Quelles tendances dans les Green Solutions Awards 2018?

Rédigé par

Sylvain Bosquet

Responsable Web editorial

8369 Dernière modification le 26/09/2018 - 12:10
Quelles tendances dans les Green Solutions Awards 2018?

Construction21 organise le concours international des Green Solutions Awards pour mettre en avant des projets de construction inspirants et innovants qui contribuent à la lutte contre le changement climatique.

Le concours est ouvert aux bâtiments, quartiers et infrastructures livrés et opérationnels. La 6ème édition, lancée en mars 2018, compte 103 bâtiments, 14 quartiers et 25 infrastructures issus de 16 pays à travers le monde : Autriche, Belgique, Chine, Colombie, Danemark, Espagne, France, Grèce, Italie, Japon, Luxembourg, Maroc, Pologne, Roumanie, Royaume Uni et Ukraine.

Ces réalisations constituent un panel intéressant pour faire un état des lieux de la construction durable dans ces pays, notamment en suivant les 7 thèmes de l’Alliance Mondiale pour le Bâtiment et la Construction (GABC) :

  1. Le facteur humain – Etat des lieux et tendances sur les usages de l’occupant et les solutions centrées sur l’humain ;
  2. Résilience – Etat des lieux et tendances sur l’adaptation et la résilience au changement climatique ;
  3. Solutions architecturales – Etat de lieux et tendances sur la conception et les solutions passives (naturelles, low-tech) ;
  4. De meilleurs matériaux pour de meilleurs bâtiments – Etat des lieux et tendances sur les matériaux tenant compte de l’ACV et de l’énergie grise ;
  5. Solutions technologiques – Etat des lieux et tendances sur les éclairages, appareils et équipements (actifs et high-tech) ;
  6. Solutions urbaines – Etat des lieux et tendances sur les villes et les systèmes urbains ;
  7. Transition vers les énergies propres – Etat des lieux et tendances sur les énergies renouvelables et l’énergie décarbonée dans les bâtiments et la ville.

Le facteur humain

La Ruche, logement participatif à Bègles (33), lauréat Bas Carbone français du concours et mention du Prix des étudiants

Les candidats de l’édition 2018 confirment une tendance constatée en 2017 : l’efficacité énergétique est de moins en moins aux dépens des utilisateurs / habitants. La santé, le confort et le bien-être deviennent des enjeux clés pour les propriétaires, les concepteurs et les gestionnaires de bâtiments. Bien que la notion de « plaisir de vivre dans un bâtiment » demeure émergente dans les bâtiments les plus avancés, il est important de noter le soin croissant apporté au confort thermique, hiver comme été, le confort visuel avec davantage de sources de lumière naturelle, ou encore à l’aménagement intérieur.

Parmi les solutions pour améliorer la qualité de la santé dans les bâtiments durables, alors que l’amélioration de la ventilation dans les bâtiments tertiaires, en particulier dans les bâtiments d’enseignement se développe plus largement, elle reste largement insuffisante dans les logements, principalement en raison de la complexité des usages. Le soin accru apporté à l'enveloppe et à son étanchéité a un impact sérieux sur la ventilation et le renouvellement de l'air. Cependant, d’une manière générale, la qualité de l'air intérieur est mieux prise en compte, notamment grâce à l'utilisation de matériaux plus sains et naturels, qui émettent moins de COV (Composés Organiques Volatiles).

Reste la question de la gestion de ces bâtiments pour les garder en bonne santé et confortables à utiliser. En France, le confort d'utilisation apparaît comme une nouvelle piste de travail, et des solutions apparaissent déjà :

  • Utiliser des applications smartphone dédiées pour piloter les espaces des utilisateurs,
  • Des GTB pour les responsables de bâtiments pour contrôler l'environnement intérieur
  • Des professions émergentes telles que l’Assistant à Maîtrise d’Usage (AMU).

On peut également noter une nouvelle façon d’aborder l’humain : la participation. En Espagne, les habitants sont plus consultés et proactifs dans la rénovation urbaine, tandis qu'en France, des logements participatifs sont mis en place. En donnant leur avis personnel sur le projet, les futurs utilisateurs sont plus susceptibles de trouver un bâtiment mieux adapté à leurs besoins et à leurs habitudes.

