[Dossier Santé] # 8 - Confort visuel et lumineux: des critères de caractérisation et d'évaluation

Rédigé par

Fédération Cinov

Service communication

10016 Dernière modification le 09/12/2020 - 17:58
[Dossier Santé] # 8 - Confort visuel et lumineux: des critères de caractérisation et d'évaluation

70% de l’information passe par la vision, la lumière naturelle joue un rôle essentiel sur la santé[1], la sécurité, l’attention, les performances. Elle participe particulièrement à la qualité de l'ambiance lumineuse et permet d'améliorer la sensation de bien-être ressentie par les usagers d'un bâtiment. Elle permet également de limiter l’utilisation de l’éclairage artificiel et les consommations associées. Il est pertinent de la valoriser au maximum tout en maîtrisant l’apport solaire excessif qui pourrait provoquer de l’inconfort visuel (éblouissements, contrastes) ou thermique (gains solaires trop importants, surchauffes).

Traiter le confort visuel dans les bâtiments, c’est assurer une excellente qualité des ambiances, tout en maitrisant les consommations énergétiques. Cela nécessite de connaitre les critères de confort, ainsi que les objectifs de performance associés, et d’appréhender les éléments qui participent activement au confort visuel : l’éclairage naturel et artificiel (les technologies, leurs performances et leurs modes de régulation), l’orientation des locaux, la protection solaire, la possibilité d’occultation, l’usage de la couleur, l’accès à la vue extérieure …

Mais quels sont ces critères ?

Les phénomènes physiques en jeu qui traduisent le comportement de la lumière naturelle sont complexes, mais il existe de nos jours de nombreux outils numériques, plus ou moins accessibles, qui permettent une modélisation correcte. Leur utilisation est essentielle à la mise au point et optimisation d’ambiances visuelles de qualité et de performances énergétiques associées.

Il est alors nécessaire de pouvoir analyser les résultats de ces modélisations, de déterminer des indicateurs de confort et d’en évaluer leur pertinence. Pour cela, deux approches sont possibles :

-          Une approche simplifiée, statique, très largement répandue, utilisant le calcul du Facteur de Lumière du Jour (FLJ)

-          Une approche plus détaillée, plus complexe, dynamique, qui traduit plus finement les phénomènes physiques et leurs interactions et offrant à l’utilisateur des grandeurs physiques comme l’éclairement ou la luminance, au pas de temps horaire.

Le Facteur Lumière du Jour (FLJ)

Afin d’évaluer l’éclairement naturel, la méthode la plus répandue s’inspire de l’EN 17037 et utilise le facteur de lumière du jour, ou FLJ.

Ce facteur est le rapport de l'éclairement intérieur reçu en un point du plan de référence () à l'éclairement extérieur simultané sur un plan horizontal d’un site totalement dégagé (Eext-diffus). Ce dernier est calculé pour un ciel couvert diffus standardisé CIE, c’est-à-dire ne prenant pas en compte le rayonnement direct ni les spécificités géographiques et climatiques.

Il est exprimé en %.

 

 

Cet indicateur est connu et disponible facilement à partir de nombreux logiciels. Il permet la comparaison vis-à-vis de niveaux à atteindre.

Les niveaux et seuils à atteindre sont clairement définis dans la norme et différents référentiels. Ceci permet, dans les conditions défavorables du ciel CIE, la recherche d’un optimum.

En ce qui concerne la norme EN 17037, deux niveaux sont à respecter :

  • Le niveau de FLJ cible, , est le niveau visé pour un niveau d’éclairement exigé pendant plus de la moitié des heures de lumière naturelle. Le niveau de FLJ cible est obtenu pour chaque site de la manière suivante :

 

Avec :

-     DT    : le niveau de FLJ cible

-      Eexigé   : l’éclairement exigé exprimé en lux

-      Emédian-diffus ext   : l’éclairement médian diffus extérieur selon le standard CIE (obtenu au moins 50% du temps d’occupation).

Ce niveau de FLJ cible doit être atteint sur 50% du plan de référence.

  • Le niveau de FLJ minimum, DTM , est le niveau minimum à atteindre pour un niveau d’éclairement exigé et une autonomie lumineuse statique définie. Il doit être atteint sur 95% du plan de référence. Le calcul du niveau de FLJ minimum est identique au FLJ cible, il diffère par le niveau du numérateur qui devient l’éclairement minimum exigé.

 

Avec :

-     DTM    : le niveau de FLJ minimum

-     Emin  : l’éclairement minimum exprimé en lux

-     Emédian-diffus ext    : l’éclairement médian diffus extérieur (obtenu au moins 50% du temps d’occupation).

L’éclairement minimum, Emin , dépend de l’éclairement exigé et est défini dans la norme.

La méthode basée sur le FLJ est donc bien cadrée. Néanmoins, elle présente des lacunes. En effet, le FLJ ne prend pas en compte les conditions climatiques réelles du site, ni l’orientation des baies, ni les protections. Ces faiblesses entraînent les risques suivants :

-          Possible surdimensionnement des baies à l’origine de surchauffes, notamment dans les régions très ensoleillées

-          Impossible évaluation des consommations énergétiques réalistes. (Les conditions de ciel couvert ne représentent pas toutes les heures de l’année)

-          Pas d’indicateurs d’éblouissement ni d’uniformité.

Existe-il une méthode plus proche de la réalité ?

