La normalisation des données va renforcer l'impact des évaluations du cycle de vie pour les bâtiments « zéro carbone »

Enzo Blonk, Head of Market Europe chez Cobuilder
Le secteur de la construction est l'un des principaux responsables des émissions de carbone et de la production de déchets au niveau mondial. Les conclusions de la Commission européenne montrent que le secteur est à l'origine d'environ 40 % de la consommation d'énergie et de 36 % des émissions de CO2 dans l'UE. Que ce soit pour se conformer à la législation ou pensé dans une démarche de Responsabilité Sociale, le développement durable est désormais une priorité pour de nombreuses organisations du secteur et la nécessité d'évaluer l'impact environnemental des projets de construction s'en est trouvée accrue.
Le rôle croissant des évaluations du cycle de vie pour évaluer l’impact environnemental d’un projet de construction
Dans un tel contexte, l'analyse du cycle de vie (ACV) apparait comme la méthode d‘analyse la plus complète pour mesurer l'impact environnemental d'un produit ou d'un matériau utilisé dans un bâtiment tout au long de son cycle de vie, depuis sa fabrication jusqu'à son installation, son entretien et sa démolition éventuelle. Grâce à l'ACV, les constructeurs peuvent prendre des décisions mieux informées sur les matériaux et les processus qu'ils utilisent, dans le but de créer des pratiques de construction plus durables et plus efficaces.
Il existe toutefois des obstacles à l'adoption généralisée des ACV. L'un des plus importants concerne la collecte et la cohérence des données. Les données complètes et précises nécessaires pour déterminer l'impact environnemental des différents matériaux et processus font souvent défaut.
Le casse-tête de la collecte de données : entre manque d’informations et hétérogénéité
Tout d'abord, tous les fabricants ne fournissent pas les données nécessaires pour évaluer les effets de leurs produits sur l'environnement. Cela peut être dû au fait qu'ils ne disposent pas des données souhaitées ou qu'ils choisissent simplement de ne pas les divulguer.
Un autre défi est le risque de divergences dans les données collectées, telles que des informations obsolètes ou des différences dans les sources de données et la méthodologie de collecte, ce qui peut conduire à des évaluations incorrectes ou incomplètes des résultats. Le grand nombre d’entreprises et parties prenantes impliquées dans un projet de construction complique souvent le processus de collecte d'informations.
La mise en place de nouvelles normes pour homogénéiser la collecte de données
Des changements sont en cours dans l'industrie pour résoudre ces problèmes de collecte de données. A titre d’exemple, l'ISO, l'organisme international de normalisation, a publié la norme ISO 22057 qui décrit une approche numérique normalisée, utilisant la méthodologie du modèle de description pour échanger des données EPD pour les produits de construction.
Ce modèle de données fournit à toutes les parties un langage technique commun qui leur permet de collecter et de partager de grandes quantités d'informations précises. Pour ce faire, il fournit aux acteurs de l'industrie des données accessibles basées sur des normes internationales et conformes aux réglementations sectorielles et nationales. Cela inclut désormais les données environnementales, actuellement disponibles dans le format normalisé EPD (déclaration environnementale de produits).
Dans le passé, le manque de données normalisées s'est avéré être un obstacle majeur à la réalisation d'ACV complètes et précises. Aujourd'hui, les organisations peuvent utiliser des outils tels que les EPD, les dictionnaires de données et les modèles de données pour développer une méthode commune de description des objets, des produits, des systèmes, des matériaux et des actifs. Cela permet d'éliminer l'ambiguïté du langage dans l'échange d'informations et de créer une source holistique de données dans laquelle les organisations peuvent puiser.
D’autres normes et méthodes sont progressivement mises en place pour mieux collecter l’information et mieux la structurer. Par exemple la norme ISO 7817 (dont la première partie est disponible et dont les parties 2 et 3 sont à venir), ou encore le concept LOIN introduit par la norme ISO 19650 et défini plus précisément par la norme européenne de la série 17412.
L'approche systémique des évaluations du cycle de vie jouera un rôle important en aidant les acteurs du secteur de la construction à atteindre leurs objectifs en matière d'émissions nettes de carbone. Les organisations doivent non seulement comprendre la méthodologie de réalisation de ces ACV, mais aussi réfléchir à la manière dont elles peuvent rendre leurs données précises et accessibles afin d'en faire bénéficier d'autres acteurs de l'industrie. Cela n'est possible que si nous décrivons les choses de manière cohérente.