La garantie de performance énergétique en copropriété

Rédigé par

Michel Jouvent

Délégué Général

3301 Dernière modification le 14/06/2018 - 11:29
La garantie de performance énergétique en copropriété

Le parc français de copropriétés

Le parc immobilier en copropriétés se situe à environ 7,6 millions de logements, dont 6,2 millions en résidences principales, et 1,4 en résidence secondaire.

Il convient également de souligner que, selon l’ANAH,  50.000 logements en copropriété sont identifiés et suivis comme « en difficulté » ; 300.000 logements en copropriété rencontrent des difficultés financières ou de fonctionnement ; et que plus largement, entre 800.000 et 1.000.000 sont en situation de risque si l’on se réfère à des critères de dégradation du bâti ou d’occupation sociale

Les charges de chauffage collectif représentent en moyenne, entre 25% et 35% des charges de copropriété ; c’est donc souvent le principal poste de charges, avec la fourniture d’eau et le gardiennage.

La rénovation énergétique des copropriétés relève de plusieurs enjeux : l’amélioration de l’efficacité énergétique de l’immeuble, la diminution du niveau des charges chauffage et donc des charges de copropriété et des charges locatives des locataires des copropriétaires bailleurs, l’amélioration du confort, du bien-être et du cadre de vie dans les logements.

Mais il faut ajouter que la rénovation énergétique permet également de lutter contre la précarité énergétique de certains occupants[1], et de respecter les engagements citoyens (maîtrise des consommations énergétiques et des gaz à effet de serre, emplois induits).

Enfin, un objectif qui n’est pas le moindre : celui de la valorisation du patrimoine (ou l’absence de dévalorisation) et la création d’une nouvelle image de la copropriété.

La réglementation en matière de rénovation énergétique des copropriétés

Les lois Grenelle de 2009 et 2010 et plus récemment la loi TECV imposent d’améliorer la performance énergétique des bâtiments existants : diminution des consommations d’énergie, diminution des émissions de gaz à effet de serre, amélioration du confort thermique.

Plus récemment, le plan annoncé par le gouvernement actuel se situent dans la continuité de ces textes, avec des ajustements annoncés des aides financières.

La réglementation actuelle concerne les bâtiments à chauffage collectif qui ont une obligation de faire réaliser un diagnostic énergétique dans des conditions précisés dans un arrêté du 28 février 2013. Seules les copropriétés de plus de 50 lots (tous lots confondus) sont assujetties à un véritable audit énergétique. Pour les autres, cet audit est facultatif, car seul le DPE, de bien fiable utilité en l’espèce, est obligatoire. S’y ajoute la réalisation d’un Diagnostic Technique Global, qui, pour la plupart des copropriétés, est actuellement facultatif.

Dernier point, en non le moindre, les travaux nécessaires en matière de rénovation énergétique peuvent être importants : par exemple de l’ordre de 15.000 à 20.000 euros par logement, -voire plus dans certains cas-, hors autres travaux de réhabilitation.

La mobilisation des acteurs

Plusieurs acteurs majeurs se sont mobilisés sur le sujet, au niveau national : l’ANAH, l’ADEME, l’ANIL, le Plan Bâtiment Durable, etc.

A l’initiative du Plan Bâtiment Durable, présidé par Philippe Pelletier, la charte de mobilisation des syndics a été signée dans le 18 décembre 2014 avec les fédérations, puis, en 2015, avec de nombreux cabinets au cours de réunions de signature à Paris, Lyon, Marseille, Caen, etc..

Le groupe de travail « rénovation énergétique des copropriétés », créé par APOGEE[2] sous l’égide de l’ADEME et du Plan Bâtiment Durable, a mis au point avec l’ADEME une formation Ad’hoc qui a été dispensée à ce jour à environ 1200 gestionnaires et principaux de copropriété représentants 120 cabinets et  sociétés, et ceci, depuis juillet 2014.

Ce groupe de travail[3] s’est investi dans plusieurs domaines, comme la simplification des aides, les aménagements du contrat de syndic, la mise en place du DTG, la surélévation, etc.

Mais il a également travaillé à la mise au point d’un contrat de performance énergétique simple en copropriété

Les deux garanties de performance énergétique : GPEI et GRE

Qu’elle engage ces travaux en une seule fois, ou qu’elle préfère échelonner des bouquets de travaux bien hiérarchisés, permettant d’atteindre, en plusieurs étapes, l’efficacité énergétique souhaitée, la copropriété qui souhaite investir dans une rénovation énergétique, a besoin, pour prendre sa décision, d’avoir des certitudes sur la réalité des économies de consommations qu’elle obtiendra à échéance.

D’où la notion de garantie contractuelle de performance énergétique, qui a été définie dans le rapport établi par un groupe de travail co-animé par Caroline Costa et michel Jouvent sur la garantie de performance énergétique , en avril 2012, dans la cadre du Plan Bâtiment Durable :

« La garantie de performance énergétique contractuelle (GPE), a pour objet de garantir une efficacité énergétique. Sa mise en œuvre se traduit par l’obligation souscrite par un prestataire d’atteindre des objectifs d’efficacité énergétique fixés ».

Dans ce rapport de 2012, la GPE se décline en deux garanties différentes :

  • La garantie de performance énergétique intrinsèque (GPEI), au stade conception et travaux, qui garantit les performances énergétiques intrinsèques à l’immeuble construit ou rénové[4],
  • La garantie de résultats énergétiques (GRE), qui incorpore l’exploitation et l’usage et se décline dans la durée.

