[Dossier énergies renouvelables] #7 - Le renouvelable dans les villes : levier majeur pour réduire les émissions et la pollution de l'air

Rédigé par

REN 21

2845 Dernière modification le 03/06/2021 - 14:39
[Dossier énergies renouvelables] #7 - Le renouvelable dans les villes : levier majeur pour réduire les émissions et la pollution de l'air

L'édition 2021 du Rapport sur la situation mondiale des énergies renouvelables dans les villes de REN21 est le seul bilan existant des actions de transition énergétique des villes à travers le monde. Le rapport montre qu'un milliard de personnes – soit près d’un quart de la population mondiale – vivent dans des villes ayant un objectif ou une politique en matière d'énergies renouvelables. Plus de 1 300 villes, situées pour la plupart en Europe et en Amérique du Nord, montrent la voie en matière d'utilisation des énergies renouvelables, dans tous les secteurs. Cet article met en lumière le cas des villes européennes et françaises.

Les municipalités à travers le monde ont de plus en plus recours aux énergies renouvelables pour lutter contre la précarité énergétique, réduire la pollution de l’air, améliorer la santé et le bien-être des citoyens et lutter contre le changement climatique. Dans un contexte de mobilisation croissante pour le climat, les citoyens font pression sur les gouvernements municipaux (et nationaux) pour qu'ils agissent contre le changement climatique. En partie en réponse à cette mobilisation citoyenne, à la fin 2020 un nombre record de 1 852 gouvernements municipaux – dont 45 % en Europe – ont déclaré l'urgence climatique (contre 1 400 en 2019). Le recours spécifique aux énergies renouvelables constitue un véritable levier pour celles qui ont par ailleurs développé des plans d’action pour le climat.  

Les engagements des villes qui soutiennent directement les énergies renouvelables sont en constante augmentation. Fin 2020, plus de 830 villes dans 72 pays ont adopté des objectifs en matière d'énergies renouvelables, dont plus de 600 visant 100 % de leur consommation énergétique totale. En Europe, au moins 357 villes ont des objectifs en matière d'énergies renouvelables, dont 273 visant les 100 %. 

En France, seulement 12 % de la population urbaine vit dans une ville ayant un objectif ou une politique en matière d'énergies renouvelables (contre 25 % au niveau mondial), mais Paris et Grenoble font partie des rares villes au monde à avoir un objectif de 100 % d'énergies renouvelables d'ici 2050 spécifiquement pour la chaleur et le froid.

Au-delà des engagements qui soutiennent directement le développement des énergies renouvelables, leur utilisation est appuyée indirectement par les nombreux engagements de réduction de gaz à effet de serre. Ces derniers consistent, en effet, à réduire la dépendance aux énergies fossiles pour la production d’électricité, mais surtout pour la production de chaleur, de froid et pour les transports. Fin 2020, plus de 10 500 villes avaient adopté des objectifs de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre et environ 800 villes se sont engagées à atteindre la neutralité carbone. Ces objectifs de neutralité carbone des villes ont d’ailleurs été multipliés par huit en l’espace d’une année. Toutefois, seules trois villes françaises – Dijon, Nantes et Paris – se sont fixé de tels objectifs à fin 2020.

 

Les politiques de la ville intègrent de plus en plus la chaleur et le froid renouvelables dans les bâtiments.

Les engagements des États se sont souvent concentrés sur le développement des énergies renouvelables pour la production d’électricité, délaissant ainsi la chaleur et le froid, notamment dans les bâtiments. Ces derniers, concentrés dans et autour des zones urbaines, représentent pourtant plus de 30 % de la demande finale en énergie dans le monde et contribuent de manière significative à la pollution de l’air en raison de leur dépendance aux combustibles fossiles. Bien que les objectifs des villes en matière de renouvelables se soient également concentrés sur le secteur de l'électricité (environ 75 % des objectifs), il est de plus en plus fréquent de voir des politiques de la ville qui soutiennent la transition vers les renouvelables pour le chauffage et la climatisation des bâtiments. Ainsi, les villes deviennent des exemples à suivre pour les gouvernements nationaux.  Sur les 800 municipalités (dont 338 en Europe) qui ont mis en œuvre des réglementations, des incitations fiscales/financières, ainsi que des politiques de soutien indirect qui favorisent l'adoption des énergies renouvelables à l’échelle de la ville, quelque 150 villes ont mis en œuvre un total de 175 politiques visant l’appui aux énergies renouvelables pour réduire l’empreinte carbone des bâtiments. Près de la moitié de ces politiques (83) concernaient des villes européennes. 

Les politiques de la ville à l’échelle des quartiers et des bâtiments incluent de plus en plus de réglementations et d’obligations municipales. Pour les nouveaux bâtiments, elles prévoient l'utilisation d'énergies renouvelables pour l'électricité ou le chauffage (généralement le solaire photovoltaïque ou le solaire thermique). Quant aux bâtiments existants, l'adoption des énergies renouvelables est souvent encouragée par le biais d’incitations financières et fiscales. 

