Intelligence artificielle et ingénierie de la construction

Rédigé par

Bruno GEORGE

4336 Dernière modification le 20/12/2018 - 09:00
Intelligence artificielle et ingénierie de la construction

20 ans après l’arrivée du numérique, après avoir profité, subi, expérimenté, gagné en productivité, en précision, en efficacité, les outils peinent encore à fournir des usages à notre main. 

D’immenses progrès sont accomplis grâce au numérique. La « data » devient une valeur croustillante. Cependant, l’agilité manque vraiment à ces outils. Et de fait à l’ingénierie d’aujourd’hui. On aurait presque l’impression que pour être bien, tout outil doit être lourd. L’arrivée, voici 10 ans, de l’intelligence au travail, de logiciels miracle, du BIM serait-elle la solution ? Avec des propos comme « Nous allons vous apprendre à travailler de manière nouvelle », le collaboratif, en mode militaire, est arrivé. Avec en toile de fond le slogan : « Ne vous inquiétez, nous avons pensé à tout ». Aujourd’hui, l’intelligence artificielle fait rêver nos techno (philes, crates, logies, …) !

IA versus IH

L’intelligence humaine avec ses faiblesses, ses lenteurs, son manque de fiabilité, de mémoire, de rapidité, son risque d’indisponibilité, fait pourtant évoluer le monde depuis quelques dizaines de milliers d’années. Si le formidable potentiel de l‘IA réside dans des vitesses de calcul sans limite, l’absence de fatigue, des capacités presque infinies de mémoire, l’informatique doit être programmé et de fait, le problème défini, cerné, au préalable. Cette dimension laisse encore un champ très large à l’humain dans tous les domaines de l’imaginaire, de l’innovation, de la rupture, du décalage, de l’irrationnel… Il faut se rappeler avec humilité le grand nombre « d’inventions » dues au hasard.

Problème de gouvernance

Les limites de l’IA ne sont pas techniques mais bien de gouvernance. Le management protéiforme et planétaire de l’IA et ses investissements colossaux dépendent de conjectures commerciales, historiques et vénales et de situations de monopole. Le danger est bien là, dans la concentration opérationnelle des pouvoirs et le risque d’une potentielle GAFAtisation de notre destinée, avec des objectifs prédéterminés et une pensée unique sur des critères loin d’être éthiques.

L’usage de l’IA dans l’ingénierie bâtiment devient sûrement fatal dans le bon sens du terme, dans une logique d’optimisation, qui nécessitera d’autant plus le recours à l’IA que la complexité des projets sera importante. La question n’est pas de savoir si c’est « bien ou pas bien », mais plutôt « comment doit-on faire ? », notamment pour donner un travail plus captivant à nos équipes de conception et garder la main sur notre devenir. Plus que les atouts et travers de l’intelligence artificielle, c’est la question de la culture qu’il convient de poser. Les grandes avancées de ce monde sont dues à l’intelligence, à l’imaginaire et à la capacité de rupture de gens « cultivés ». Tels sont les racines du comportement humain.

« La guerre ! C’est une chose trop grave pour la confier à des militaires’’, selon Georges CLEMENCEAU. De la même manière, ne laissons pas l’IA aux mains des lobbys et des informaticiens, prenons part au développement de ces projets. »

Article signé Bruno Georges, Directeur développement grands projets Oteis ITF

© vege

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