#15 - La construction bois : description des techniques et du cadre réglementaire

Rédigé par

Rémi Decoene

Directeur Général

10397 Dernière modification le 22/06/2022 - 12:30
#15 - La construction bois : description des techniques et du cadre réglementaire

La construction bois connaît un regain d’intérêt au niveau national ces dernières années, notamment avec la mise en place de la RE2020. En effet, l’analyse de cycle de vie du bâtiment met en avant la construction bois par rapport aux autres systèmes constructifs grâce à son impact carbone limité. Cependant, son cadre réglementaire évolue très vite et il devient essentiel de le maîtriser dès les premières phases de conception.  

Les systèmes constructifs bois

Construction à ossature bois – COB

La Construction à Ossature Bois (COB) consiste à l’assemblage de parois verticales (façade porteuse) et horizontales (plancher et toiture) pour former un bâtiment. Ces parois sont composées d’ossatures bois espacées de 600 mm maximum formant des vides qui peuvent être remplis d’isolant. Un panneau à base de bois (diaphragme) vient recouvrir les éléments pour apporter la stabilité.
Les éléments peuvent être assemblés sur chantier ou préfabriqués en usine. La préfabrication peut aller d’un mur ou un plancher simple à des modules 3D intégrant l’ensemble des lots techniques et architecturaux.
Cette technique est régie par le DTU 31.2.

  • Avantages : légèreté, rapidité d’exécution, économique, gain de surface comparée aux solutions dites « traditionnelles » avec une isolation extérieure, isolation intégrée dans l’épaisseur des montants d’ossature
  • Inconvénients : faible inertie thermique, soin particulier à apporter au traitement de l’acoustique, utilisation possible jusqu’à R+5 maximum (au-delà, il faudra passer par le système FOB décrit ci-dessous)

Façade à ossature bois – FOB

Les Façades à Ossature Bois (FOB) sont dites non porteuses. Elles ne participent pas à la stabilité du bâtiment. Elles se mettent en œuvre sur une structure primaire (poteau/poutre, plancher/refend), neuve ou existante, qui peut être en béton, métal ou bois.

Cette technique, applicable jusqu’à 28 m de hauteur, vient envelopper le bâtiment et assure l’étanchéité à l’eau et à l’air du bâtiment.

Elle est régie par le DTU 31.4.

  • Avantages : gain de surface comparée aux solutions dites « traditionnelles » avec une isolation extérieure, rapidité de mise en œuvre, allègement du poids global du bâtiment, isolation intégrée dans l’épaisseur des montants d’ossature
  • Inconvénients : gestion des interfaces avec la structure primaire, faible disponibilité de revêtements de façade sous avis technique ou DTU

Bois lamellé croisé – CLT

Le bois lamellé croisé ou CLT (Cross Laminated Timber) est un matériau de construction se présentant sous la forme de panneaux constitués de plusieurs couches de bois massif. Chaque couche est constituée de lames de bois de 20 à 40 mm d’épaisseur et orientée à 90° par rapport à la couche contiguë.

Il est possible de construire un bâtiment entièrement en CLT car les panneaux peuvent être utilisés en façade porteuse, en plancher ou en toiture.

Cette technique n’est pas régie par un DTU. Suite au Grenelle de l’environnement en 2012, un guide s’intitulant « Panneaux massifs bois contrecollés – Décembre 2014 ». Il existe également des avis techniques spécifiques à chaque fournisseur.

  • Avantages : rapidité de pose, très bonnes caractéristiques structurelles pour la grande hauteur ou les grandes portées, bonne inertie thermique
  • Inconvénients : forte consommation de matières premières bois s’il n’est pas utilisé pour ses caractéristiques mécaniques, isolation thermique à ajouter en surépaisseur
     

La réglementation spécifique à la construction bois

Sécurité incendie

En termes de sécurité incendie, il existe des textes spécifiques à la construction bois qui sont venus compléter les textes généraux. On sait dimensionner ou protéger les structures bois pour qu’elles restent stables au feu le temps que les pompiers puissent intervenir et faire évacuer les personnes. Mais le bois est un matériau avec un fort pouvoir calorifique pouvant alimenter un incendie avec un risque de généralisation et de propagation aux bâtiments voisins.

