ICU : le paradoxe des températures de surface

Rédigé par

Eric LARREY

Directeur de l'innovation

8933 Dernière modification le 26/01/2022 - 09:29
ICU : le paradoxe des températures de surface

 

L’identification des ICU (îlots de chaleur urbains) et des IFU (îlots de fraîcheur urbains) à l’échelle d'un territoire, d'une ville ou d'un quartier repose souvent sur la notion de température de sol, de température du revêtement, obtenue par voie de thermographie (satellite, avion ou drone, caméra à main). S’il s’agit-là d’une information d’importance, il est pourtant nécessaire de la manier avec précaution.

D'autant que cette analyse conduit souvent à adopter un principe d’aménagement demandant à favoriser les revêtements de sol à albédo élevé (des revêtements clairs, pour faire simple). Ces matériaux réfléchissent plus fortement le rayonnement solaire, absorbent donc moins d’énergie thermique, présentant ainsi une température de surface plus faible.

Cependant, il peut en aller tout autrement pour la température ressentie par les usagers, notamment durant la journée. Pour illustrer notre propos, prenons le cas de quatre sites en coeur de ville (Vichy, 03), où nous menons des campagnes de monitoring de l’ambiance thermique.Trois places sont numérotées 1, 2 et 3, du revêtement le plus sombre au plus clair, le 4e espace est un espace engazonné. Le classement des sites par température moyenne de sol croissante (estimée à partir de données LANDSAT) est 3, 4, 2 et 1. Le revêtement de la place la plus sombre, d'albédo le plus faible, a la température la plus élevée.

Il en va tout autrement pour la température ressentie par l’usager, qui suit un classement totalement différent avec, par ordre croissant : 4, 1, 2 et 3. La place minérale la plus chaude a le revêtement le plus clair.

La température de sol peut donc s'avérer un indicateur trompeur de présence d’un îlot de chaleur, conduisant à des interprétations erronées, car il ne présage pas de l’ambiance thermique ressentie par l’usager :

  • Densité du bâti (en surface et hauteur)
  • Présence de végétation, proximité d’un espace vert
  • Exposition aux vents dominants

On constate également que les profils de température au cours de la journée sont très différents sur sol clair et sur sol sombre (voir graphe ci-dessus). La montée en température est plus rapide en matinée sur sol clair. Au contraire, le pic de température sur sol sombre est plus fréquemment observé en fin de journée, quand les matériaux relarguent la chaleur emmagasinée durant la journée. Le schéma suivant résume ce principe.

L'appel à des modèles thermiques travaillant sur des températures thermiques "à hauteur d'usager" sont de ce fait plus pertinents pour déterminer des cartographies d'ICU ou pour rendre compte de l'ambiance thermique et de l'impact de projets d'aménagement. 

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