A l’échelle des quartiers, l’écoquartier Cœur de Ville – La Possession fait office d’exemple. Soucieuse de partager avec ses habitants une nouvelle façon de vivre la ville, la municipalité a imaginé un processus de consultation dès le début et tout au long de la vie du projet ; notamment via des visites du site et la mise en place du projet « 2025, j’imagine ma ville de demain » à destination des scolaires.

Dans l’écoquartier des Mureaux, territoire populaire à faible revenu, le renouveau produit par la transformation de la ville a suscité une véritable dynamique citoyenne qui s’est organisée autour de l’association « Vivre les Mureaux ». L’objectif est d’atteindre le plein emploi en 7 ans par le bien vivre ensemble et la revitalisation du lien par le biais de rencontres et de voyages culinaires.

Quelques exemples de bâtiments et de quartiers qui mettent l’humain au centre parmi les candidats des Green Solutions Awards 2018 :

France

Espagne

Résilience

Eco-quartier de Jambes, en Belgique

Avec le changement climatique et les événements météorologiques plus fréquents liés au changement climatique, nous voyons apparaître des bâtiments plus résilients. Cependant, la résilience reste une tendance naissante. En 2018, nous n'avons observé que quatre études de cas prenant en compte la résilience :

  • Au Luxembourg, un bâtiment a été conçu en prenant en compte son cycle de vie dans son entier, y compris sa déconstruction.
  • Au Royaume Uni, des architectes ont construit une maison “amphibie”, capable de flotter sur la Tamise lorsque le fleuve quitte son lit.
  • En France, un supermarché utilise un revêtement blanc sur son toit pour résister aux grandes chaleurs estivales et réduire les effets d’îlot de chaleur.
  • Au Japon, un micro-grid facilite les échanges mutuels entre les différents bâtiments publics de la ville (hôpitaux notamment) ; et une large batterie de stockage permet d’assurer la production d’électricité pendant 3 jours en cas de catastrophe

Les espaces publics aussi se veulent de plus en plus résilient, surtout dans la gestion des eaux de pluie.

  • A Paris Saclay, le jardin argenté Joliot-Curie est un maillon à part entière du système hydraulique de la ZAC
  • Dans l’Eco-quartier Bords de Seine, la gestion des eaux pluviales est réalisée par des dispositifs de stockage et d’infiltration après épuration grâce à la pente générale du terrain
  • En Belgique, l’Ecoquartier de Jambes a été imperméabilisé au minimum pour assurer une infiltration directe des eaux de pluie. Pour le reste, l’eau est temporisée en toiture et utilisée pour l’entretien des espaces verts

Quelques exemples de bâtiments, infrastructures et quartiers résilients et candidats aux Green Solutions Awards 2018 :

France

Royaume Uni

Belgique

Japon

Solutions architecturales

Réhabilitation Energiesprong à Hem (59), mention française Energie & Climats Tempérés

L’édition 2018 des Green Solutions Awards confirme les observations faites lors des cinq précédents Green Solutions Awards : en termes d’architecture, l’enveloppe demeure le point crucial sur lequel se concentre chaque bâtiment durable. Et au fil des ans, nous avons pu voir des progrès considérables dans ce domaine. Les concepteurs et les constructeurs prennent grand soin de l'enveloppe, que ce soit dans la construction neuve ou dans la rénovation. L'influence des principes de construction passive est très perceptible dans les projets présentés en 2018, sous des climats tempérés comme sous les climats chauds.

Les principes bioclimatiques sont également adoptés par un nombre croissant d’architectes et d’ingénieurs pour optimiser la lumière naturelle, les gains passifs et la ventilation naturelle, comme on peut l’observer sous les climats tropicaux de la Guyane et l’Ile de la Réunion.