D’autres méthodes sont fondées sur la modélisation dynamique de la lumière. Elles s’appuient sur la détermination des éclairements ou luminances en tout point du local à chaque pas de temps horaire pour l’année entière, déterminés avec un fichier météo réel.

La méthode basée sur la luminance est la méthode la plus physique. Elle se positionne au niveau du point de vue de chaque observateur ce qui la rend extrêmement complexe puisque l’ensemble des configurations doit être étudié. Cette approche est donc peu opérationnelle.

Pour cette raison, nous préférons privilégier une méthode basée sur l’éclairement. Elle se positionne au niveau d’un plan de référence (à déterminer en fonction de l’activité du local). Cette méthode est accessible à partir de logiciels dédiés et permet d’expliciter le plus simplement possible des indicateurs opérationnels. C’est un outil intuitif qui permet un dialogue efficace entre concepteurs.

Sur cette base, nous proposons une analyse fondée sur 3 indicateurs : l’autonomie lumineuse dynamique, le facteur d’autonomie lumineuse maximal et l’uniformité extrême

L’autonomie lumineuse dynamique

L’autonomie lumineuse dynamique est définie comme étant le pourcentage d’heures occupées par an durant lesquelles un niveau d’éclairement est maintenu seulement par la lumière naturelle. En théorie, elle doit être calculée en chaque point du plan de référence.

 

Avec :

  • A : Autonomie lumineuse
  • Eexigé : Eclairement exigé (en lux)
  • hE Exigé : Nombre d’heures occupées durant lesquelles la lumière naturelle seule produit un éclairement supérieur à la valeur Eexigé.
  • Hocc : Nombre total d’heures occupées durant l’année.

La norme EN 17037 exige une autonomie lumineuse d’au moins 50% pour les locaux ayant un apport en lumière naturelle.

La certification Osmoz by Certivea définie des paliers d’autonomie lumineuse permettant d’obtenir plus ou moins de points en fonction de l’atteinte du palier[2].

 

Figure 2 : Cartes d’éclairement de trois locaux exposés sud

 

Le facteur d’autonomie lumineuse maximal (maxDA)

Le facteur d’autonomie lumineuse maximal (maxDA) évalue les risques d’éblouissement ou de potentiels gains thermiques excessifs. Il met en évidence les sources lumineuses intenses ou la lumière directe du soleil. Une tâche est susceptible d’être éblouissante si l’éclairement calculé est strictement supérieur à 10 fois la valeur de l’éclairement moyen exigé.

Il correspond au ratio de la somme de heures d’occupation où l’éclairement est supérieur à 10 fois l’éclairement exigé (HE>10.Eexigé) sur la somme de heures d’occupation (Htot), soit :

 

 

 

Le parfait maxDA est de 0%. Au-delà de 5% des problèmes d’éblouissement se posent[3].

L’uniformité extrême

L’uniformité extrême est le rapport (en %) de l'éclairement minimal à l'éclairement maximal d’un plan de référence :

Elle s’assure de l’uniformité de l’éclairement naturel et évalue les contrastes. Il n’existe pas dans la littérature de niveau à respecter pour s’assurer d’une bonne uniformité de l’éclairement naturel. Selon notre expertise, une uniformité extrême supérieure à 20% permet de limiter les contrastes trop prononcés.

En conclusion

Cette dernière méthode permet de prendre en compte les conditions climatiques locales du site. Elle permet également d’évaluer les consommations en éclairage artificiel sur toute l’année. Les risques d’éblouissement sont évalués. Cette approche est la méthode idéale en termes d’accessibilité et de qualité des résultats.

En revanche, elle nécessite la réalisation d’une étude détaillée dynamique à l’aide d’un logiciel spécialisé. Une stratégie d’étude adaptée à la problématique rencontrée est nécessaire à définir pour optimiser l’étude.

Pour résumer

Il est possible de prendre en compte le confort visuel dès le début d’un projet de construction ou de rénovation. Les outils existent et permettent un dialogue constructif entre les architectes et les ingénieurs pour atteindre l’optimum correspondant au projet et à ses contraintes.

Point d’attention

Nous ne pouvons finir cet article sans préciser que le confort visuel est indissociable de la performance thermique et du confort d’été. Les solutions envisagées peuvent être contradictoires, et une approche croisée lumière et chaleur est indispensable.


[1] The Global Impact of Biophilic Design in the Workplace – Humans Spaces - 2005

[2] Ceci est exclusivement indicatif car l’autonomie dans le référentiel Osmoz est définie différemment, à savoir pour un niveau d’éclairement unique de 300lux sur 80% du plan de référence quel que soit le local devant avoir accès à la lumière naturelle.

[3] Daylighting metric development using daylight autonomy calculations in the sensor placement optimization tool – 2006 - Architectural Energy Corporation

 

Article signé SURYA Consultants : Tangi LE BERIGOT, Frédéric BŒUF et Frédéry LAVOYE, consultants qualité environnementale, performance énergétique et conforts

Frédéric BŒUF est également membre du syndicat CINOV Ingénierie et président de la fédération CINOV PACA Corse. 

www.surya-consultants.com

 

 Consulter l'article précédent :  #7 - Entretien : La lumière naturelle, essentielle à notre bien-être et notre confort

 


           

Dossier soutenu par

Velux, Santé & Bien-être

 

Santé &bien-être dans nos bâtiments

Retrouvez tous les articles du dossier

 Santé & confort dans nos bâtiments ?

Partager :