Aménagement et rythme du végétal

Rédigé par

Eric LARREY

Directeur de l'innovation

4131 Dernière modification le 17/01/2023 - 11:00
Aménagement et rythme du végétal

Face au réchauffement climatique et aux vagues d’inconfort thermique urbain de plus en plus fréquentes et longues, le recours à la végétalisation est largement considéré comme une solution des plus pertinentes. Il est urgent d’agir et les projets sont nombreux… encore faut-il composer avec le rythme du vivant.

Dans le cadre des projets de végétalisation, nous avons à composer avec les contraintes du vivant, auxquelles nous devons nous adapter. Je dirais même que nous avons une responsabilité envers les végétaux que nous intégrons dans un milieu qui ne leur est pas forcément favorable !

Accès à la ressource en eau, pollution de l’air et parfois des sols, isolement, rayonnements réfléchis sur les parois et sols environnants, … les conditions de vie sont souvent rudes. Pour autant, les végétaux s’adaptent et font leur possible pour nous faire bénéficier de tous leurs apports écosystémiques, et ils sont nombreux.

Il est une autre contrainte à laquelle ils sont encore soumis : notre impatience ! En l’espèce, pas de miracle. Les végétaux ont leur rythme et ils n’y dérogeront pas de sitôt. Penchons-nous sur deux d’entre eux :

  • Le rythme annuel
  • Le rythme de croissance

Du printemps à l’automne

La petite vidéo qui suit, présente l’évolution de la canopée sur le centre-ville de Bordeaux du printemps à l’automne.

 

 

 

Pour la majorité des essences d’arbre, la croissance des arbres est principalement concentrée sur le printemps. Et parfois sur des durées courtes allant de 30 à 80 jours. Cette croissance est fortement impactée par les conditions climatiques et notamment le stress hydrique.

Si les arbres manquent d’eau durant cette période, leur croissance sera notablement plus faible, voire nulle. Or, les arbres matures, aux houppiers développés, sont ceux qui apportent l’essentiel des apports écosystémiques et le rafraîchissement le plus important.

Cela signifie également qu’ils auront stocké moins de carbone, un triste corollaire. Une étude[1]  publiée en 2022 montre que le stockage de CO2 a baissé de 60% durant une période de sécheresse de 41 jours. 

Un apport complémentaire de ressource en eau est à étudier avec attention :

  • Un apport raisonné en fonction des besoins
  • Un apport raisonné en fonction des périodes de croissance

Des années de croissance

Que le Vieux Tjikko[2] nous en soit témoin, du haut de ses presque 10 000 ans, les arbres peuvent vivre très, très longtemps. Mais il leur faut « un certain temps » pour atteindre une taille adulte.

La vidéo suivante présente une simulation de l’évolution de l’impact du rafraîchissement apporté par un jardin (strates basse et arborée) au fil des ans, à partir de sa création.

Tout cela dépend évidemment de la maturité initiale des arbres plantés puis des conditions d’accès à la ressource en eau. Un temps d’autant plus incertain qu’ils seront soumis à des stress hydriques fréquents, comme nous venons de l’évoquer ci-dessus.

Dès lors, chaque solution visant à assurer un bon accès à l’eau (tranchées, dévers, apports complémentaires en eau…) aura une influence certaine et positive sur le rythme de croissance et la pérennité des végétaux.

Une nécessaire patience et des choix à long terme

L’accès à l’eau et le temps sont deux composantes majeures dont il faut tenir compte dans les projets d’aménagement urbain impliquant de nouvelles strates végétales. Et comme si le sujet n’était déjà pas simple, encore faut-il tenir compte des conditions de vie futures des végétaux, et notamment des arbres, qui sont plantés aujourd’hui.

Toutes les essences n’affichent pas la même résistance au stress hydrique, avec des seuils de vulnérabilité du xylène à l’embolie qui peuvent varier de manière sensible.

Pour un plan de végétalisation et de plantation à mener, si l’on opte aujourd’hui pour des essences à forte sensibilité au stress hydrique, il est à craindre que les sujets ne grandiront pas, ne produiront pas les apports attendus et auront une espérance de vie limitée.


[1] « Drought impacts on tree carbon sequestration and water use - evidence from intra-annual tree-ring characteristics », Martınez-Sancho & al, New Phytologist (2022) 236: 58–70doi: 10.1111/nph.18224.

[2] Un épicéa commun suédois, découvert au début des années 2000 sur la montagne de Fulufjället.

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