#34 - Plus de nature pour accélérer l’adaptation des villes au changement climatique

Rédigé par

helene Chartier

3482 Dernière modification le 21/12/2021 - 09:32
#34 - Plus de nature pour accélérer l’adaptation des villes au changement climatique

Soutenir et protéger les écosystèmes naturels est notre meilleure carte pour renforcer la résilience des villes face à la crise climatique. La pandémie de COVID-19, nous a rappelé à quel point des espaces verts de qualité et la nature en milieu urbain sont essentiels. Alors qu’à travers le monde les villes développent leur stratégie pour sortir de la crise sanitaire, il devient impératif, pour la santé et le bien-être publics, d’investir et de mettre en œuvre massivement des solutions naturelles d’adaptation au changement climatique. Cela permettra en plus de consolider les efforts mondiaux pour lutter contre la crise climatique.

 

La vulnérabilité des villes face aux changement climatique

En plus d’être les principaux contributeurs au changement climatique, les villes sont aussi le lieu où et se concentrent la majorité des effets de la crise climatique. Ceux-ci sont déjà bien réels et, c’est une certitude, vont s’amplifier dans les prochaines années. La température mondiale a déjà augmenté de 0,8 degré Celsius et, même si l'objectif de l'Accord de Paris est atteint et que l'augmentation de la température est maintenue en dessous de 2 °C (ce qui est peu probable), les conséquences pour les villes seront extrêmes. Pour rappel, une augmentation de 2 °C d'ici 2050 et les catastrophes naturelles que cela va entrainer menacent de mettre en danger 1,3 milliard de personnes et de détruire 158 000 milliards de dollars d'actifs (soit le double de la production annuelle mondiale).  

31 grandes métropoles mondiales s’engagent

Pour atténuer ces effets, les villes du réseau C40 se mobilisent pour accélérer leur programme d’adaptation, et elles positionnent les solutions naturelles au cœur de leur stratégie. Ainsi 31 Maires à travers le monde, dont Paris, Milan, Londres, Barcelone, Tel Aviv, Los Angeles, Austin, New Orléans, Seattle, Bogota, Buenos Aire, Rio de Janeiro, Medellin, Freetown, Durban, Tokyo et Sydney, ont signé une Déclaration pour la Nature en Ville avec deux principaux objectifs à l’échéance de 2030 :

  1. Une augmentation importante des espaces naturels pour que 30 à 40 % de la superficie totale des villes soient constituées d'espaces verts tels que des arbres de rue, des forêts urbaines et des parcs ; ou des espaces perméables tels que des systèmes de drainage urbain durables, des bassins de rétention et des chaussées conçues pour absorber l'eau et prévenir les inondations.
  2. Une répartition spatiale équitable pour garantir que 70% de la population ait accès à des espaces publics verts ou bleus à moins de 15 minutes à pied ou à vélo, avec une attention particulière aux populations les plus vulnérables.

 

Les initiatives se multiplient à travers le monde Les villes s’attèlent d’ores et déjà à accroître leurs espaces verts et bleus. Ainsi, à Durban en Afrique du Sud les travaux ont déjà commencé pour achever un large programme visant à améliorer les rivières de la ville, augmentant sa résilience et créant des milliers d'emplois verts. Pour limiter les risques d’inondation, la Ville de Toronto creuse une vallée fluviale longue d'un kilomètre, se terminant par une nouvelle embouchure et deux nouveaux exutoires pour la rivière Don. Ces aménagements permettent aux eaux de crue de s'écouler dans le port intérieur au lieu d'endommager les quartiers environnants, et permettent également la création de 25 hectares de nouveaux espaces verts accessibles au public.La ville de Guadalajara au Mexique vient de valider la plantation de 67 000 nouveaux arbres dans les 70 corridors verts de la ville et la création de 50 nouveaux jardins publics qui doivent permettre de rafraîchir la ville et fournir de l'ombre et des espaces de loisirs. La ville finance également des cours pour former des jardiniers et des techniciens en arboriculture et propose 400 ateliers aux résidents sur l'entretien des arbres et des jardins.

La Ville de Melbourne entretient 70 000 arbres et à developer une plate-forme de surveillance permettant aux habitants d’accéder à des données précises sur chaque arbre, y compris son emplacement, son type, son âge et son numéro d'identification. La plateforme détaille aussi l'approche de la Ville à court et long terme pour la gestion du stock. Avec un stock d'arbres vieillissant, la Ville prévoit que 44 % des arbres existants seront perdus d'ici 2040. Les données recueillies ont permis de cibler la prochaine génération de plantation d'arbres, et d’identifier précisément les endroits où planter, en croisant les lieux où il est possibles de planter, ceux où résident la plus forte densité de personnes vulnérables, les rues les plus chaudes et les zones où la couverture végétale est trop faible.

À Bombay, le gouvernement du Maharashtra vient de modifier le « Tree Act » pour protéger les vieux arbres, empêcher l'abattage d'arbres, et renforcer encore le niveau de protection des 9 800 hectares de « forêt réservée ».