La Préfecture de Police et les Pompiers de Paris ont sorti un document en juillet 2021 : la « Doctrine pour la construction des immeubles en matériaux biosourcés et combustibles ». Ce document est applicable en Ile de France mais les bureaux de contrôle commencent à demander son application dans d’autres régions françaises.

Il existe également un texte, applicable sur l’ensemble du territoire, relatif à la propagation du feu en façade : « Bois construction et propagation du feu par les façades – Appréciation de laboratoire – Version 3.1 du 07/12/2020 ».

Ce guide est le résultat d’une campagne d’essais qui ont été réalisés entre 2012 et 2015 et s’applique aux bâtiments d’habitation de 3ème et 4ème famille ainsi qu’aux ERP dont le dernier plancher accessible est à plus de 8 m de hauteur.

Revêtements extérieurs

Un des inconvénients de la construction bois est la faible disponibilité de revêtements de façade en technique courante pour une pose sur COB ou CLT et plus particulièrement sur FOB.

Sur COB ou CLT, les avis techniques permettent la pose de bardages jusqu’à une hauteur de 18 m et la pose d’enduit sur isolant jusqu’à 9 m. Le DTU 41.2 régissant la pose de bardage bois et les règles professionnelles pour les tuiles de terre cuite et le zinc permettent une pose jusqu’à 28 m.

Pour la FOB, il n’existe pas de cadre réglementaire permettant la pose de revêtements extérieurs.

C’est pourquoi certaines entreprises ou industriels ont recours à des Appréciations Techniques d’Expérimentation (ATEx) afin de pouvoir réaliser la pose de leurs produits dans un domaine d’emploi non visé par le cadre réglementaire.
 

Appréciation technique d'expérimentation - Atex

Lorsqu’on sort du cadre réglementaire décrit ci-dessus (Norme, DTU, avis techniques ou guides d’application), dans un cadre assurantiel, la technique employée est dite non courante. Le contrôleur technique d’une opération est en droit de demander une Appréciation Technique d’Expérimentation, dite ATEx, afin de valider la technique à mettre en œuvre. Cette ATEx permettra d’assurer un bâtiment en technique courante.

Il existe 3 types d’ATEx :

  • ATEx cas a : l'Appréciation vise un produit ou procédé pour une durée limitée déterminée. On peut la considérer comme un « pré-avis technique »
  • ATEx cas b : l'Appréciation porte sur un projet de réalisation spécifique
  • ATEx cas c : l’Appréciation porte sur l’application à une nouvelle réalisation expérimentale d’une ou plusieurs techniques, ayant précédemment fait l’objet d’une ATEx cas b à caractère favorable

Délais

À partir du dépôt du dossier de présentation de l’opération pour laquelle une ATEx est demandée, le CSTB va étudier sa recevabilité. Si le dossier est jugé recevable, un délai de 12 mois est accordé pour apporter toutes les justifications demandées. Le délai moyen d’obtention d’une ATEx est de 6 à 9 mois en fonction de la rapidité du demandeur à monter son dossier technique.

Coût d’une ATEx

Il y a plusieurs choses à prévoir lors de la budgétisation d’une ATEx.

Au-delà du CSTB, il faudra rémunérer le rapporteur de l’ATEx. C’est un bureau de contrôle qui se charge de cette fonction et qui défendra le dossier devant le comité d’experts.

Dans les justifications demandées par le CSTB, certaines se font de manière expérimentale, sous forme de simulation informatique ou en laboratoire pour lesquelles la fabrication de maquette sera à prévoir. Voici les demandes courantes dans le cadre d’une ATEx : une appréciation de laboratoire (APL) visant le risque incendie, essai AEV d’une façade complète, étude des transferts hygrothermiques (étude WUFI), essais de déformation…

Enfin, beaucoup d’entreprises prennent un conseil technique pour les accompagner dans le montage du dossier d’ATEx.

Si on additionne l’ensemble des coûts, on peut considérer qu’une ATEx coûte entre 40 000 et 70 000 € en fonction des essais à réaliser et des options retenues par le demandeur.

 

Un article signé Rémi Decoene, directeur général chez Insitu-a


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