Des solutions architecturales ingénieuses sont à noter dans l’édition 2018 :

  • L’utilisation de plantes en intérieur, extérieur et sur les toits pour générer de la fraîcheur en été.
  • Des murs et éléments de construction préfabriqués, qui intègrent souvent l’isolation, pour accélérer la construction ou la rénovation tout en optimisant la performance énergétique de l’enveloppe

A noter que les solutions architecturales se concentrent de moins en moins sur l’efficacité énergétique sans la négliger pour autant. Les concepteurs de bâtiments adoptent une vision plus globale pour intégrer d'autres facteurs : santé, confort, mobilité, énergies renouvelables, intégration urbaine et dimension participative…

Quelques exemples de bâtiments usant des solutions architecturales candidats aux Green Solutions Awards 2018 :

Grèce

France

Espagne

  • Carrer Nou (rénovation passive d’une copropriété)

Belgique

De meilleurs matériaux pour de meilleurs bâtiments

La Waste House, à Brighton (Royaume Uni)

Bien que le béton reste l’une des solutions les plus simples et les moins chères dans la construction d’aujourd’hui, les Green Solutions Awards 2018 ont montré une utilisation croissante de matériaux biosourcés :

  • Le bois est le matériau biosourcé le plus utilisé pour l’ossature, mais aussi pour les enveloppes, parfois associées à d’autres matériaux bio ou géosourcés.
  • La paille est plus acceptée comme matériau isolant, on la trouve même dans les bâtiments certifiés PassivHaus
  • La terre battue, encore rare, se retrouve dans quelques projets
  • La terre cuite déjà présent en couverture prend de l’ampleur sur les façades
  • Les ouates de cellulose et de chanvre isolent de plus en plus de bâtiments
  • En Italie également, on peut observer une utilisation intéressante de la laine de mouton notamment comme isolant

Cela démontre une préoccupation croissante concernant l'empreinte carbone des bâtiments et l'utilisation de matériaux naturels sains.

Les matériaux biosourcés ne sont pas les seuls matériaux intéressants pour réduire l’empreinte carbone des bâtiments. Les matériaux recyclés émergent. Un exemple extrême vient du Royaume-Uni : la Waste House, constituée à 90% de déchets, tout en atteignant une efficacité énergétique élevée. Le London Aquatic Center est un autre exemple de bâtiment utilisant des matériaux recyclés : des voiles recyclées et recyclables, des agrégats secondaires du terrain pour fabriquer du ciment et du béton…

Mais les professionnels doivent s’assurer que l’empreinte carbone de leurs bâtiments a été réduite. Avec la préoccupation croissante en matière de CO2 et le développement des nouveaux matériaux, l'analyse du cycle de vie devient de plus en plus pertinente, mais ces analyses ne sont pas encore appliquées à tous les projets. Seuls les pionniers et les propriétaires exigeants consacrent le temps et l'énergie nécessaires pour que leur bâtiment soit vraiment écologique. Et même ainsi, les méthodes de calcul et les périmètres désignés varient, ce qui rend les comparaisons complexes. Il existe une véritable marge de progrès dans ce domaine. En France, la certification expérimentale E+C- est une étape intéressante dans cette direction, même si elle ne concerne que les bâtiments neufs et non les rénovations.

Quelques exemples de bâtiments des Green Solutions Awards 2018 utilisant des solutions bas carbone :

Royaume Uni

  • La Waste House (construite avec 90% de matériaux issus de déchets)
  • London Aquatic Center (agrégats secondaires pour le ciment et le béton, voiles recyclées et recyclables) 

France

Roumanie

Italie

  • REEF SANSONE (matériaux biosourcés : bois et laine de mouton)

Solutions technologiques

Technopole de Schneider Electric à Grenoble (38), lauréat français dans la catégorie Smart Building 

Nous observons que la gestion des bâtiments est devenue une priorité dans le secteur, et pas seulement dans les bâtiments tertiaires. En complément des GTB, nous voyons émerger des solutions d’éclairage intelligent et la domotique. En termes d'équipement, les concepteurs, les constructeurs et les propriétaires privilégient une efficacité énergétique élevée. La récupération de chaleur est de plus en plus adoptée, principalement dans les systèmes de ventilation, mais aussi dans la gestion de l'eau.

Fait intéressant, les bâtiments commencent à être considérés pour leur valeur en tant que générateur de données : celles qu’ils peuvent fournir, mais aussi leur rôle comme plaque tournante des services. La certification R2S en France témoigne de cette prise de conscience croissante.

