[Dossier Quartiers Bas Carbone] #12 Le réseau d’échange de chaleur et de froid de Paris-Saclay : un modèle innovant au service de la transition énergétique

Rédigé par

EPA Paris-Saclay

3049 Dernière modification le 24/01/2020 - 12:30
[Dossier Quartiers Bas Carbone] #12 Le réseau d’échange de chaleur et de froid de Paris-Saclay : un modèle innovant au service de la transition énergétique

Paris-Saclay rassemble un écosystème d’innovation sans équivalent en Europe. 15 % de la recherche nationale s’y concentrent et représentent 40 % des emplois, publics comme privés, de la recherche d’Ile-de-France. La richesse de cet écosystème tient non seulement à la proximité et à la densité des liens que les industriels entretiennent avec les établissements d’enseignement supérieur et les laboratoires de recherche, mais également au foisonnement entrepreneurial que cet environnement suscite.

Nous trouvons sur le territoire de grands industriels de l’énergie qui s’appuient sur les compétences des acteurs des TIC, en particulier en matière d’Intelligence artificielle, pour développer des solutions de gestion intelligente de l’énergie aussi bien que des technologies pour la production d’énergies renouvelables et locales. C’est notamment le cas de l’Institut photovoltaïque d’Île-de-France. Cet institut pour la transition énergétique, né d’un partenariat entre d’une part Air Liquide, EDF, Total, Horiba et Riber, et d’autre part l’Ecole polytechnique et le CNRS, accueille également en son sein start-up et PME autour du développement de l’énergie solaire. Cette dynamique de coopération, portée par l’ampleur exceptionnelle du projet d’aménagement, s’illustre aussi par des grands projets pour faire la ville durable. Ainsi l’été dernier, l’EPA Paris-Saclay a inauguré la plus grande boucle tempérée renouvelable de France avec ses 25 km de réseau. L’EPA Paris-Saclay, assisté de son AMO (groupement Tilia/Alto/SWA), est maître d’ouvrage et exploitant du réseau, et a conclu un contrat de conception-réalisation-exploitation-maintenance avec le groupe Idex et, en sous-traitance, un groupement d’entreprises composé d’Idex Énergies et d’Egis.

Première mondiale à cette échelle, ce nouveau modèle énergétique s’inscrit dans la stratégie d’aménagement durable de l’Etablissement public d’aménagement (EPA) Paris-Saclay. Elle participe également à la construction d’un éco-territoire innovant, où la valorisation des énergies locales et renouvelables est portée par un système de gestion intelligent aux nombreux avantages.

 

Un réseau d’échange de chaleur et de froid utilisant la géothermie profonde

 

Le contexte du projet

L’aménagement du campus urbain Paris-Saclay est l’opportunité de mettre en œuvre la nouvelle gouvernance préconisée par la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte tout en répondant aux objectifs fixés par la COP21. Cette ambition se traduit localement par l’adoption d’un modèle sobre en énergie et faiblement carboné qui implique de travailler conjointement sur la performance des constructions neuves, la rénovation du parc existant et la production in situ d’énergies renouvelables. La création d’un réseau d’échange de chaleur et de froid s’inscrit dans cette dynamique. Elle repose en effet sur l’utilisation d’une source d’énergie propre, compétitive et disponible en Île-de-France : la géothermie.

 

La géothermie, une énergie propre et compétitive

Conçu autour de la plus grande boucle de distribution tempérée de France, le réseau d’échange de chaleur et de froid de Paris-Saclay est alimenté par la nappe souterraine de l’Albien, soit 700 milliards de mètres cubes d’eau à une température moyenne de 30°C. Pour valoriser cette énergie présente dans une partie du bassin parisien, des forages ont été réalisés à 700 mètres de profondeur dans les ZAC du quartier de l’École Polytechnique et de Moulon en partenariat avec le Syndicat des Eaux d’Île-de-France. Ces puits géothermiques servent à la fois à pomper l’eau puis, après en avoir prélevé les calories, à la réinjecter dans l’Albien. Raccordés au réseau, ils fourniront à terme de l’énergie renouvelable à l’ensemble des bâtiments du campus Paris-Saclay.