Dans le cadre du développement de La nouvelle zone de Nanjing Jiangbei en Chine, la ceinture verte de Qinglong a été créée sur 7,5 kilomètres de long et 88 hectares, reliant le parc national de Laoshan et le fleuve Yangtze. Ce corridor écologique comprend 5 grands parcs et a été conçu en suivant le modèle de « ville éponge » dans le but atténuer les inondations, de réduire le ruissellement de surface et d’améliorer la qualité de l'eau.

La ville de Barcelone subventionne 75 % du coût des nouvelles toitures vétalisées, afin d’accélérer le développement de jardins familiaux tout en ouvrant de nouveaux espaces pour la production d'énergie renouvelable, la collecte des eaux de pluie et le compostage des déchets organiques.

En 2019, la ville de New York a annoncé une nouvelle règlementation exigeant que tous les nouveaux bâtiments et les bâtiments existants faisant l'objet de rénovations majeures doivent installer des panneaux photovoltaïque et/ou des toitures végétalisées sur 100 % de la couverture. Pour supporter cet effort, la Ville accorde un abattement de taxe foncière pour toute installation de toitures végétalisées.

 

Ces quelques exemples témoignent de l'engagement des villes pour accroître leurs trames bleue et verte et pour développer les solutions naturelles pour se préparer aux risques climatiques. Cette tendance se confirme dans la majorité des villes du réseau C40 et dans toutes les Régions du monde. Les bénéfices de ces politiques sont bien connus et documentés ; elles sont illustrées ci-dessous par quelques études et chiffres clé.

 

De nombreuses études prouvent l’efficacité des solutions naturelles

De nombreuses études montrent qu’un accès équitable à la nature urbaine est bénéfique à la fois pour les personnes et pour l'environnement ; et aide les villes à s'adapter et à répondre aux impacts actuels et futurs du changement climatique.

À Medellín, les températures ont baissé en moyenne de 2 °C grâce à la plantation de près de 10 000 arbres réalisée dans le cadre du projet « corridors verts » de la ville. En savoir plus.

Une étude menée à Toronto a révélé que l'ajout de seulement 10 arbres  à l’échelle d’un quartier a un impact énorme sur la perception qu’ont les habitants de leur santé et de leur bien-être. Cet impact est équivalent à l'effet de gagner 10 000 $ de plus par ménage par an ou d'avoir 7 ans de moins. Lire ici l’étude menée par Ontario Health Study.

Des chercheurs de Portland, en Oregon ont découvert que les arbres en ville, en réduisant le niveau de concentration de dioxyde d’azote dans l’air, contribuaient considérablement à la diminution des problèmes respiratoires. Cela représenterait environ 7 millions de dollars d'économies de soins de santé par an.

À Durban, 300 emplois verts ont été créés grâce à la restauration de l'écosystème de 3 000 hectares, et à Buenos Aires, la réserve naturelle régénérée du Lago Lugano, anciennement site d'enfouissement, abrite aujourd'hui plus de 200 espèces végétales et 99 espèces d'oiseaux. Ce réservoir naturel a non seulement atténué les risques d'inondations, mais il a aussi créé des emplois et un centre éducatif pour les écoles de la ville.

Conclusion

Alors que les températures des émissions de gaz à effet de serre et le niveau de la mer continuent d'augmenter à l'échelle mondiale, il n'a jamais été aussi urgent d'accélérer les efforts pour faire entrer la nature dans les villes. D'ici 2050, plus de 570 villes (et 800 millions habitants) seront vulnérables à l'élévation du niveau de la mer, plus de 500 villes (et 650 millions habitants) seront vulnérables à la sécheresse et au manque d'eau et plus de 970 villes (et 1.6 milliards habitants) seront vulnérables à la chaleur extrême (voir plus de détails sur ces chiffres dans ce rapport). Les solutions naturelles bien pensées et adaptées à chaque contexte spécifique permettent d’agir sur ces trois risques majeurs. Beaucoup de villes à travers le monde  s’attèlent déjà à leur mise en œuvre. Il est à présent crucial d’accélérer et de dégager les financements nécessaires pour massifier ces solutions, notamment dans les villes les plus vulnérables et plus pauvres. Pour rappel, selon Oxfam, l'adaptation dans les pays en développement coûtera au moins 50 milliards de dollars chaque année, et bien plus si les émissions mondiales ne sont pas réduites rapidement.

C’est notamment sur ce point que les négociations de la COP26 ont beaucoup déçu.

 

Un article de Helene Chartier, Directrice du développement urbain zero carbone du C40


Article suivant : Adaptation au changement climatique, quels démonstrateurs pour les espaces urbains de demain ? (publication le 21/12)

Retour à la page d'accueil du dossier

 

UN DOSSIER RÉALISÉ AVEC LE SOUTIEN DE :

 

Partager :