Quelques exemples de bâtiments “techno” dans les Green Solutions Awards 2018 :

France

Solutions urbaines

Service de transport autonome à Reims (51)

Tandis que la connexion des bâtiments aux réseaux de chaleur / fraîcheur urbains devient une pratique courante, connecter le bâtiment à son environnement urbain prend de plus en plus d’importance, notamment en matière de mobilité. Les concepteurs et les urbanistes intègrent les flux d'utilisateurs et d'habitants dans leur projet, la connexion aux réseaux de transport, les possibilités de stationnement et les mobilités douces (parcs à vélos, stations de voiture électrique…).

Alors que le bâtiment dépend désormais davantage de son environnement urbain, l’inverse est également vrai, car le quartier peut compter sur un ou plusieurs bâtiments pour certains services. Nous observons de plus en plus de bâtiments à énergie positive smartgrid-ready pour alléger la charge du réseau électrique, redistribuant sa production d'énergie renouvelable aux bâtiments environnants. Certains bâtiments constituent également un havre de biodiversité pour le quartier ou une source de refroidissement avec des toits végétalisés.

Les infrastructures ont aussi la part belle dans le bon fonctionnement de la ville, et participent largement à la mutualisation des consommations d’énergie. A Pontarlier, une Power Road ® a été installée pour déneiger et dégivrer le lycée de la Ville. La route est alimentée par le réseau de chaleur de Pontarlier dont l’énergie est générée par la combustion des déchets ménagers de l’unité de valorisation déchets, une excellente opportunité de concilier extension du réseau de chaleur et la réfection d’un parking vieillissant.

A Reims, c’est une navette autonome qui assure une meilleure pratique de la ville. Celle-ci permet à l’ensemble des usagers (poussettes, handicapés, personnes âgées) de se déplacer sans contrainte.

Quelques exemples de bâtiments, quartiers et infrastructures qui jouent la carte urbaine dans les Green Solutions Awards 2018 :

France

Autriche

  • GreenHouse Student Dorm (réseau de chaleur urbain, emplacements de stationnement pour les vélos et les voitures électriques)

Transition vers des énergies propres

Centrale solaire Helioclim à Saint-Christol d'Albion (84)

Une première observation à ce sujet : le nombre considérablement accru de bâtiments utilisant une source d'énergie renouvelable ou plus, combinant plusieurs systèmes pour améliorer leur efficacité énergétique, mais aussi pour réduire leur impact environnemental. Sans surprise, l'énergie renouvelable la plus prisée est l'énergie solaire, avec des panneaux photovoltaïques pour l'électricité et l'énergie solaire thermique pour l'eau chaude. A Saint-Christol d’Albion (84), une centrale solaire thermique de 560 kW assure le chauffage de 50 bâtiments pour une surface totale de 88 800 m².

Cette tendance se vérifie également à l’échelle du quartier. Dans la périphérie de Nantes, le quartier de la Fleuriaye vise un bilan énergétique neutre avec un apport en énergies renouvelables équivalent aux consommations tous usages, grâce à un système solaire installé sur le toit des logements et au développement de l’autoconsommation.

En second lieu : l'énergie géothermique avec des pompes à chaleur et des puits canadiens. Massileo, le réseau d’énergies renouvelables intelligent en est une bonne illustration. Ce réseau de thalassothermie alimente l’écoquartier Smartseille en chauffage, climatisation et eau chaude sanitaire à partir de 75% d’énergies renouvelables.  Les chaudières à bois sont toujours populaires, mais les chaudières à biomasse sont de plus en plus utilisées, en particulier dans les grands bâtiments, comme le London Aquatic Center.

Nous observons également un intérêt croissant pour la collecte des énergies fatales. Un exemple cette année : la récupération d'énergie sur les freins d’ascenseur.

Tendance émergente de cette édition et largement récompensée aux Green Solutions Awards, le stockage hydrogène. Cette technique permet de stocker la production d’énergies renouvelables sur une longue durée.

A Vannes, une station hydrogène a été conçue pour recharger des voitures fonctionnant à cette énergie. Interconnectable avec les Smart Grid des bâtiments, la station peut stocker les excédents énergétiques d’un bâtiment et les redistribuer en cas de besoin.

Quelques exemples de candidats des Green Solutions Awards 2018 qui ont mis l’accent sur les énergies renouvelables :

Autriche

Espagne

Royaume Uni

France

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