse sont maintenus.

Si le stress hydrique s'ajoute à cette situation, les effets sur le confort thermique sont encore plus importants. 

 

Autant d'effets qu'il est nécessaire de prendre en compte pour répondre au mieux à la question initiale : quel rafraîchissement peut-on attendre d'un projet de végétalisation ? C'est ce que nous intégrons dans nos outils de simulation de l'ambiance thermique usager, comme l'illustre la séquence suivante. Il s'agit d'un projet d'aménagement fictif autour d'un ensemble de bâtiments, mêlant différentes solutions et essences végétales, soumises tour à tour à l'effet de seuil de température et au stress hydrique. 

 

Le choix de la palette végétale et sa stratification, la mixité des essences et l'accès à la ressource en eau sont autant de points d'attention pour permettre de concevoir des projets de végétalisation pérennes, respectueux des végétaux et à même de maintenir leurs apports écosystémiques.

(1) Bueno, A.; Alfarhan, A.; Arand, K.; Burghardt, M.; Deininger, A.-C.; Hedrich, R.; Leide, J.; Seufert, P.;
Staiger, S.; Riederer, M. Effects of temperature on the cuticular transpiration barrier of two desert plants with
water-spender and water-saver strategies. J. Exp. Bot. 2019, 70, 1613–1625.

 

 

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