[Dossier énergies renouvelables] #12 - L’équipement photovoltaïque des infrastructures de la mobilité

3021 Dernière modification le 07/06/2021 - 12:07
 [Dossier énergies renouvelables] #12 - L’équipement photovoltaïque des infrastructures de la mobilité

Le transport et le bâti représentent plus des 2/3 de la consommation d’énergie finale. À la croisée de ces deux secteurs, les gares représentent un enjeu d’intérêt pour la transition énergétique. Elles sont la porte d’entrée vers une mobilité efficace et vertueuse (le train), et créent une polarité urbaine forte dans les zones denses.

Si le premier objectif est de diminuer leurs besoins en énergie au travers d’actions d’efficacité énergétique, l’intégration de dispositifs de production d’énergies renouvelables est également étudiée. Les surfaces disponibles sur les zones de stationnement, les toitures et les abris de quais ont le potentiel théorique de non seulement couvrir les besoins de la gare, mais aussi de la projeter « station énergétique » de son quartier : les gares peuvent devenir partenaires des territoires dans leur propre transition.

Les centrales mises en service ces dernières années, ainsi que les études en cours, permettent de soulever quelques questions préalables à un déploiement industrialisé. L’objectif est d’établir les standards de construction ou de rénovation dès à présent sur le territoire.

  • Intégration photovoltaïque sur des ouvrages historiques.

Les Grandes Halles Voyageurs

Dans près d’une centaine de gares françaises situées en centre-ville, une grande halle recouvre les voies et les quais. Elles totalisent aujourd’hui une surface de 350 000 m². Ces ouvrages construits en grande majorité au XIXème siècle protègent les flux de voyageurs et de marchandises entre les trains et la gare. Emblèmes de la première révolution industrielle et du développement du réseau de chemin de fer en France, ces grandes halles voyageurs (GHV) ont été construites avec les technologies les plus innovantes de l’époque (charpente métallique grande portée et larges verrières) et couvrent des surfaces importantes en ville.

L’adaptation de ces ouvrages au contexte actuel

Dans un contexte où les villes, avec une intensité urbaine croissante, cherchent à mettre en œuvre leur transition énergétique, quel rôle les GHV peuvent-elles jouer ? Des réflexions sont en cours pour rénover ces ouvrages centenaires, en conservant leur identité et leur valeur patrimoniales, tout en les équipant de cellules photovoltaïques. Les grandes halles présentent en effet de grandes surfaces sans masque, c’est-à-dire sans ombre portée par des constructions avoisinantes. Les études menées sur quelques-unes d’entre elles permettent de caractériser les solutions techniques. 

Le panneau doit être assez léger pour être supporté par ce type de charpente ; compatible avec l’identité patrimoniale de l’ouvrage ; avec un système d’intégration démontable pour faciliter le remplacement des panneaux en fin de vie et un rendement performant pour limiter le poids carbone du kWh produit. Cette combinaison innovante nécessite encore une part de développement, mais la revente d’électricité sur 40 ans d’exploitation permet de significativement diminuer le coût global amorti de la rénovation de l’ouvrage. 

Par ailleurs, la transformation des verrières avec des vitrages intégrant des cellules photovoltaïques capables de filtrer les rayons solaires permettrait de limiter l’inconfort d’été dans des villes de plus en plus exposées aux épisodes caniculaires. 

  • Intégration photovoltaïque sur les abris de quais

Emprises foncières au cœur des villes

Les gares et leur faisceau ferroviaire représentent un foncier important, réserves possibles d’usage dans des villes et métropoles dont l’intensité urbaine croît continûment. 

Rôle des abris de quais

Les quais des gares, lorsqu’ils ne sont pas recouverts d’une grande halle, sont souvent équipés d’abris qui apportent une protection climatique aux voyageurs. Ces abris totalisent aujourd’hui une surface de 900 000m². Ils jouent également un rôle dans la lutte contre l’effet d'îlot de chaleur urbain en apportant une ombre sur le sol, et en diminuant l'albédo moyen dès lors que leur toiture présente une couleur claire. Ils peuvent aussi être le support de capteurs photovoltaïques, et devenir une canopée productive. L’électricité produite est alors consommée pour couvrir les besoins de la gare ou injectée sur le réseau pour renforcer la part renouvelable du mix énergétique. Mais la cohabitation d’une centrale photovoltaïque et d’un réseau ferroviaire soulève quelques questions.

Gestion de l’interface ferroviaire

En France 78% des trains fonctionnent avec une traction électrique ce qui implique la présence de caténaires au-dessus des rails (alimentée en courant continu 1500 V ou en courant alternatif 25 kV). Le déploiement en toute sécurité d’installations photovoltaïques sur les abris de quais nécessite de maîtriser toutes les interfaces techniques avec la caténaire. Quelles dispositions pour mettre en œuvre et entretenir l’installation ? Quel risque d’empoussièrement à proximité des voies ? Quelles d’exploitation dans l’environnement électromagnétique à proximité de la caténaire ?

L’installation d’une centrale de 35 kWc de panneaux photovoltaïques sur les abris de quais de la gare de Rosa Parks (Paris 19ème) en 2015 a servi de premier test pour répondre à ces questions.

Exemple de Rosa Parks

Cette opération s’est inscrite dans le cadre d’un projet neuf s’affranchissant des questions structurelles et patrimoniales, qui doivent être prises en compte pour un ouvrage existant. Les travaux ont été réalisés avant la mise en service de la ligne, ce qui a permis de se soustraire aux contraintes de coupure temporaire de l’alimentation des caténaires. Pour ne pas allonger le délai de réalisation, la technologie retenue a été celle de capteurs photovoltaïques amorphes, intégrés en usine aux bacs de couverture. Peu sensible à l’inclinaison, cette technologie était adaptée à la pente de couverture des abris standards (10%), mais n’est pas la plus efficace en rendement de production.

L’électricité produite est réinjectée sur le réseau. Aucune interférence liée au champ électromagnétique de la caténaire n’a été relevée. L’analyse de la production de l’installation fait apparaître une dégradation liée à l’empoussièrement des panneaux sans un nettoyage régulier. Pour caractériser ce risque d’empoussièrement lié au trafic ferroviaire, au milieu urbain dense mais aussi aux nombreux chantiers aux alentours, des mesures sur d’autres sites doivent être effectuées.

 

Chiffres clés de l’installation : 

Puissance 34,4 kWc

565 m² de modules amorphes souples

 

Article signé Jean-Baptiste LEFEUVRE, Responsable AREP Environnement

 

Crédits photos : SNCF-AREP / Photographe : Mathieu Lee Vigneau

 


 

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