#8 Finance responsable : l’immobilier, un actif à part ?

Rédigé par

Ella Etienne

Responsable Développement

7061 Dernière modification le 18/07/2019 - 18:32
#8 Finance responsable : l’immobilier, un actif à part ?

A l’heure où la Commission Européenne œuvre à la création d’une taxonomie européenne mise au service de la finance verte, et où la création d’un label ISR (Investissement Socialement Responsable) adapté à l’immobilier se finalise en France, Green Soluce s’interroge sur la singularité du secteur immobilier face aux défis de la finance durable.

 

Des labels d’investissement responsable encore insuffisants pour les actifs immobiliers

Depuis 2004, onze labels de finance durable ont vu le jour en Europe. Visant à offrir des garanties et de la transparence aux investisseurs sur la composition des portefeuilles, ils partent du constat qu’une gestion responsable des actifs contribue à pérenniser leur valeur financière.

Si les labels de finance responsable se sont structurés et institutionnalisés pour les actifs mobiliers, le label ISR applicable au secteur immobilier se fait toujours attendre. Pour l’heure, en Europe, seuls deux labels couvrent les actifs immobiliers : le label GreenFin en France et le label « Umweltzeichen » en Autriche. La co-conception d’un label ISR qui fasse consensus, menée par l’ASPIM (Association Française des Sociétés de Placement Immobilier) et ses adhérents depuis 2016, s’avère complexe. Pourquoi un tel délai ? Cela tient notamment à une première spécificité des sociétés de gestion de patrimoine en immobilier : l’influence forte et directe que peut exercer le gestionnaire de patrimoine immobilier sur la performance ESG de ses actifs, tout au long de leur détention, bien supérieure à celle existante pour les valeurs mobilières.

En immobilier, le gestionnaire d’actifs n’est pas seulement gestionnaire de fonds d’investissement, il gère aussi activement le patrimoine sous-jacent physique à ce dernier. Des opportunités de valorisation conséquentes existent donc grâce à la transformation des bâtiments. Par conséquent, l’analyse ESG (Environnementale, Sociale et de Gouvernance) ne porte pas seulement sur la performance RSE (Responsabilité Sociétale de l’Entreprise) de l’émetteur, mais aussi et surtout sur la démarche concrète mise en œuvre pour améliorer la performance environnementale, sociale et sociétale de ses actifs physiques.

Pour compléter leur démarche d’investissement immobilier durable, les acteurs financiers peuvent de plus s’engager dans l’investissement dit « à impact » ou « impact investing », qui gagne du terrain dans le secteur de l’immobilier. Dans l’impact investing, la volonté de maximiser l’utilité environnementale, sociale et sociétale du projet prime, tandis que dans l’ISR, il s’agit de s’assurer que la rentabilité du projet ne contredit pas des critères environnementaux et sociaux définis au préalable.

 

La gestion des risques climatiques pour l’immobilier, quelles particularités ?

Les normes et référentiels de reporting ESG pour les fonds d’investissement (Article 173 de la loi relative à la Transition Energétique pour la Croissance Verte et la « Task Force on Climate-related Financial Disclosures » - TCFD) appellent ces derniers à communiquer sur leur prise en compte du risque climat, risque majeur pour la pérennisation de la valeur du portefeuille. Le secteur immobilier s’avère particulièrement sensible à cet aléa. En effet, deux autres particularités différencient les actifs immobiliers des autres actifs : le caractère fortement capitalistique des bâtiments accroît leur exposition financière et le montant des éventuels investissements d’adaptation, leur ancrage physique renforçant leur exposition au risque matériel.

Le changement climatique engendre des risques physiques significatifs pour les villes et leurs bâtiments. On peut en citer notamment trois : le phénomène d’îlot de chaleur urbain, qui impacte la santé des citadins et le dynamisme économique, la croissance de la consommation d’électricité pour climatiser les bâtiments, ainsi que le retrait-gonflement des argiles lié à l’alternance de précipitations et de sécheresse, menaçant la stabilité des constructions. Face à ces aléas, la résilience des villes repose sur la mise en place d’une stratégie d’adaptation ambitieuse par l’ensemble des acteurs de l’immobilier, en parallèle à une stratégie de réduction des émissions des gaz à effet de serre.

A ce titre, Green Soluce a d’ailleurs développé une approche de prise en compte du risque climat dédiée à l’immobilier, que vous pouvez retrouver en vidéo.

 

La certification environnementale comme indicateur de performance ESG, nécessaire et suffisant ?

Pour orienter les investisseurs dans le choix de projets immobiliers offrant une meilleure performance ESG, la certification environnementale telle que la certification HQE (Haute Qualité Environnementale) s’est affirmée comme un outil efficace. Permettant de comparer des actifs évalués selon les mêmes critères, elle donne de la lisibilité à la démarche de gestion responsable du bâtiment et facilite le reporting réalisé par les gestionnaires de bâtiment pour leurs investisseurs. Ainsi, les lignes de crédit et les obligations vertes récemment initiées par des foncières et promoteurs se fondent sur le financement de projets certifiés, à l’instar du green bond de 500 millions d’euros émis par Covivio (ex-Foncière des Régions) en 2016 ou de celui de 600 millions d’euros émis par Icade en 2017.

La certification environnementale des bâtiments est aujourd’hui devenue un standard en Europe, où la plupart des bâtiments sont certifiés par un organisme tiers, comme le montrent chaque année depuis 2014 les résultats du Baromètre de la Certification EnvironnementaleTM produit et publié par Green Soluce. Pour guider les investisseurs, des référentiels complémentaires à ceux existants apparaissent, prenant en compte de nouveaux défis de développement durable, à l’instar du risque climat, de la résilience et des problématiques sociétales. Il s’agit par exemple des labels OsmoZ, certification dédiée à la qualité de vie dans l’environnement de travail, ou du label BiodiverCity, garantissant la prise en compte de la biodiversité dans les projets immobiliers. L’outil européen d’évaluation des bâtiments durables, Level(s), par son approche en analyse de cycle de vie et la conciliation de critères environnementaux, sociaux et économiques, représente également une ressource pertinente pour les acteurs.

In fine, le défi est maintenant de concevoir des indicateurs lisibles de la durabilité des bâtiments, permettant aux gestionnaires de communiquer clairement à leurs investisseurs sur leur performance ESG dans la cadre d’un reporting d’impact enrichi.

 

Par Ella ETIENNE-DENOY, Directrice Générale & Associée, Green Soluce

 

Retrouvez ici l’édition 2018 du Baromètre de la Certification EnvironnementaleTM par Green Soluce :

https://www.greensoluce.com/barometre-de-la-certification-environnementale-edition-2018/

 

Pour en savoir plus sur Green Soluce et ses quatre hubs d’expertise, Advisory, Learning Sustainable Finance et Content, contactez-nous.

Site internet : http://www.greensoluce.com/qui-sommes-nous/

Linkedin : https://www.linkedin.com/company/green-soluce/

 

Sources :

https://www.novethic.fr/fileadmin//user_upload/tx_ausynovethicetudes/pdf_complets/Novethic-Panorama_des_labels_europeens_de_finance_durable-2019.pdf

 

http://www.planbatimentdurable.fr/IMG/pdf/guide_article_173_pwc_oid_esg_climat_immobilier.pdf

 
L'AGENDA :

Retrouvez Ella Etienne lors de Cities to Be en plénière "Money, money, money : pour que tous les projets trouvent leur financement" vendredi 13 septembre à 11h30


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