Pollution atmosphérique et qualité de l'air intérieur: ventilation simple flux vs double flux

Rédigé par

Stéphane Cochet

architecte indépendant

5930 Dernière modification le 14/12/2016 - 10:44
Pollution atmosphérique et qualité de l'air intérieur: ventilation simple flux vs double flux

Suivant AirParif la pollution aux particules fines niveau d'alerte principale de la semaine passée est émise pour 40% par les bâtiments pour les PM10 et jusqu'à 65% pour les PM2,5. En cause notamment le chauffage des bâtiments et notamment l'utilisation du Bois-energie principal émetteur.

Le bâtiment de Montreuil réalisé par Grand Paris Habitat pour OSICA est un bâtiment certifié passif qui consomme 2 à 3 fois moins qu'un bâtiment conventionnel RT et qui est équipé d'un système de ventilation double flux.

Contrairement aux systèmes de ventilation simple flux, les filtres F7 qui équipent les centrales filtrent plus de 95% des PM10 et des PM2,5 sur l'air entrant et l'air sortant contribuant à la fois à réduire la pollution atmosphérique et la pollution intérieure des logements.

Construction passive et qualité de l'air intérieure:

Le standard de la construction passive, contrairement à ce qui est souvent perçu en France, n'est pas un standard qui se limite à la performance énergétique du bâtiment, mais qui s'inscrit dans une approche systémique et scientifique du bâti (basé sur la méthode expérimentale) avec une approche globale du confort.

Le standard PHI (Passiv Haus Institut) fixe le niveau de la qualité de l'air intérieure à un IDA43 soit une concentration ppm inférieure à 800ppm qui correspond à un renouvellement d'air garanti par la double flux de 20-25m3h/personne.

La Double Flux est l'organe central d'une construction passive. Les 15kWh/m² max en besoin de chauffage ou de rafraichissement, ou les 10W/m² en besoin de puissance qui caractérisent la performance attendue de l'enveloppe bâtie passive, correspondent à la limite sanitaire sur laquelle on peut chauffer sur l'air: soit 52°C température au delà de laquelle il y a des risques de pollution de l'air chauffé par effet de pyrolyse.

La performance thermique de l'enveloppe et notamment les valeurs limites des ponts thermiques dans les angles entrants intérieurs les plus défavorables est telle qu'elle est conçue pour qu'à une température extérieure à -5/-10°C, la température de surface intérieure de ces points critiques ne descende jamais en dessous de 12°C, température en dessous de laquelle se forme les zones de condensation propices au développement des moisissures.

Le standard passif fixe le taux de renouvellement d'air minimum à 0,3 volume heure de l'enveloppe intérieure pour supprimer les effets de condensation. Le taux de renouvellement d'air est en général calé sur 0,5vol/heure: cette valeur permet d'évacuer les odeurs, d'assurer les niveaux de renouvellement hygiénique attendus, sans assécher l'air en maintenant un taux hygrométrie intérieure en été comme en hiver compris entre  35 et 55 % d'humidité relative (si on ventile trop on assèche l'air en descendant en dessous des zones de confort hygrométrique). Il permet aussi de limiter la consommation énergétique de la VMC.

Sur le bâtiment rue Girard, l'échangeur de la VMC est un échangeur à roue qui présente plusieurs intérêts: il consomme moins d'énergie car il n'est pas nécessaire de protéger l'échangeur avec une résistance électrique, et surtout il présente une fonction adiabatique de récupération de l'humidité qui l'hiver permet de ré-humidifier l'air souvent sec, et l'été permet d'humidifier l'air intérieur et donc de participer au rafraichissement "adiabatique" du bâtiment.

Il faut toutefois sur les échangeurs à roue, une mise en oeuvre suivie et un contrôle, car on peut avoir des montages inversés avec des transferts d'odeur de l'air vicié vers l'air entrant. Je crois d'ailleurs que les échangeurs à roue ne sont pas autorisés dans les milieux hospitaliers.