Forages quartier de l’Ecole Polytechnique, Carlos Ayesta

Une gestion intelligente de l’énergie garante de la performance environnementale du réseau

 

Le fonctionnement du réseau d’échange de chaleur et de froid

L’EPA Paris-Saclay a fixé comme objectif l’utilisation sur le campus urbain d’une énergie à plus de 60% renouvelable, quatre fois moins émettrice de CO2 qu’une solution traditionnelle. En tant qu’infrastructure urbaine d’échanges d’énergie, le réseau de Paris-Saclay permet ainsi aux bâtiments qui y sont raccordés de devenir tour à tour producteurs ou consommateurs de chaleur et de froid. Le choix de cette solution a été validé en amont par des études techniques pilotées par l’EPA Paris-Saclay. Il a ensuite été confirmé par le Secrétariat général à l’investissement qui, en février 2015, a reconnu la pertinence environnementale et économique de cet équipement au regard d’infrastructures autonomes non coordonnées ou de réseaux classiques.

 

 

Un système de gestion mutualisée de l’énergie

Afin d’optimiser la distribution d’énergie en fonction des besoins et usages de chaque bâtiment, le réseau de chaleur et de froid de Paris-Saclay s’appuie sur une infrastructure numérique capable de collecter et de traiter plus de 5 000 données en temps réel. Situé au niveau d’un poste d’hypervision centralisé, ce système de gestion intelligent permet d’adapter la production et réguler la température en permanence. En hiver, après 18h, la consommation en chauffage diminue par exemple dans les bâtiments tertiaires inoccupés tandis qu’elle augmente dans les logements. En outre, la digitalisation du système permet d’orienter ces choix de pilotage en privilégiant, selon leur disponibilité, le recours aux énergies les plus compétitives et les moins polluantes.

 

La valorisation des sources d’énergies locales

Une partie de l’approvisionnement électrique du réseau de chaleur et de froid de Paris-Saclay sera également assurée par autoconsommation, via la production locale d’électricité renouvelable. La mutualisation des installations photovoltaïques à l’échelle du campus pourra ainsi aboutir à une autoconsommation totale de l’électricité produite, assurant une forte compétitivité économique. La valorisation des ressources locales passera également par la récupération de l’énergie résiduelle issue des process et des data centers. Certaines activités génèrent en effet de la chaleur actuellement non valorisée sur le plateau de Saclay. Appelée « chaleur fatale », elle pourra à l’avenir être captée et injectée dans la boucle tempérée du réseau pour alimenter les différents quartiers du campus tout en limitant la formation d’îlots de chaleur urbain. Un projet de récupération de chaleur fatale issue d’un super calculateur est par exemple à l’étude. Elle s’éléverait à 4 000 MWh, ce qui équivaut à la consommation thermique de plus de 1 000 logements neufs.

 

Un démonstrateur européen des réseaux de 5e génération

En mai 2019, le réseau d’échange de chaleur et de froid de Paris-Saclay a été désigné comme démonstrateur dans le cadre du projet européen D2Grids visant à encourager le développement des réseaux de chaleur de 5e génération. Des démonstrateurs de systèmes thermiques et de gestion avancée de la demande vont ainsi être testés sur le réseau de Paris-Saclay pour optimiser sa production et la consommation d’énergie des bâtiments. Basés sur une infrastructure IoT (Internet of Things) déployée en parallèle des réseaux d’énergies qui collecteront l’ensemble des data, ces systèmes utiliseront l’intelligence artificielle pour apprendre du comportement énergétique des bâtiments et de leurs usagers. A court terme, ils permettront donc d’augmenter la part d’énergies renouvelables utilisée tout en renforçant les interactions avec le smart grid électrique du campus urbain



