[Entretien] Des référentiels internes pour aller au-delà des réglementations et normes existantes : l’exemple de Poste Immo

2939 Dernière modification le 05/07/2021 - 11:00
[Entretien] Des référentiels internes pour aller au-delà des réglementations et normes existantes : l’exemple de Poste Immo

 

La lutte contre le changement climatique pousse les normes et réglementations à devenir de plus en plus exigeantes, invitant tous les acteurs du bâtiment à revoir leurs cahiers des charges. Certaines structures ont fait le choix de prendre les devants en construisant des référentiels internes qui vont au-delà des attentes réglementaires. C’est le cas de Poste Immo, qui a mis en place des cahiers des charges ambitieux et, surtout, réplicables. Entretien avec Claire Ventejou, Responsable Développement Durable chez Poste Immo. 

 

Quelles sont les réglementations et normes majeures avec lesquelles vous travaillez au quotidien ? 

Claire Ventejou : Sur le volet immobilier durable nous dépendons, comme tous les bâtiments, des réglementations thermiques et des normes énergétiques. Pour la construction neuve, ce sont la RT2012 et la future RE2020. Pour l’existant, nous nous basons sur la RT existante. En plus de ces réglementations, nous nous positionnons sur des normes et des référentiels ambitieux. Par exemple, notre parc est certifié ISO 50 001 (une norme internationale qui propose une méthodologie poussée de management de l’énergie). 

En plus des obligations thermiques et énergétiques, nous devons tenir compte de normes et réglementations sur la biodiversité, sur les matériaux bas carbone, etc. Mais les RT sont vraiment au cœur de notre travail. 

La particularité de Poste Immo est la taille et la diversité du parc que nous gérons. Ce dernier comprend environ 10 000 bâtiments, pour 6.2 millions de m² et est assez diffus sur le territoire. C’est donc un grand travail de s’assurer que chaque bâtiment soit conforme aux normes. 

 

Pourquoi développer des référentiels internes en complément de ces réglementations et normes ? 

C. Ventejou : Poste Immo travaille depuis longtemps sur le développement de référentiels internes complémentaires. Cela nous permet de poursuivre deux objectifs : 

  • Anticiper les normes à venir. Nous savons que chaque nouvelle réglementation est plus exigeante que la précédente. Développer des référentiels ambitieux nous permet d’avoir un coup d’avance sur l’évolution réglementaire. 

  • Rendre les normes existantes applicables aux spécificités de notre parc. La typologie de nos bâtiments est très variée : cela peut aller du petit bureau de poste en campagne à la grande plateforme logistique, en passant par des hôtels des postes en centre-ville. Nos référentiels internes nous aident à adapter au cas par cas les normes et réglementations dans les cahiers des charges. 

Nos cahiers des charges internes sont établis d’après notre politique Immobilier durable, mise à jour en 2019. Cette dernière se décline en quatre piliers : 

  • Les énergies : améliorer les performances énergétiques, recourir à de l’énergie renouvelable, etc. 

  • Le climat : développer l’usage d’énergies et matériaux bas carbone, fixer des objectifs compatibles avec la SNBC, etc. 

  • L’économie circulaire : mieux gérer les déchets de chantier, favoriser le réemploi, etc. 

  • La biodiversité : protéger et favoriser la biodiversité, etc. 

 

Pouvez-vous nous détailler quels sont les différents référentiels internes que vous utilisez ?  

C. Ventejou : Poste Immo travaille sur deux typologies de travaux : les gros projets, en neuf ou en rénovation, qui concernent des bâtiments bien identifiés, avec des cahiers des charges spécifiques, et les travaux d’entretien et de maintenance qui reviennent régulièrement. C’est cette dernière typologie qui nous demande le plus de travail. Nous les regroupons sous l’appellation « travaux GRGE ». La réglementation nationale est moins développée pour ces travaux que pour les gros projets. C’est pourquoi nous avons proposé dès 2014 un cahier des charges interne avec des minima ambitieux (remis à jour récemment). Nous avons imposé des performances sur les menuiseries, sur les équipements énergétiques, sur la résistance thermique des isolants, etc. De plus, nous avons intégré des critères bas carbone lors de la remise à jour du document. Notre objectif est de faire en sorte que ces travaux de rénovation parcellaire atteignent au moins le niveau BBC rénovation. 

Pour les gros projets, nous avons des cahiers des charges ciblés par typologie d’actifs (plateforme logistique, bureaux de postes, résidences services seniors, etc.). Cela doit nous permettre d’aller chercher les certifications. Par exemple, pour les plateformes logistiques, nous avons des critères précis sur la récupération des eaux de pluie et sur les performances énergétiques. Mais les cahiers des charges des gros projets ont également des critères communs : ils intègrent tous la question du confort d’été, surtout dans les bureaux de poste, où les utilisateurs demandent régulièrement de la climatisation, mais également celle de la gestion des déchets.  

Enfin, les gros projets atypiques, comme la Poste du Louvre, ont des cahiers des charges bien spécifiques, avec des critères très exigeants. Il s’agit de réaliser des opérations particulièrement ambitieuses et exemplaires. 

 

Avez-vous des exemples de projets inspirants qui intègrent ces référentiels internes ? 

C. Ventejou : Un des projets les plus ambitieux de Poste Immo est la maison de l’innovation, à Nantes. Ce bâtiment va accueillir la direction des services informatiques du Groupe La Poste. Le projet prévoit la déconstruction de deux bâtiments déjà existants et l’extension de la parcelle. 

Nous avons mené un gros travail dans le cahier des charges sur la récupération de chaleur des équipements informatiques, le rafraichissement adiabatique, le réemploi des matériaux issus de la déconstruction des bâtiments existants, le raccordement au réseau de chaleur urbain ou encore la préservation de la biodiversité. La phase chantier vient de commencer. Nous visons la certification HQE développement durable niveau excellent, le label E2C1, le label Osmoz, le label Biodivercity, ainsi que le label R2S.  

Un autre projet inspirant est la rénovation de l’hôtel des postes de Marseille – Colbert. Tout l’enjeu de cette rénovation était d’allier la préservation du patrimoine historique et les performances énergétiques. Ce projet a obtenu de très bonnes certifications et labels, comme la certification NF HQE Bâtiments tertiaires de niveau Excellent et le label BDM Or.  

Nous avons également obtenu le niveau de certification NF HQE "très bon" pour notre projet de construction de la plateforme colis de la Buissière. Toute l’opération a été mûrement réfléchie en amont, afin d’avoir les meilleures performances possibles tout en préservant l’environnement aux alentours : recours à une PAC, gestion des eaux pluviales, travail sur la biodiversité, travail sur l’emprise au sol du bâtiment, etc.  

 

Est-ce que vos référentiels internes sont reproductibles ? 

C. Ventejou : Tout à fait. Notre cahier des charges dédié aux travaux de rénovation GRGE est quasiment un guide de rénovation énergétique. Il est compréhensible, complet et très détaillé. Une autre structure pourrait le reprendre et l’assimiler aisément, peu importe la typologie du bâtiment. 

Nos cahiers des charges spécifiques sont également reproductibles. Cependant, leur réplicabilité va dépendre de la typologie des bâtiments. Par exemple, notre cahier des charges pour les plateformes logistiques s’appliquera aux autres plateformes, et ainsi de suite.  

Nous espérons que nos référentiels inspireront d’autres structures ! 

 

Propos reccueillis par Manon Salé, Construction21, la rédaction

 


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