4 questions à Alexandra Lebert, Directrice de Domaine d'Action Stratégique Recherche « Économie circulaire et ressources pour le bâtiment »

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Communication CSTB

2801 Dernière modification le 16/09/2021 - 10:32
4 questions à Alexandra Lebert, Directrice de Domaine d'Action Stratégique Recherche « Économie circulaire et ressources pour le bâtiment »

Le CSTB a publié son premier rapport RSE cet été afin de partager ses actions RSE et ses projets phares de l'année. Le document donne la parole à Alexandra Lebert, Directrice de Domaine d'Action Stratégique Recherche « Économie circulaire et ressources pour le bâtiment ».

Alexandra Lebert, vous avez également pris la direction du domaine d’action stratégique « Économie circulaire et ressources pour le bâtiment ». Quelles sont vos premières missions ?

Le début de l’année 2021 a été le temps du bilan. Nous avons collectivement fait un pas de côté pour faire l’inventaire de ce que nous avions réalisé ces dernières années. Sur l’économie circulaire, nous avons une équipe dédiée qui travaille en interaction avec d’autres équipes pour apporter une vision pluridisciplinaire du sujet (environnement, économie, santé, etc.). Nous avons caractérisé, d’un point de vue scientifique, les principaux livrables de nos travaux de recherche conduits ces dernières années. Les chercheurs et chercheuses ont pris le temps d’expliciter leur contribution individuelle et collective à l’émergence et à l’exploitation de ces résultats. Nous sommes maintenant dans la phase de finalisation des feuilles de route des domaines, avec pour objectif de les décliner en une programmation pour les années à venir. L’ambition est de densifier le pilotage de la recherche pour utiliser au mieux les compétences internes et la dotation recherche, de construire des partenariats plus forts pour répondre aux enjeux qu’adressent nos feuilles de route. Mais au-delà de la recherche, le sujet de l’économie circulaire concerne les autres métiers du CSTB pour accompagner les innovations dans leur émergence, sécurisation, évaluation et déploiement.

 

Le secteur du bâtiment est gourmand en ressources et, dans le même temps, « généreux » en déchets. Pour aller vers une forme d’optimisation, ne faudrait-il pas catégoriquement rompre avec le modèle existant ?

En un siècle, nous avons, en moyenne, multiplié par dix la consommation de ressources sur la planète (issues du vivant ou non, renouvelables ou non). Nous parlons pourtant, depuis plus de cinquante ans, des Limits to Growth (rapport Meadows). 1972 marque l’année où quatre jeunes chercheurs du Massachusetts Institute of Technology ont publié ce rapport qui a fait date… mais qui n’a pourtant pas fait évoluer la situation. Les initiatives autour du réemploi, de l’économie de la fonctionnalité et d’une architecture frugale sont riches et nombreuses. Pour passer le point de bascule entre l’expérimental et la massification, il y a certes des verrous techniques, juridiques, économiques non négligeables, mais le principal verrou reste l’imaginaire collectif. Cet avenir, avec l’économie circulaire comme fondement, doit faire sens, être désiré. Notre système de valeurs doit se remodeler pour que le recyclage, le réemploi, l’usage minimal de ressources deviennent une priorité, puis un réflexe pour tous. Nous devons prendre conscience que nous ne pouvons plus concevoir aujourd’hui des bâtiments indémontables et dont les structures « tombent à la dynamite ».

 

Comment le CSTB peut-il prendre part à cette nouvelle forme de développement ?

Notre ambition est de montrer le potentiel du recyclage et du réemploi et d’être un facilitateur. Il s’agit, par exemple, de permettre aux collectivités d’anticiper les flux de déchets à venir et les filières à accompagner, d’aider à lever les freins sur la contractualisation pour les aménageurs, de diffuser des guides de bonnes pratiques et des outils numériques pour optimiser la phase de déconstruction, qui a un rôle pivot dans la valorisation des déchets. Toujours en tant qu’évaluateur, nous devons sécuriser les pratiques : que ce soit à l’étape du diagnostic dans le bâtiment en fin de vie en vue du réemploi de ses constituants, en centre de reconditionnement avant la remise sur le marché, ou en permettant une plus forte intégration de matières recyclées dans les nouveaux produits. Et, en tant qu’accompagnateur de l’innovation, nous devons jouer un rôle de tiers de confiance dans la caractérisation des performances dans l’écoconception, aider à l’identification de débouchés pour les gisements de matières recyclées, accompagner les filières de réemploi dans l’identification des performances à justifier et des moyens de le faire.

 

Nous avons beaucoup parlé du « bâtiment » et de l’optimisation de son cycle de vie. Qu’en est-il de la gestion de l’eau ?

Si on veut pouvoir continuer à fournir de l’eau potable à tous et répondre aux besoins de l’agriculture, sans accentuer les stress hydriques, il faut progresser dans la maîtrise des consommations d’eau (potable ou non) et la qualité des eaux rejetées dans l’environnement. Le CSTB accompagne les nouvelles pratiques de gestion de l’eau dans le bâtiment et sa parcelle, ou à l’échelle d’un quartier, en renforçant la dimension sanitaire de celle-ci au sein du bâtiment. Le sujet est l’intégration de ces techniques (usage d’eau de pluie et eaux grises, récupération de calories sur eaux grises, assainissement non collectif, toilettes sèches) dans le bâtiment, leur entretien dans le temps et les impacts évités ou induits par celles-ci sur l’environnement, les occupants et les réseaux. La gestion des eaux pluviales (via des techniques d’infiltration par un bon usage du sol, de phytoépuration) à l’échelle d’une toiture, d’une parcelle ou d’un quartier est un sujet de recherche et d’expérimentation dans notre grand équipement Aquasim. Au-delà, le CSTB s’intéresse aux motivations ou aux freins à l’usage de ces techniques, mais également, dans le domaine d’action stratégique « Bâtiments et quartiers pour bien vivre ensemble », à la perception sensorielle du goût de l’eau potable ou aux liens entre eau, sol et renaturation des villes et bâtiments. Le sujet de l’eau est lié aux enjeux de biodiversité ou encore d’îlots de chaleur urbains, et donc à la lutte contre le changement climatique.

 

« L’ambition est de densifier le pilotage de la recherche pour utiliser au mieux les compétences internes et la dotation recherche et de construire des partenariats plus forts. »

 

 

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