En parallèle, les interdictions et limitations de l'utilisation des combustibles fossiles dans les bâtiments connaissent également un essor rapide. En 2020, 53 villes dans 10 pays ont proposé ou adopté des interdictions ou des limitations liées au gaz, au pétrole ou au charbon pour le chauffage des bâtiments et de l'eau. Paris est d'ailleurs une des rares villes européennes à avoir adopté une réglementation interdisant l'installation de systèmes de chauffage au fioul à partir de 2022.  

 

Les villes sont particulièrement créatives pour réduire les émissions des bâtiments.

Pour encourager la consommation de chaleur et de froid renouvelables, les municipalités ont montré l'exemple, d’une part en augmentant pour les bâtiments publics la production in situ ou l'achat d'énergie renouvelable et, d’autre part, en développant à l’échelle des villes entières les réseaux de chaleur urbains.

La France figure parmi les dix premiers pays en termes de capacité de réseaux de chaleur et de froid urbains. Les énergies renouvelables assurent déjà 43 % du chauffage et du refroidissement urbains, tandis que les villes françaises s'efforcent d’augmenter leur part dans les réseaux. Par exemple, au cours des dernières années, les systèmes de chauffage urbain de la région parisienne ont progressivement augmenté leur capacité de chauffage géothermique. En 2019, le réseau de chauffage urbain de Lyon-Confluence a été raccordé au réseau central de Lyon, et une nouvelle centrale biomasse de 51 MW a été mise en service pour alimenter le réseau.

Toujours en 2019, la collectivité de Champs-sur-Marne a inauguré un projet de chauffage urbain d'un montant de 40 millions d'euros qui permettra d'alimenter en chaleur, majoritairement géothermique, l'équivalent de 10 000 logements. Alors que les forages sont en cours, une plateforme de financement participatif permet aux habitants de participer activement et d’investir directement dans le projet. Cet exemple reflète une autre tendance, l’approche collaborative et multipartite : l’engagement des villes pour la transition énergétique concerne non seulement les gouvernements locaux, mais également les entreprises, les résidents, les communautés et autres acteurs de la ville. De telles approches permettent notamment d’accroître l’acceptance sociale ainsi que la capacité financière des projets d’énergies renouvelables au niveau des territoires.

 

Les gouvernements nationaux doivent donner aux villes le pouvoir d'agir - et s'appuyer sur elles

Dans la lignée du Pacte vert pour l'Europe, les villes européennes sont des pionnières en matière d'énergie et de climat à l’échelle mondiale. Toutefois, même celles qui semblent prêtes et désireuses de se lancer, se heurtent à des obstacles. Dans de nombreux cas, des dispositions législatives et réglementaires au niveau national entravent l'action des villes en matière de climat. Des budgets municipaux restreints ou encore un accès limité à des fonds externes sont autant d’obstacles qui limitent les villes dans leur soutien aux projets d'énergie renouvelable. Les stratégies urbaines en matière d'énergie et de climat doivent être inscrites au niveau national voir supranational si l’on souhaite une plus grande cohérence des politiques et des programmes entre les échelons nationaux et territoriaux. L'action des gouvernements municipaux doit être renforcée pour permettre aux villes d'être des acteurs essentiels de la transition énergétique. Nous pouvons, à l'échelle mondiale, relever le niveau d'ambition et progresser dans l'atteinte des objectifs climatiques et énergétiques si les gouvernements nationaux apportent aux villes un soutien plein et entier, qui va bien au-delà d'un simple soutien financier.

L’action des villes constitue un levier essentiel pour l’atteinte des objectifs de l'Accord de Paris, notamment par la décarbonation du système énergétique et l'accélération des investissements dans les énergies renouvelables. Tout en atteignant leurs propres objectifs, les villes aident à atteindre les objectifs mondiaux. Leur participation active est indispensable pour définir et mettre en œuvre une transition énergétique basée sur les énergies renouvelables. Pour en savoir plus, consultez le Rapport sur la situation mondiale 2021 des énergies renouvelables dans les villes. Le rapport décrit les moyens mis en œuvre par les villes pour faire progresser les agendas énergétiques et climatiques et présente des centaines d'exemples et de bonnes pratiques. Il est co-rédigé par plus de 330 experts et soutenu par un comité consultatif composé de 20 organisations, dont des réseaux de villes et des experts en énergies renouvelables.

 

Un article signé Lea Ranalder (Cheffe de Projet et Analyste), Rana Adib (Directrice Exécutive) et Thomas André (Directeur des Opérations) de REN21

 

Crédit photo : REN21 Secretariat 

 

REN21 : www.ren21.net 

        


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