Sur ce projet, la double flux a été intégrée dès la phase conception / concours. Elle est centralisée afin d'éviter à avoir à intervenir à l'intérieur des logements et permettre un entretien aisé (remplacement des filtres G4 et F7 tous les 3 mois). La distribution du réseau a fait l'objet d'un dimensionnement précis et suivis. La distribution à l'intérieur des logements est faite en pieuvre avec des conduits semi-rigide en pehd qualité alimentaire permettant un entretien facile et limitant les risques de "téléphonie". Nous avons équipé les logement avec des hottes en cuisine à recyclage (filtre à charbon) qui permettent de réduire les risques d'encrassement de la bouche d'extraction en cuisine (en inox), d'éviter que les habitants installent leur propre hotte en se raccordant directement sur les conduites d'extraction VMC comme on le voit trop souvent en réhabilitation de logement sur la simple flux.

Une double flux réussie c'est moins de 30dB (25dB en passif) en bruit de soufflage sur les pièces de nuit.

In-opérabilité de la ventilation simple flux et de la RT2012:

La majorité des constructions neuves et de réhabilitation sont actuellement réalisées avec des VMC simple flux de type hygroA ou B, solutions valorisées par les moteurs de calcul RT car il n'y a qu'un moteur et on ventile moins.

Ces solutions ne sont pas durables. Le COSTIC indique que ce type d'installation doit faire l'objet d'un entretien annuel: à savoir le démontage et le nettoyage des bouches de soufflage et d'extraction: quel gestionnaire d'immeuble a les moyens d'assurer cet entretien? http://www.costic.com/ressources-techniques-et-reglementaires/telechargements/publications-rage/ventilation

En interrogeant des fabricants tels qu'Aldès ou Atlantic sur les conséquences d'une absence d'entretien des bouches, les réponses sont soit un fonctionnement des bouches en continu (type autoréglable) soit un colmatage des membranes qui n'assurent plus leur fonction de renouvellement hygiénique de l'air.

On met souvent en exergue le mauvais usage des bâtiments par les habitants pour expliquer/justifier le fait que le modèle BBC des constructions "à la française" ne fonctionne pas ou n'atteint pas les objectifs attendus. Quand on a des températures de surface de fenêtre en double vitrage qui descendent à 15°C par une température de 0 à -5°C extérieur avec effet de paroi froide, des entrées d'air froid dans les fenêtres qui renforcent les effets de parois froides et génère dans le logement des courant d'air important ainsi que des hétérogénéités de températures importantes entre le sol, le corps et le plafond, les habitants effectivement ne se chauffent pas à 19°C.

Enfin, dans toutes les réhabilitations que nous pouvons voir, ces entrées d'air sont souvent bouchées par les habitants à cause des courants d'air froid... ce qui à effectivement l'avantage d'améliorer l'efficacité énergétique de ces bâtiments de la RT.....

Ce type de ventilation outre le fait qu'elle est basée sur des entrées d'air froid dans les logements et une évacuation de l'air chaud dehors, ne prend en compte que les niveaux d'humidité intérieure (principe de l'hygroB). Les particules fines, la concentration de CO², les polluants chimiques type formaldéhydes, benzènes, dioxydes etc.. eux ne sont pas pris en compte, faisant de la qualité de l'air intérieur un sujet de santé publique préocupant de premier plan.https://www.construction21.org/france/articles/fr/emmanuelle-cosse-visite-la-residence-passive-osica-par-a003architectes.html

En conclusion, la construction passive répond aux exigences de confort hygro thermique telles qu'elles sont fixées par les normes type ASHRAE, les courbes de Brager etc. et répond aux exigences Leed ou Bream des standards internationaux.

Il faut développer l'ingénierie de conception et de réalisation relative à l'installation des systèmes de double flux en logement avec des systèmes et des produits adaptés car il y a encore trop de contre exemple en France: une double flux réussie c'est 25dB de soufflage en pièce de nuit, un entretien aisé et centralisé.

Présentation du projet rue Girard:

http://www.ekopolis.fr/realisations/bois-debout-r5-tout-bois-certifie-passif

https://www.construction21.org/france/case-studies/fr/bois-debout.html

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