Un approvisionnement énergétique sécurisé
 

 

La continuité de service

L’architecture du réseau d’échange de chaleur et de froid de Paris-Saclay a été élaborée de façon à garantir aux usagers un accès égalitaire et sécurisé à l’énergie tout au long de l’année. En complément de la ressource géothermique et de la chaleur de récupération servant à couvrir les besoins de base, des chaudières au gaz naturel ont été prévues dans l’installation centralisée pour répondre à des besoins ponctuels et assurer la continuité de service lors des opérations de maintenance. Le stockage de chaleur ou de froid à des états différents permet en outre de lisser la production et de minimiser le recours au gaz naturel, ce qui contribue à améliorer le bilan carbone et le coût énergétique du réseau sur la durée.

Installations centralisées du réseau de chaleur et de froid, Carlos Ayesta

Des coûts énergétiques compétitifs

Cette faible dépendance aux énergies fossiles et carbonées rend par ailleurs le réseau de Paris-Saclay compétitif sur le plan économique. Par rapport à des solutions autonomes, le coût de l’énergie est beaucoup plus stable et maîtrisé car il est moins soumis aux variations du prix des énergies fossiles. Les abonnés bénéficient aussi d’une meilleure visibilité sur leurs charges puisque l’abonnement au réseau inclut tous les frais d’exploitation, de maintenance, de gros entretien, de renouvellement et d’assistance technique. A cela s’ajoutent des mesures incitatives permettant d’optimiser les comportements vertueux des bâtiments et donc la facture énergétique. Sans se départir d’un niveau de confort élevé, les usagers deviennent alors des acteurs de la flexibilité thermique en favorisant le fonctionnement du réseau sur sa plage optimale.

 

Un projet intégralement maîtrisé par l’EPA Paris-Saclay

Enfin, pour garantir la maîtrise économique du réseau et sa performance technique et environnementale sur le long terme, l’EPA Paris-Saclay a conclu un contrat de performance dit « CREM » (Conception Réalisation Exploitation Maintenance) avec le groupe Idex. D’une durée de 7 ans, ce contrat fixe des objetcifs de performance en termes de taux d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique des moyens de production ou encore d’émissions de CO2, et permet à l’EPA Paris-Saclay d’ajuster le développement du réseau aux évolutions du projet urbain. Sa mise en œuvre constitue la première brique du réseau multi-énergies intelligent du campus urbain qui contribuera à faire de Paris-Saclay un territoire à énergie positive.

 

 

Chiffres clés du réseau de Paris-Saclay

1ère

d'échange de chaleur et de froid d'envergure urbaine en France bâtie sur une boucle tempérée

25 km

de réseau cheminant en toute discrétion sous les voies publiques

2,146 M

de surfaces raccordées représentant à terme 50 MW de puissances de chaud et froid cumulées

2/5

doublets de géothermie sur la nappe de l'Albien d'Île-de-France connecté avec ce réseau

63%

c'est le taux d'énergie renouvelable et de récupération, soit 4 fois moins de CO2 qu'une chaudière gaz performante

+5000

données suivies en temps réel au niveau d'un poste d'hypervision centralisé

1 des 5

démonstrateurs européens (l'unique en France) de réseau de chaleur et de froid de 5e génération du projet européen D2Grids

 

 Article rédigé par Gaëlle Coutant, EPA Paris-Saclay

 

 Crédit photo: Installation centrale du Campus Moulon, Olivier Fermé

 

Consulter l'article précédent :  #11 - Vers une vraie réduction du carbone dans la construction de la ville grâce à l’échelle de l’aménagement


           

Dossier soutenu par

Quartiers Bas Carbone

 

Quartiers Bas Carbone

Retrouvez tous les articles du dossier

 Quartiers Bas Carbone

Partager :