La GPEI : ses grandes caractéristiques

Il s’agit d’une garantie qui relève d’un accord contractuel, dans le cadre d’une démarche volontaire, librement décidée entre les acteurs. Les consommations énergétiques sont celles des 5 usages : chauffage, refroidissement, eau chaude sanitaire, éclairage, et auxiliaires. Le niveau de consommation garantie est librement décidé entre les parties, et inférieur, ou éventuellement égal à celui de la RT 2012.Le scénario d’utilisation, fixé par le maître d’ouvrage, peut être différent de celui de la réglementation.

Les consommations garanties sont des consommations calculées au moyen d’un logiciel de simulation énergétique statique ou dynamique, adapté et auditable. La garantie s’éteint après une période dite d’« ajustement », qui fait suite à la réception des travaux.

La GPEI s’adapte aux différents cas de figure de réalisation des travaux : procédure classique avec maîtrise d’œuvre et entreprises séparées, VEFA ou marché de promotion, etc.  Le porteur de la garantie est adapté à chaque cas.

La Garantie de Résultats Énergétiques (GRE)

La GRE relève elle aussi d’un accord contractuel, dans le cadre d’une démarche volontaire, librement décidée entre les acteurs. Mais elle intègre l’usage et l’exploitation de l’immeuble. Le périmètre des consommations énergétiques peut être choisi librement et aller au-delà, si on le souhaite- des 5 usages de la GPEI. Le niveau de consommation garantie est également décidé librement entre les parties. Le scénario d’utilisation, fixé par la copropriété, est choisi librement.

A la différence de la GPEI, les consommations garanties sont des consommations effectivement mesurées. Si les consommations mesurées, corrigées d’un certain nombre de facteurs (degrés-jours par exemple), sont supérieures à la consommation maximale garantie, le garant doit payer une indemnité à la copropriété. Si elles sont inférieures, l’économie bénéficie, en tout ou partie, au bénéficiaire de la garantie. La durée de la garantie peut être de l’ordre de 5 à 10 ans, quelquefois davantage.

Le contrat de performance énergétique simple en copropriété

Le contrat de performance énergétique simple en copropriétés, tel qu’il a été mis au point par le groupe de travail, intègre la GRE.

Il concerne en priorité les copropriétés à usage principal d’habitation, de 50 lots ou plus et dotés d’une installation de chauffage collectif et d’eau chaude collective.

Il est composé de 15 articles en 6 pages, plus des annexes.

  • Objet du contrat
  • Références normatives
  • Situation de référence du contrat
  • Périmètre de l’engagement
  • Objectifs contractuels
  • Description des moyens mis en œuvre
  • Mesure des consommations réelles
  • Modes d’ajustement de certaines consommations d’énergie
  • Garantie de performance énergétique
  • Paiement
  • Pénalités
  • Date de prise d’effet de durée du contrat
  • Fin anticipée
  • Garantie de bon fonctionnement des installations en fin de contrat
  • Résolution des litiges

Le lecteur intéressé pourra télécharger ce contrat sur le site www.association-apogee.fr ou le site www.renovationenergetiquedescoproprietes.com

Par ailleurs , Une charte d’engagement sur la garantie de performance énergétique a été signée au SIMI en décembre 2017.

Pour l’avenir….

Pour que la rénovation énergétique se mette massivement en mouvement, après avoir analysé les remontées du terrain grâces à près d’une centaines de séminaires de formation, il apparaît indispensable, que :

  • l’on développe sans délai les montages avec garantie de résultats énergétiques, car, sous les formes de montage habituelles, aucune réelle garantie n’est donnée aux copropriétaires qui investissent ; les montages avec financement et garantie de résultats qui font supporter un effort mensuel résiduel sont les seuls susceptibles de les convaincre , alors que le  traditionnel « temps de retour » ne fait que les effrayer.  Le tiers investissement doit prendre toute sa place.
  • le dispositif des différentes aides actuelles soit unifié et simplifié, car il est actuellement beaucoup trop complexe dans sa mise en oeuvre, compte tenu de la diversité des formes d’occupation des copropriété (occupants, bailleurs, résidences principales/secondaires) et des modalités de prise en compte des conditions de ressources ;
  • le texte de contrat de syndic tel que fixé réglementairement reconnaisse enfin que l’une des missions essentielles du syndic est le pilotage de la rénovation énergétique des copropriétés, à décrire et rémunérer en tant que telle . Comment faire s’engager les syndics dans de telles actions, si la mission n’est ni évoquée, ni rémunérée ? d’autant qu’ils sont déjà fortement contraints par les nouvelles obligations qui les concernent.

Si ceci n’est pas fait, la rénovation énergétique des copropriétés ne concernera qu’une part de l’ensemble des copropriétés.

Par Michel Jouvent, délégué Général d’APOGEE, RICS


[1]  La précarité énergétique commence quand le taux d’effort des dépenses consacrées à l’énergie est supérieur à 10 %. Le stade de la pauvreté énergétique peut être considéré comme atteint lorsque ce taux d’effort est supérieur à 15 %.

[3] Groupe co-présidé par Jérôme Dauchez (UNIS) et Hevé Lasseigne (Ascaudit Groupe) ;

[4] La GPEI a été développée dans un second rapport du Plan Bâtiment Durable, rédigé par Maître Michel Huet et Michel Jouvent

Dossier GPE
Retrouvez tous les articles du Dossier Garantie de Performance Energétique
en cliquant ici.
Outils juridiques et financiers de l'efficacité énergétique
Intéressé-e ? Rejoignez notre communauté consacrée aux outils juridiques et financiers de l'efficacité énergétique.
Partager :